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Sigrid Weigel
Ginevra Conti Odorisio, professeure d’histoire, Université de Rome 3
Dans cet exposé, je présenterai, en première partie, quelques données historiques sur le problème de l’institutionnalisation des études de genre dans les Universités, en Italie, de 1985 à 2005. J’aborderai, en seconde, la question complexe de l’usage de ce concept dans la recherche scientifique. Un des résultats les plus intéressants du mouvement féministe a été celui de souligner l’absence de connaissances de l’histoire des femmes et en général de l’apport des femmes à l’histoire, aux sciences et aux différentes disciplines, comme l’histoire de la pensée politique, dont je m’occupe.
Gaël Pannatier et Magdalena Rosende
Les Etudes Genre ont connu un développement réjouissant cette dernière décennie en Suisse, avec la création de plusieurs postes dans les universités. Derrière ce tableau idyllique, il faut cependant relever que la plupart des postes, centres ou projets ne sont pas stables et que les avancées sont le produit de luttes et d’investissements de temps importants de la part des chercheur·e·s féministes. Dans ce pays fédéraliste, plurilingue, et composé de dix universités de taille modeste, la particularité du champ des Etudes Genre est la volonté de mise en réseau sur le plan national. Elle se traduit notamment par deux projets qui oeuvrent pour beaucoup dans l’essor des Etudes Genre : le LIEGE (Laboratoire interuniversitaire en Etudes Genre) basé à l’Université de Lausanne (et principalement romand) et la plateforme internet GenderCampus, rattachée à l’Université de Berne.
Ana Iriarte, Universidad del País Vasco, Espagne
Au mois de juin 2005, à Madrid, l’Association de Recherches en Histoire des Femmes a organisé un séminaire, sur l’oeuvre de Joan Scott. Notamment, sur l’influence du concept de gender dans l’historiographie féministe espagnole. Concept que l’historienne américaine a défini en 1986, avec l’énorme succès dans la discipline historique qu’on connaît toutes.
La participation enthousiaste de Joan Scott à ce séminaire nous a beaucoup appris et éclairé à propos du devenir des études de gender des deux dernières décennies ainsi que des préoccupations actuelles de l’historienne américaine, concentrée sur la tension qu’elle perçoit entre l’universel garantissant, depuis la Révolution de 1789, l’égalité de tous devant la loi et la moderne conception de la différence des sexes. Or, malgré ses effets enrichissants, la visite de Joan Scott n’a fait que dévoiler la réticence des études féministes espagnoles à assimiler la catégorie de gender dans le double sens que lui prêta cette théoricienne. Plus précisément, les études espagnoles sur les femmes n’ont pas manqué d’adopter l’usage, déjà universel, du terme gender, mais, cet emploi est loin d’impliquer la prise de position sur l’inégalité ou le pouvoir qui a fait de cette catégorie d’analyse un outil vraiment novateur pour les études féministes.
Astrid Deuber-Mankowsky, Université de Bochum, Allemagne
La problématisation du genre et de sa relation avec les sciences de l’homme d’un côté, les sciences exactes de l’autre ; le lien entre sexe et genre, l’élucidation de l’historicité de cette différenciation ; les recherches sur l’intersexualité, la transsexualité et sur leurs interactions avec les technologies médicales ou l’histoire de l’endocrinologie ; les changements des relations des sexes/genres et des relations familiales à travers les technologies de procréation : toutes ces thématiques ont été focalisées pendant les dernières années par les gender studies. A travers les thématiques en question ces études sont devenues une « tentative » pour les étudiants qui constitue, pour citer Michel Foucault, une mise à l’épreuve changeante d’eux-mêmes. Le sexe/genre (Geschlecht) devient une chose épistémique, un objet du savoir, le savoir devenant un objet de désir et la connaissance un exercice de soi-même.
Simone Valantin
L’idée vient parfois que l’on pourrait réécrire le réel contemporain de la féminité et élaborer des concepts complémentaires à la théorie freudienne. Les batailles féministes, depuis longtemps tenues à l’écart de la psychanalyse méfiante à l’égard de toute idéologie - hormis la sienne - font entendre des nouveautés du côté des représentations de la sexuation.
Michèle Riot-Sarcey
Tout a été dit ou presque sur les relations conflictuelles entre l’analyse historique fondée sur le genre et l’écriture de l’histoire sociale, politique ou économique. Dans tous les pays, les historiennes, particulièrement, se plaignent de la faible intégration des femmes dans l’Histoire, au sens global du terme.
Le mode de penser l’histoire en France est cependant assez spécifique, si l’on en juge par le rapport tendu de ses historiens avec la question du genre.
Christine Planté
Christine Planté
Pour décrire les positions en présence dans les différents travaux concernant la place des femmes et les rapports sociaux entre les sexes, on a l’habitude de recourir aux termes, supposés antinomiques, d’égalité et de différence, ou encore on parle d’un féminisme égalitaire et d’un féminisme identitaire . Le premier, héritier des Lumières, revendiquerait l’application à toutes et à tous des droits des individu(e)s né(e)s libres et égaux/ ales, ce qui suppose de démontrer que les femmes sont bien des individus, des êtres humains, autant que les hommes, et que la différence des sexes, les comportements sexuels tels qu’ils sont connus, sont impensables indépendamment de leur construction sociale, historique et culturelle. Le deuxième, tenant la différence pour acquise, dénonce son occultation, ses travestissements ou utilisations par une société phallocentrique, cherche à en changer le sens et la valeur, et la place au fondement d’une réflexion théorique, politique et éthique.