Date de mise en ligne : [04-02-2015]
Mots-clés : corps | masculin | migration | littérature | monde arabe
Colloque international
19-20 novembre 2015
Université de Lorraine Campus Lettres et Sciences Humaines de Nancy
Comité d’organisation :
Naouel ABDESSEMED, Doctorante en Littérature arabe contemporaine, Université de Rennes 2 (naouel.abdessemed@uhb.fr)
Nassima BERKOUCHI-CLAUDON, Doctorante en Littérature arabe contemporaine, Université de Lorraine (nassima.claudon@univ-lorraine.fr)
Amina CHORFA, Doctorante en Littérature arabe contemporaine, Université de Lorraine (amina.chorfa@univ-lorraine.fr)
Muriel LE BLOA, Doctorante en Littérature arabe contemporaine, Université de Rennes 2 (muriel.lebloa@uhb.fr)
Lamiae KINTZINGER, Doctorante en Littérature arabe contemporaine, Université de Lorraine (lamiae.kintzinger@univ-lorraine.fr)
Argumentaire :
Avant la parution, en 2005, de la grande encyclopédie en trois volumes sur L’histoire du corps, dirigée par Alain Corbin, Jean-Jacques Courtine et Georges Vigarello, l’histoire de la perception du corps humain, en particulier le corps masculin, a longtemps souffert, auprès des chercheurs en sciences humaines et sociales, d’une désaffection injuste. Dès 1962, Lucien Febvre rappelait l’importance de faire l’histoire de « l’homme vivant, l’homme en chair et en os » (Febvre, 1962 : 544-545), tandis que, douze ans plus tard, Jacques Revel et Jean-Pierre Peter déploraient que le corps soit « absent de l’histoire, mais pourtant un de ses lieux ». (Le Goff, 1974). Progressivement, le corps, en tant que « corps qui mange, boit et souffre, d’un personnage en chair et en os dont on raconte l’histoire » (Berthelot, 1997 : 9), devint un véritable objet d’étude, pour les historiens, les sociologues ou les ethnologues. Dans le domaine littéraire cependant, les représentations multiples de l’organicité du corps dans la fiction n’offrent que de trop rares études scientifiques, elles aussi souvent incomplètes ou biaisées, en ce sens qu’elles s’intéressent surtout aux corps féminins et excluent presque totalement les corps masculins.
Or, en tant que fait social, produit d’une société et d’une culture déterminées, la littérature de fiction, en poésie ou en prose, produit, à toutes les époques et dans toutes les sociétés, des représentations du corps aux aspects multiformes : elle reflète l’inscription du corps dans un espace, un temps, une culture donnés, son interaction avec une société, ses classes, son organisation, ses perceptions... La mise en scène littéraire du corps tient ainsi compte à la fois de ses aspects biologiques (propriétés corporelles, caractéristiques physiques,...) et de ses rapports avec la société (vêtements, accessoires, attitudes, mouvements, manifestations culturelles, valorisation/dévalorisation...). « Le corps est en effet, au même titre que tous les autres objets techniques dont la possession marque la place de l’individu dans la hiérarchie des classes, par sa couleur (blafarde ou bronzée), par sa texture (flasque et molle ou ferme et musclée), par son volume (gros ou mince, replet ou élancé), par l’ampleur, la forme ou la vitesse de ses déplacements dans l’espace (gauche ou gracieux), un signe de statut ‒ peut-être le plus intime et par là le plus important de tous ‒ dont le rendement symbolique est d’autant plus fort qu’il n’est pas, le plus souvent, perçu comme tel et n’est jamais dissocié de la personne même de celui qui l’habite » (Boltanski, 1971 : 206). L’évolution de la représentation du corps en littérature est subordonnée aux multiples mutations de « dynamiques temporelles, autant de visions différentes du monde et d’investissements différents dans le corps. » (Corbin, Courtine et Vigarello, 2006 : III, 9). Ainsi, le corps, en tant qu’objet littéraire, est intrinsèquement lié à un contexte, sans lequel il n’a aucune existence : « Corps à écrire, il est aussi un corps à lire qui possède sa signification propre à l’intérieur de l’œuvre. En ce sens, il est le texte premier, ce à partir de quoi le livre a été écrit. C’est un système de signes, donc de significations, qui fait pendant au système de sens que le texte comme écriture déploie. Texte premier et en même temps texte effacé, à reconstituer à chaque lecture comme un palimpseste. C’est là l’ambiguïté du corps romanesque qui tout à la fois s’éclipse devant le regard direct et fait sens » (Hammas, 2003 : 76). De cette constatation naît la question de l’inscription du corps dans le texte narratif, à travers les relations complexes qu’il entretient à l’intérieur du texte, mais aussi en tant que produit d’une identité propre à la fois partagée et singulière.
Le colloque se propose de répondre à cette question au travers de l’étude de la représentation du corps viril en contexte de déplacement, dans la littérature arabe. La virilité sera envisagée dans ses diverses acceptions : en tant que en tant que ensemble des caractéristiques physiques et sexuelles de l’homme, ce qui renvoie tout à la fois aux particularités biologiques de l’homme adulte, à son comportement sexuel et aux qualités morales ou symboliques qui lui sont culturellement attribuées et le distinguent de la femme).
La virilité est au cœur des pratiques culturelles et intellectuelles et y développe des règles, un imaginaire, un langage, des représentations propres. Cependant, dans le domaine arabisant, elle n’a fait l’objet que de rares analyses scientifiques, à de notables exceptions près : La virilité en Islam (Benslama et Fathi, 1998), Penser le corps au Maghreb (Lachheb, 2012) ou encore Récits du corps au Maroc et au Japon (Kober et Zekri, 2012). Il s’agira donc d’étudier ce corps viril à l’épreuve du déplacement, de quelque type qu’il soit, qu’il soit vécu comme un enrichissement ou comme une déchirure : contraint ou volontaire, définitif ou transitoire, réel ou fantasmé, réussi ou manqué, ponctuel ou régulier, migration, émigration, immigration, expatriation, déportation, bannissement, exclusion, exil, exode, déracinement et ré-enracinement, voyage d’agrément, voyage d’étude.
Ce colloque a pour ambition de questionner le corps et la virilité à l’épreuve du déplacement, dans le corpus littéraire arabe en poésie ou en prose (fiction, roman, nouvelle, théâtre, témoignage, récit de voyages), arabophone ou allophone, moderne ou contemporain. Il envisagera, au travers de divers types de méthodologies ‒ sociocritique, écocritique, sémiotique, narratologie, intertextualité, poétique, physiognomonie, « sociologie des usages sociaux du corps » (Détrez, 2002)... ‒, trois axes majeurs :
1. Corps déplacé et altérité
Il s’agira d’étudier, au-delà de la vision des gender studies, la représentation littéraire du corps de l’autre du corps désiré, du corps exotique, du corps agressé/agressif, du corps à corps, du corps dans l’amour et dans la lutte, dans la mêlée, du corps découvert, du corps caché, du corps exposé,...
2. Corps migrant et territoire(s)
Cet axe s’intéressera aux marques du territoire sur le corps et aux indices physiques de la déterritorialisation. On y étudiera notamment le passage des frontières, le reflux aux frontières, le corps déplacé malade, le corps clandestin notamment. Pourront être analysées aussi les représentations des rituels ou habitudes du corps, en tant qu’ils sont conservés ou au contraire effacés, minorés ou dissimulés...
3. Corps exilé et (re)connaissance de soi
Reconnaître le corps dans son territoire est une chose, le voir ailleurs est autre chose. Certains corps déplacés peuvent ne pas se reconnaître eux-mêmes, espérer être vus ou au contraire chercher à se fondre dans la masse. Le corps délocalisé peut être non reconnu et envisagé comme arraché, perdu, altéré, reconstitué, dissimulé, déguisé, travesti, clandestin, transformé, mutilé, atrophié, défiguré, exhibé, honni, ...
Modalités :
Propositions de communication 1 page isolée comportant le nom, l’appartenance institutionnelle, le grade, le titre de la communication et les coordonnées de l’auteur (adresse professionnelle, adresse personnelle, adresse électronique et téléphone)
Sur 1 autre page : une proposition de 15 à 20 lignes en français, en anglais ou en arabe (Word, Times 12, interligne 1,5) avec indication de l’axe choisi et un titre.
Toutes les propositions seront soumises à une double expertise en aveugle des membres du comité scientifique. Les propositions de communication seront adressées conjointement à :
Elisabeth Vauthier : elisabeth.vauthier@uhb.fr Laurence Denooz : laurence.denooz@univ-lorraine.fr
Calendrier
15 avril 2015 : date de retour des propositions
1er juin 2015 : envoi des avis du comité scientifique aux auteurs
19-20 novembre 2015 : colloque
30 janvier 2016 : remise des textes à Laurence Denooz et Elisabeth Vauthier
1er avril 2016 : envoi des avis du comité scientifique aux auteurs pour corrections
30 mai 2016 : remise des textes définitifs pour publication
Les articles retenus, après avis du comité scientifique, feront l’objet d’une publication. Les consignes éditoriales feront également partie de l’évaluation du texte.
Frais d’inscription : 30 euros. Les frais de déplacement ne sont pas pris en charge. Les déjeuners et l’hébergement seront offerts aux intervenants.