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(Il)légitimité et conflictualités des discours dans les espaces publics

Avant le 15 octobre - revue Etudes de communication


Date de mise en ligne : [07-09-2015]



Mots-clés : communication


Etudes de communication, Dossier thématique n° 47
Coordination : Marion Dalibert (GERiiCO, Université Lille 3), Aurélia Lamy (GERiiCO, Université Lille 1), Nelly Quemener (CIM-MCPN, Université Sorbonne Nouvelle)

Argumentaire :

La publicité des débats sur le « mariage pour tous », sur la fin de vie ou encore la théorie du genre rend compte de nombreux échanges d’arguments entre différents acteurs, qu’ils soient du monde politique, scientifique, associatif, médiatique ou culturel. Suivant la notion de « sphère publique bourgeoise » développée par Jürgen Habermas (1997 [1962]), la configuration d’une arène de discussions faisant office d’une part, de médiateur entre la société civile et l’État, et d’autre part, de lieu où des discours critiques peuvent être formulés égalitairement et adressés au pouvoir, est l’une des conditions de l’existence des régimes démocratiques. Cette définition normative de l’espace public a cependant été fortement discutée : en plus de proposer la description d’un espace public aujourd’hui révolu, elle ne rendrait pas compte des exclusions qui s’y matérialisent ainsi que de la pluralité qui le caractérise lactuellement. En réponse à Habermas, certains ont formulé l’idée d’un espace public fragmenté (Bastien, Neveu, 1999, Miège, 2010), constitué d’une multiplicité d’arènes, qui seraient autant de lieux de conflictualités dans la production de sens. Une telle conception amène à considérer les hiérarchies qui s’établissent entre les arènes, toutes ne bénéficiant pas d’une même visibilité sociale. Ainsi, les débats et « problèmes publics » sont toujours le résultat de « luttes pour la signification » (Hall, 2007), c’est-à-dire de toute une série d’oppositions entre des discours, des représentations ou des idéologies. Or la configuration de ces luttes et la qualification des positions de chacun, hégémoniques/contre-hégémoniques, majoritaires/minoritaires, dominantes/alternatives, légitimes/illégitimes, diffèrent selon l’arène publique où la discussion se réalise (manifestations de rue, presse écrite...).
Dans cette diversité, l’une des arènes qui permet aux discours, mais aussi aux individus et groupes sociaux, d’apparaître devant l’ensemble de la communauté nationale (Arendt, 1961 [1958], Anderson, 1996 [1983]) est constitué des « grands médias ». Cette arène publique spécifique, nommée « sphère publique globale » par Nancy Fraser (2001 [1990]), « espace public national » par Pierre Favre (1999) ou encore « espace public dominant » par Peter Dahlgren (2000), est un champ de bataille discursif où se manifeste un grand nombre de rapports de pouvoir dont les conséquences peuvent être l’invisibilité et la disqualification, autant des discours que des identités des acteurs qui les portent (Voirol, 2005, Butler, 2005). Nancy Fraser montre ainsi que certains groupes ont un accès privilégié aux « grands médias », notamment lorsqu’ils sont associés à la masculinité, à l’hétérosexualité, aux classes supérieures et à la « blanchité » [whiteness] (Dyer, 1997, Cervulle, 2013). Dès lors, les minorités constituent des « contre-publics subalternes ». Ils s’emparent d’espaces aux audiences plus restreintes pour interpréter leurs identités et leurs besoins, formuler des revendications et former des contre-discours. À ce titre, le Web 2.0 joue aujourd’hui un rôle essentiel dans le développement de moyens d’accès à la parole publique des groupes subalternes. Fortement investi par la sphère militante qui occupe des espaces dédiés sur les forums, les sites ou les réseaux sociaux, il est certes un terrain de conflictualités mais aussi un lieu privilégié pour l’émergence de visions et définitions du monde alternatives.
Ce numéro de la revue Études de communication se propose d’interroger la conflictualité sémantique et les luttes pour l’hégémonie (au sens de Gramsci) qui se jouent dans les espaces publics, qu’ils soient matériels, immatériels, médiatiques ou en ligne (médias traditionnels et/ou alternatifs, forum internet, réunion publique, scène slam/spoken word, séries télévisées...). Son objectif est de questionner d’une part, les processus de (non) reconnaissance (Honneth, 1995 [2000] ; Voirol, 2005) et de (non) légitimation de discours sociaux, faits de paroles, actes, représentations ou idéologies qui se manifestent dans une ou plusieurs arènes publiques, d’autre part, les rapports (y compris de pouvoir) entre la sphère publique globale/nationale/dominante et les micro-espaces publics. Il s’agit en outre de porter attention à la formation d’arènes publiques à partir de discours/représentations/idéologies parfois contradictoires et de groupes aux intérêts divergents, ainsi qu’à la place de ces espaces de coalition dans les logiques d’hégémonisation (Laclau, Mouffe, 2009 [1985]).
Trois axes thématiques peuvent servir de repérage aux propositions d’articles pour ce dossier :
- Caractérisation et (dis)qualification des discours. Cet axe vise à interroger la manière dont certains discours/représentations/idéologies sont (dis)qualifiés dans un ou plusieurs espaces publics et leur(s) caractérisation(s) : comment se construit la légitimité ou l’illégitimité des discours qualifiés de « dissonants », d’« alternatifs » ou encore de « minoritaires » ? Comment cette (il)légitimité se distribue-t-elle selon les arènes ? Par quels processus argumentatifs ? Quelles sont les instances et/ou acteurs de légitimation et de régulation (dans les médias traditionnels et alternatifs, les forums internet, les réunions publiques...) et comment opèrent-ils ?
- Accès des discours et groupes sociaux aux espaces publics. Cet axe s’intéresse plus particulièrement aux processus d’accès des discours aux espaces publics et au rôle de l’identité sociale de l’énonciateur : par quels processus certains discours (politiques, militants, scientifiques...) apparaissent-ils dans l’espace médiatique ? Comment des discours opérant dans des micro-espaces publics peuvent-ils émerger dans l’espace public global/dominant/national et vice- versa (processus d’événementialisation médiatique, agenda politique...) ? Au sein des espaces publics, peut-on identifier des normes ou des « cadres » socio-discursifs — implicites ou explicites — qui participeraient à circonscrire ou à réguler les discours et identités qui peuvent y apparaître ? Comment l’articulation du genre, de la race, de la classe sociale ou encore de l’âge interfère-t-elle dans les processus d’accès aux espaces publics et organise-t-elle les luttes autour de la définition des termes du débat public ?
- Circulation et reconfiguration des discours selon les espaces. Il s’agit ici de s’intéresser à la manière dont certains discours, représentations, idéologies naissent, vivent, circulent et se reconfigurent au gré des espaces publics. Quels sont les modes de circulation des discours ? Dans quelle mesure ces derniers font-ils l’objet de réappropriations différenciées selon les espaces ? Quels sont alors les acteurs mobilisés (associatifs, intellectuels, politiques et anonymes) dans ces logiques de réappropriation selon les espaces ? Dans quelle mesure les micro-espaces publics occupés par les discours jugés illégitimes dans l’espace médiatique sont-ils aussi des lieux de structuration et de formation de communautés d’intérêts et de pensée ? Comment la disqualification d’un discours opérée dans une arène peut-elle devenir un moyen pour construire une légitimité et une certaine publicité dans une autre ?

Modalités :

La sélection des propositions de contribution se fait en deux temps :
. Sur la base d’un résumé de 1.500 à 2.000 mots qui présentera les objectifs, l’argumentation et l’originalité de la proposition ainsi que quelques orientations bibliographiques.
. Pour les résumés retenus, une seconde évaluation sera réalisée sur la base des articles définitifs.
Les instructions aux auteurs sont disponibles sur le site de la revue : http://edc.revues.org L’évaluation sera assurée de manière anonyme par au moins deux lecteurs du comité. L’envoi des résumés au format Word (.doc) ou PDF se fait aux trois adresses suivantes : marion.dalibert@univ-lille3.fr
aurelia.lamy@univ-lille1.fr nelly.quemener@univ-paris3.fr
Les propositions d’articles et les articles définitifs d’une longueur de 35.000 signes (espaces, notes de bas de page et bibliographie compris) peuvent être soumis en français ou en anglais.

Calendrier :

15 octobre 2015 : soumission du résumé 15 novembre 2015 : notification de l’acceptation ou du refus du comité de lecture aux auteurs 15 mars 2016 : remise de la version complète des articles 15 juin 2016 : réception des versions définitives Fin décembre 2016 : publication du numéro (version papier et version électronique).

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