Dans le cadre du 5e Congrès du réseau des associations francophones de science politique « Les régimes politiques et leurs transformations au 20e siècle »
Luxembourg les 24-26 avril 2013
Présentation :
Fruit d’une histoire de plusieurs décennies pendant lesquelles les revendications féministes ont peu à peu pénétré les agendas des institutions internationales, le genre est désormais une « norme de gouvernement à part entière », voire même un « paradigme central du capitalisme globalisé » (Hours, Selim 2010). Concrètement institutionnalisé comme une nouvelle catégorie d’action publique sous la forme du gender mainstreaming, de la parité, de l’empowerment des femmes, voire de différentes formes de gouvernance centrées sur leur « capacité d’action » (agency) et faisant recours aux ONG et aux organismes publics et parapubliques des droits des femmes (Squires, 2007), le « genre » connaît une diffusion impressionnante grâce à son inscription sur l’agenda d’acteurs supra- et internationaux (Union européenne, ONU, Banque mondiale et Fonds monétaire international, fondations politiques et philanthropiques).
Les normes de genre sont constamment mobilisées dans des situations de reconfiguration de l’ordre politique : des « transitions » démocratiques latino-américaines aux « printemps arabes », en passant par les transformations post-communistes en Europe de l’Est jusqu’aux pays issus de la colonisation censés connaître des trajectoires de « développement » ou les régions « post-conflits » en voie de pacification. Dans tous ces contextes - aussi diversifiés fussent-ils -, l’ampleur des changements politiques s’est vue mesurée à l’aune de l’égalité entre les sexes et de l’avancement de la condition des femmes (en termes d’éducation, de représentation politique mais aussi d’autonomie économique ou de « bien-être »), voire, plus récemment, de l’état des droits des « homosexuel-l-es, bi et trans ». Les politiques de coopération leur réservent une place importante, de nombreux institutions et programmes internationaux mettent en place des dispositifs d’aide conditionnée et diffusent en direction des Etats un arsenal de plus en plus sophistiqué de mesures centrées sur l’égalité femmes-hommes et sur les droits des personnes « LGBT ».
Si l’action des gouvernements nationaux tout aussi bien que celle des groupes mobilisés en est indiscutablement orientée, les répertoires internationaux connaissent des traductions et des modalités d’adaptation variables selon le contexte de réception et ils sont incorporés dans des logiques localisées, propres à des espaces de luttes politiques dont les trajectoires historiques sont diverses. Les conceptions de l’égalité varient, l’articulation des divers rapports sociaux intervient à divers degrés pour infléchir les priorités politiques, la compréhension même de la notion de « genre » change selon les contextes institutionnels et sociaux.
La diffusion du paradigme « genre » - comme prisme perfectionné d’appréhension du « développement », de la « démocratie », des « droits humains », du respect de l’« environnement » et aujourd’hui de la « diversité » - peut être comprise comme le fruit d’une interdépendance forte entre organisations internationales, Etats, milieux experts et groupes mobilisés et se prête bien à une interrogation en termes de sociologie de la gouvernance globalisée. Afin de développer ce raisonnement, le présent panel sera consacré à la sociologie des processus de diffusion, voire des modalités spécifiques de réception des normes internationales en matière d’égalité dans différents espaces nationaux, à différentes échelles et dans différents secteurs de l’action politique - gouvernements et institutions étatiques, groupes militants nationaux et transnationaux, milieux experts. Selon quelle logique socio-politique les normes de genre sont-elles construites et transformées ? Quels sont les acteurs/actrices de cette production et circulation ? Quelle est leur liberté d’action et quelles contraintes politiques, sociales et discursives rencontrent-ils/elles ? Pour une sociologie fine de ces processus, nous encourageons les propositions de communications qui réservent une place à l’analyse des figures et carrières de « courtiers » du genre inscrits dans des « espaces de pratiques transnationales » (Dezalay, Rask Madsen 2009), ainsi qu’à l’étude de processus concrets de négociation de documents internationaux (conventions, décisions, plateformes, etc.) porteurs de normes de genre.
Merci d’envoyer des propositions de communications (4000 signes maximum, références comprises) en utilisant le formulaire joint à : Ioana.Cirstocea@misha.fr ; Isabelle.Giraud@unige.ch ; demos@uni.lu (comité d’organisation du congrès) avant le 15 décembre 2012.