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Démarches méthodologiques et perspectives féministes

Avant le 1er septembre - revue Recherches féministes


Date de mise en ligne : [02-09-2014]



Mots-clés : théorie


Pour un prochain numéro de la revue Recherches féministes sous la direction de Hélène Charron et Isabelle Auclair

Argumentaire :

La réflexion méthodologique et épistémologique est au cœur des pensées et des théories féministes, au moins depuis le XIXe siècle. La reconnaissance du caractère partiel et androcentrique des connaissances produites par les sciences modernes a amené des intellectuelles et des chercheuses féministes à proposer d’autres modes d’appréhension du réel qui permettraient de construire des savoirs moins aveugles aux expériences des groupes sociaux dominés. La construction de la légitimité des études et des recherches féministes universitaires s’est notamment appuyée sur des postures épistémologiques et des propositions méthodologiques originales réarticulant le rapport entre objet d’étude et sujet de connaissance autour d’une praxis intégrant le projet politique féministe au projet scientifique. Ce sont les liens étroits entre le mouvement des femmes et le milieu universitaire féministe qui ont été le ferment de conceptions subversives de la recherche, ancrées dans le changement social et dans une praxis exigeante. Les années 80 ont été riches d’écrits savants sur la méthodologie féministe tant au Québec (Dagenais 1986 ; Mura 1988), en France (Michard et Ribery 1982) et dans le monde anglo-saxon (Harding 1987 ; Hill Collins 1987) que dans des univers non occidentaux (Moraga et Anzaldua 1983 ; Mohanty 1988 ; Mahmood 2001 et 2009). Depuis cette époque, toutefois, de nombreux changements se sont opérés tant dans l’espace de la recherche que dans celui des luttes féministes à l’extérieur du milieu universitaire. La multiplication des ouvrages féministes sur la méthodologie et l’épistémologie font état de la diversification des questionnements et des pratiques de recherche féministe.
Une majorité des nouvelles chercheuses féministes arrivent maintenant au féminisme par les études plutôt que par le militantisme (Bessin et Dorlin 2005). Qu’en est-il du lien organique entre les luttes et la recherche féministe ? Comment maintenir des pratiques méthodologiques subversives qui demeurent ancrées dans le réel actuel des rapports sociaux de sexes ? Comment maintenir une posture critique des modes de fonctionnement de l’institution universitaire et des pratiques scientifiques dominantes qui continuent de contribuer à la reproduction des inégalités ? Dans un contexte d’éclatement des cadres théoriques et de la multiplication des objets de la recherche féministe, quelles sont les nouvelles approches méthodologiques nous permettant de mieux prendre en considération la complexité du réel, l’interaction des différentes formes d’inégalités sociales ? Comment se mettent en œuvre les épistémologies féministes du point de vue et de la connaissance située ?
Le numéro de la revue Recherches féministes consacré à ce thème servira à mettre en lumière les réflexions les plus actuelles sur la méthodologie féministe, entendue à la fois comme réflexion épistémologique sur les critères de validité des savoirs, comme réflexion théorique sur la praxis féministe et l’articulation de la production de savoirs et l’action politique féministe, comme explicitation des procédures mise en œuvre de recherches féministes particulières ainsi que comme réflexion sur des procédés d’enquêtes privilégiés par les recherches féministes.

Quatre axes de réflexion sont proposés, mais ils ne doivent pas être interprétés dans un sens restrictif. Ainsi, ce numéro accueillera volontiers :
1) des réflexions générales et théoriques sur les méthodologies féministes, l’épistémologie et les règles de constitution des savoirs, sur l’articulation entre l’empirie et la théorie, sur la praxis féministe et l’engagement des chercheuses par rapport à leur terrain d’enquête, sur les relations hiérarchiques entre les savoirs et les méthodologies féministes, etc. ;
2) des réflexions théoriques sur les différents contextes et postures féministes en rapport avec les dispositifs méthodologiques privilégiés. Les Blacks féministes et les chicanas sont des exemples de courants qui ont participé à la remise en question des théories et des méthodes féministes généralement adoptées par la majorité des féministes du Nord ou occupant des positions institutionnelles avantageuses : quelle résonnance ont ces critiques des inégalités entre femmes et de la déradicalisation du féminisme institutionnalisé sur la méthodologie de recherche et la construction des connaissances ? Comment ont évolué ces courants et les autres qui s’inscrivent dans le même type de questionnement depuis les dernières décennies ? La mise en œuvre méthodologique des avancées conceptuelles des dernières décennies, notamment à propos de l’articulation des diverses formes d’inégalités sociales, méritent des explicitations qui seront profitables à l’ensemble des chercheuses féministes ;
3) des réflexions entourant l’état actuel des méthodologies féministes et des défis institutionnels auxquels elles doivent faire face : comment les recherches féministes parviennent-elles ou non à établir des relations égalitaires dans la production de leurs savoirs (dans leurs équipes et avec les personnes rencontrées), sachant à quel point les critères de promotion et de reconnaissance de l’institution universitaire reposent de plus en plus sur une conception productiviste et capitaliste de la recherche qui est contraire à l’éthique que les diverses définitions de la méthodologie féministe défendent ? Dans ce contexte, comment continuer à décrypter ce qui apparaît comme trivial, évident ou secondaire et échapper aux modes universitaires, et à fonctionner dans la temporalité lente des procédés de recherche privilégiées par la recherche féministe ? Quel est l’état général de la méthodologie féministe maintenant que le concept de « genre » a été récupéré par un ensemble de chercheurs et de chercheuses qui ne se reconnaissent pas féministes ? Ces questions gagneront à être creusées ;
4) des réflexions autour des méthodes d’enquête privilégiées par la recherche féministe : quels sont les enjeux autour de l’utilisation de la recherche-action participative ? de l’enquête orale ? des récits de vie ? d’autres procédés de recherche mis en œuvre dans des recherches féministes particulières ? Quels types de savoirs résultent de ces méthodes ? Quels obstacles particuliers caractérisent leur utilisation ? Quels sont les conditions de leur utilisation réussie ? Comment les épistémologies et l’éthique féministe s’intègrent-elles concrètement au processus méthodologique ? Quelles balises peuvent garantir l’explicitation de l’engagement et de la position de la chercheuse ?

À noter que toute proposition ne s’inscrivant pas directement dans ces axes, mais demeurant dans l’esprit de l’appel de propositions sera également considérée.

Contacts :

Hélène Charron (hel.charron@gmail.com) et Isabelle Auclair (isabelle.auclair@ant.ulaval.ca)
http://www.recherchesfeministes.ulaval.ca/wp-content/uploads/2014/01/Appel-de-textes-29-1-FINAL.pdf

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