Colloque Jeunes Chercheur.e.s 2014
Laboratoire Dipralang EA 739
Comité d’organisation :
Nina Bogataïa, Chahrazed Dahou, Amandine Denimal,
Chiara Grenzi, Yuanjing Li, Virginie Polge-Loï, Françoise Roche, Carolina
Soler Milan, Maude Vadot
ITIC – Université Paul Valéry Montpellier 3
20 et 21 novembre 2014
Argumentaire :
Les études de genre, apparues aux Etats-Unis sous l’appellation « Gender
Studies » il y a une quarantaine d’années, se sont peu à peu imposées
comme domaine de recherche à part entière susceptible de traverser
l’ensemble composite des sciences humaines et sociales. Pourtant, comme le
constataient Natacha Chetcuti et Luca Greco en 2012, les études de genre
peinent, en France, à trouver un écho en sciences du langage : selon ces
auteurs, « peu d’études relient la question des pratiques langagières
avec celles du genre » (La face cachée du genre, p. 9).
L’objectif du présent appel est donc de proposer aux jeunes chercheur.e.s
en sciences du langage, quels que soient leur domaine de spécialité et le
sujet de leur recherche, de confronter leur(s) objet(s) à la thématique
du genre. Nous pensons en effet que beaucoup de questions que se posent les
chercheur.e.s en sciences du langage peuvent être déclinées sous l’angle
des problématiques soulevées par les études de genre, afin de contribuer
au fondement de l’articulation des études sur le genre et de celles sur le
langage en tant que domaine constitué en France, en écho aux Gender and
Language Studies nord-américaines (Lakoff 1975, Spender 1980, Cameron 1985
et 1998, Eckert, Butler 1990 et 1997 et Meyerhof 2004, Talbot 2010 etc).
Les doctorant.e.s et jeunes docteur.e.s intéressé.e.s par la thématique,
même s’ils/elles n’en sont pas spécialistes, sont donc vivement
encouragé.e.s à candidater.
Nous entendons ici les genres comme constructions sociales des rôles
masculin et féminin, guidant le sujet vers une manière d’être homme ou
femme, et par conséquent susceptibles de varier d’un groupe socio-culturel
à l’autre ainsi que d’évoluer dans le temps. Le genre, quant à lui, est
compris comme le rapport social hiérarchique divisant le monde en deux
catégories fondées sur des caractéristiques sexuelles – que l’on peut
voir comme elles-mêmes travaillées par le social.
Nous prenons ainsi les études de genre dans une acception large, qui
laisse la place tant aux recherches visant à analyser l’éventuelle
influence de la variable genre, quel que soit le domaine d’étude du
langage considéré, mais aussi les recherches se donnant pour objectif
d’observer la manière dont les dispositifs catégoriels spécifiques au
genre sont élaborés, construits, mobilisés, reconfigurés à travers le
langage.
Afin de baliser le colloque et d’inspirer d’éventuelles propositions, nous
listons ci-dessous des pistes de recherche possibles. Cette liste n’est pas
exhaustive et ne doit donc pas être prise comme limitative.
Axe 1 : mobilisation des distinctions genrées dans les discours
Les communications analysant les représentations des genres dans un type
de discours spécifique sont les bienvenues. On pourrait alors interroger
la construction d’une féminité ou d’une masculinité plus ou moins
homogènes, ainsi que la construction de la binarité elle-même.
Il serait également intéressant de comparer en synchronie différents
types de discours suscités par un même événement social (médiatisé ou
non), afin de dégager les paramètres (type de discours, type de média,
acteur/trice.s sociaux etc) ayant une influence sur le type de
représentation mis en scène.
On pourra également faire porter l’attention sur l’utilisation pragmatique
du genre - ou de son brouillage - comme instrument de construction de son
ethos par le locuteur ou la locutrice : par quelles traces ce marquage
est-il rendu visible ? dans quel(s) but(s) ? avec quels effets sur les
allocutaires ?
Dans la même voie, on pourra aborder l’étude de la variable genre dans la
recherche d’éventuelles spécificités conversationnelles et
interactionnelles.
La variable genre intervient-elle dans le rapport au langage des sujets, et
si oui en quoi ?
Toutes ces thématiques pourront d’autre part être soumises à la question
transversale suivante : dans quelle mesure les représentations mises en
scène dans les discours étudiés peuvent-elles être ressenties comme des
injonctions / assignations sur les acteur/trice.s ? Les locuteur/trice.s
essaient-ils/elles de jouer avec ces assignations et si oui, de quelle
manière ? Qu’est-ce qui facilite ce jeu ou, au contraire, l’empêche ?
Axe 2 : constructions sociales du genre et normes linguistiques et
grammaticales
D’une langue à l’autre, les marques de genre contrastent et se distinguent
par leurs spécificités ou leur absence dans certaines langues. Le genre
étant à la fois une catégorie morphosyntaxique, sémantique et sociale,
on pourra s’interroger sur les intrications entre construction sociale et
construction linguistique du genre (Abbou 2011, thèse non publiée).
Dans une perspective comparatiste en synchronie, comment les langues du
monde rendent-elles compte de cette catégorie sociale ? Que peut-on dire
de l’articulation du genre comme catégorie sociale et comme catégorie
linguistique ?
Dans une perspective diachronique, quelle(s) évolution(s) de la catégorie
linguistique du genre peut-on reconstituer, ou observer aujourd’hui ? Nous
pensons ici particulièrement au double marquage ou au brouillage des
marques de genre expérimentés par certain.e.s locuteur/trice.s. Quel sens
ces expériences prennent-elles pour leurs acteur/trice.s ?
Enfin, dans une perspective épilinguistique, quels commentaires cette
catégorie suscite-t-elle ? Ces commentaires - et par extension l’ensemble
des représentations liées à la / une langue - sont-ils marqués par le
genre des locuteurs qui les produisent ? Comment, pourquoi ?
Axe 3 : Genre et didactique, genre et acquisition
Toutes choses égales par ailleurs, la variable "genre" entre-t-elle en
compte dans les paramètres influençant l’acquisition d’une langue
première ou l’apprentissage d’une langue seconde ? Si oui, toutes les
composantes de la langue (phonétique, lexique, morpho-syntaxe,
compétences communicatives, schèmes interactionnels et discursifs etc)
sont-elles concernées de la même manière ? Comment le sont-elles ?
La variable genre entre-t-elle en ligne de compte dans la socialisation
langagière et si oui, comment ? Peut-on repérer des stades dans cette
socialisation ?
Que peut-on dire de la variable genre dans les interactions adulte-enfant
ou enfant-enfant ?
Dans une perspective didactique, on pourra rechercher une éventuelle
influence du genre sur la relation et l’interaction enseignant.e -
apprenant.e dans l’enseignement des langues, ainsi que sur le style
d’enseignement ou les types de carrières poursuivis.
D’autre part, quelles représentations du genre l’étude des outils
d’enseignement-apprentissage des langues révèle-t-elle ? Ces
représentations sont-elles homogènes ? Si ce n’est pas le cas, peut-on
distinguer des paramètres en fonction desquels elles varient (par exemple
la culture éducative, le contexte discursif, le public visé et/ou le
degré de spécialisation de la langue enseignée - FLM, FLS, FLE, FOU, FLI
etc) ?
Les politiques d’enseignement linguistique mettent-elles en scène des
représentations des genres de leurs publics et si oui, lesquelles ?
Les langues se voient-elles attribuer un genre dans les imaginaires
linguistiques des locuteurs ? Comment ? Pourquoi ?
Axe 4 : Genre et sciences du langage - outils méthodologiques et cadres théoriques
Ce quatrième axe réunira les contributions des jeunes chercheur.e.s
désireux/euses de mettre l’accent sur les apports théoriques et
méthodologiques de leurs recherches, dans la perspective de la
construction d’un champ spécifique aux études de genre en sciences du
langage. Les propositions devront alors mettre l’accent sur le caractère
innovant des outils méthodologiques ou du cadre théorique développés.
On invitera les communicant.e.s à réfléchir à un éventuel risque de
circularité des études postulant l’homogénéité respective du groupe
des femmes et du groupe des hommes, faisant du groupe des hommes un repère
normatif, et aboutissant de fait à la conclusion que les pratiques
langagières des femmes sont différentes de celles des hommes.
D’autre part, les études de genre étant historiquement liées aux études
féministes, on pourra s’intéresser au rapport entre militantisme et
recherche, en interrogeant ses effets sur la posture du / de la
chercheur.e.
Modalités de soumission :
Les propositions de communication (500 mots environ) doivent faire
apparaître la problématique soulevée, la méthodologie employée et
éventuellement les principaux résultats. Indiquer le titre envisagé,
deux ou trois références bibliographiques, 4 à 5 mots-clés ainsi que
l’axe (éventuellement les axes) dans lequel votre proposition s’inscrit.
L’envoi doit être fait en deux fichiers : le premier contiendra le nom de
l’auteur, le titre de la communication proposée ainsi que l’intitulé
de la thèse, le laboratoire de rattachement, l’université d’origine
et le nom du directeur de recherche. Le second, anonymisé, contiendra
votre proposition accompagnée de son titre, mais sans aucun détail
permettant votre identification.
La date limite pour la réception des propositions est fixée au 25 mai
2014. Elles sont à soumettre par mail (voir adresse ci-dessous) ou
directement sur la plate-forme du colloque : cjc14.sciencesconf.org.
Contact :
cjc14.mtp@gmail.com