Colloque inaugural du DIM « Genre, inégalités, discriminations »
organisé par l’IEC et la région Ile-de-France
27-28 juin 2013 Paris Université Paris Ouest Nanterre La Défense
Présentation :
Le nouveau Domaine d’Intérêt Majeur de la Région Île-de-France « Genre, Inégalités, Discriminations » (GID) a été créé en 2012 pour réunir les activités sur le genre de l’Institut Emilie du Châtelet (IEC) et sur les discriminations de l’Alliance de Recherche sur les Discriminations (ARDIS). Le GID organise sa première grande manifestation scientifique autour de l’articulation de ces deux thématiques.
Genre et Discriminations : ces deux concepts ont en commun de traiter de domination et d’égalité, mais suivant des projets intellectuels et des formes d’action bien différents. S’il y a des discriminations fondées sur le sexe, celles-ci s’inscrivent dans les rapports de genre qui rendent compte des logiques et mécanismes suivis par les discriminations. Mais les discriminations portent sur d’autres critères qui s’appuient également sur des rapports de domination et de pouvoir historiquement constitués dans les sociétés. La « race » fonctionne sous bien des aspects d’une façon très proche de celle du genre, engageant une naturalisation des différences et leur cristallisation dans des catégorisations et hiérarchisation à prétention universelle. Si le concept de genre vise à dénaturaliser la différence des sexes, faussement rapportée à une distinction biologique, la discrimination concerne des inégalités de traitement motivées par des caractéristiques qui ne devraient pas intervenir dans l’accès aux biens ou ressources. Le genre comme les discriminations invitent ainsi à repenser la question des inégalités en déconstruisant les mécanismes de hiérarchisation et en proposant des lexiques d’analyse et par conséquent d’action qui s’entrecroisent mais peuvent également différer.
En effet, si la discrimination ne s’arrête pas au genre, ni au sexe, en retour, le genre n’est pas soluble dans la question des discriminations : il invite à penser inséparablement domination et identification. En outre, tandis que la notion de discrimination est un outil méthodologique qui permet la mesure, mais aussi une arme juridique ouvrant la possibilité d’une contestation et un concept sociologique aidant à comprendre la production des situations minoritaires, le genre est non seulement un outil conceptuel, mais aussi un langage social pour signifier les rapports de pouvoir. Que gagne-t-on à croiser ces perspectives ?
On constate ainsi que le concept de discrimination n’a pas été immédiatement approprié par les études de genre en France, contrairement à ses usages fréquents aux Etats-Unis. Le colloque se propose d’interroger ces choix épistémologiques et stratégiques en s’interrogeant sur ce que les discriminations font au genre (axe 1).
Réciproquement, les études sur les discriminations portent, entre autres, sur le sexe, mais utilisent-elles vraiment dans leurs travaux le concept de genre ? Il ne s’agit pas seulement de prendre en compte les femmes, mais aussi les hommes – ainsi que les personnes qui ne se reconnaissent pas forcément dans l’une ou l’autre catégorie. La discrimination ne touche pas seulement au sexe, mais aussi au genre, et d’ailleurs pareillement à la sexualité : c’est toujours la question de la norme sexuelle qui est en jeu. La place des rapports de genre et des identités sexuées et sexuelles dans l’analyse des discriminations mérite d’être investiguée pour situer si et comment ces études échappent à la naturalisation produite par les catégories (axe 2).
Ce questionnement vaut également, et plus encore sans doute, pour la « race » qui n’a pas connu de découplage similaire à celui proposé par le genre pour la catégorie du sexe. Les rapports entre genre et « race » sont souvent abordés sous l’angle du cumul ou de l’intersection, ce qui renvoie à la notion de discriminations multiples difficile à acclimater dans le droit de la discrimination. La multiplicité des motifs de la discrimination déborde largement la dyade genre et « race » et s’étend à la religion, l’âge, l’orientation ou identité sexuelle et au handicap, pour n’en citer que quelques uns. Si la loi place ces motifs sur un pied d’égalité, la pratique montre que certains (et pas toujours les mêmes) sont plus identifiés que d’autres, font l’objet d’une plus grande réprobation, sont justiciables d’action de correction, voire de réparation, etc. Par ailleurs, chaque motif s’inscrit dans une historicité qui lui est propre et renvoie à des logiques discriminatoires parfois singulières. Les complémentarités mais aussi les contradictions entre motifs apparaissent clairement en Europe aujourd’hui dans les débats politiques et sociaux et les mobilisations, notamment autour des relations entre égalité des sexes et des orientations et identités sexuelles, immigration et religion. L’articulation entre le genre et les autres dimensions des discriminations sont à reprendre dans le contexte des développements théoriques, politiques et juridiques (axe 3).
Les domaines auxquels ce colloque invite à réfléchir sont nombreux – qu’il s’agisse de l’entreprise, de l’école, du logement, de l’espace et du territoire, ... ou encore du monde politique ou du sport. Ces questions théoriques ont en effet des implications empiriques – dans les pratiques sociales, dans les normes et les lois, mais aussi dans le débat public. En outre, si ces catégories, dont l’histoire intellectuelle est récente, sont prises dans notre monde d’aujourd’hui, il n’en reste pas moins intéressant de les projeter ailleurs, et dans le passé, pour repenser des sociétés qui ne se sont pas pensées en ces termes. Le colloque ne s’arrêtera donc pas aux frontières de la France, ni du présent. Les communications venues de l’étranger seront ainsi les bienvenues dans ce colloque international1. Avec cette distance, temporelle et géographique, il s’agit de montrer combien la distanciation scientifique est aujourd’hui nécessaire, au moment même où les catégories de genre et de discrimination sont mobilisées par les politiques publiques, pour leur redonner leur utilité vivante.
Cet appel à communications invite les générations différentes de chercheuses et de chercheurs de toutes disciplines (des sciences humaines, économiques, historiques, sociales ou juridiques aux sciences de la vie) à confronter leurs approches à l’articulation entre genre et discriminations.
Pour répondre à l’appel à communication, merci de déposer un projet d’au moins une page (en français ou en anglais) à l’adresse ci-dessous avant le 30 janvier 2013 sur le site.
http://economix.fr/colloque-gid.php
Le résultat de la sélection des propositions sera envoyé aux auteur-e-s le 29 mars 2013.
Contact :
colloquegid2012@gmail.com