Editions Septentrion, 204 p., 18 euros. ISBN : 978-2-7574-0078-4
Comment se manifeste l’idéologie sexiste dans le discours des sciences humaines ? Pour répondre à cette question C. Michard et C. Ribéry ont choisi comme terrain d’analyse des textes de deux anthropologues (P. Clastres et M. Godelier) et d’un sociologue (P. Bourdieu). Elles fondent leur recherche sur une théorie linguistique de l’énonciation, exposée de façon concise, et démontrent avec précision le biais sexiste de ces textes, reconnus comme scientifiques, et donc objectifs. L’analyse fine des phénomènes énonciatifs (déterminations aspectuelles, modalisations, réseaux de repérage, etc.) leur permet de mettre en évidence un ensemble d’oppositions formelles, peu étudiées et non perçues. Ces oppositions, qui ne sont pas interprétables en tant que connotations dévalorisantes ou valorisantes, traversent l’ensemble des textes, et leur signification structure l’argumentation théorique : elles constituent par conséquent un élément fondamental dans la construction du sens. Pour conclure, C. Michard et C. Ribéry ancrent leur recherche linguistique dans une théorie sociologique des rapports de pouvoir et de leurs effets idéologiques, et interprètent les dissymétries sémantiques analysées comme l’expression directe, non assertée, de la pensée des sexes dans notre société. Ce document linguistique et sociologique, qui énonce son point de vue féministe, fait preuve d’une rare exigence, tant théorique que méthodologique.