RING


Journées d’études

Mensonge et genre

Avant le 8 mars - Aix-en-Provence


Date de mise en ligne : [05-02-2014]




Pour deux journées d’études

26 et 27 septembre 2014

Université Aix-Marseille, Aix-en-Provence

Argumentaire :

La Journée d’Etudes que nous proposons est le prolongement d’une réflexion sur la notion de mensonge menée par le groupe de recherches ECHANGES (EA 4236) des Départements d’Etudes germaniques et slaves de l’Université d’Aix-Marseille, et du colloque qui s’est tenu en octobre 2013 à Aix-en-Provence (« À la recherche de quelques vérités à propos du mensonge. Réflexions théoriques et études de cas de l’Antiquité à nos jours »). Il s’agit à présent d’interroger les interactions et les liens discursifs entre la sémantique du mensonge et les constructions du masculin et du féminin, afin d’éclairer de nouveaux aspects de la question du mensonge et de celle du genre. Jacques Derrida avait évoqué leur lien brièvement dans Histoire du mensonge : « il y aurait plus d’une conférence à consacrer à ce qui lie l’histoire du mensonge à l’histoire de la différence sexuelle, de son érotique et de ses interprétations ».
Lors du colloque d’octobre 2013, deux interventions ont ouvert la voie à une réflexion dans ce sens. La première, sur le drame bourgeois au XVIIIe siècle, a étudié le cas Minna von Barnhelm, figure rare et étonnante dans le théâtre de Lessing où la ruse féminine est jugée positivement, alors que l’idéologie bourgeoise impose par ailleurs son idéal de véracité et de sincérité à la femme qui doit incarner le « naturel » et être aussi transparente qu’un « livre ouvert » (Emilia Galotti). La seconde, sur Schnitzler et la modernité viennoise, a souligné le retour du topos misogyne de la nature mensongère et hypocrite de la femme à une époque où le mensonge est réhabilité (réception de Nietzsche et d’Ibsen) et où l’ordre des identités sexuées est troublé.
Dans le cadre de cette Journée d’Etudes, il serait intéressant de nous arrêter sur quelques moments clés dans l’histoire du mensonge. On pourrait interroger le fait que la figure originelle de la ruse intelligente et efficace est un homme (Ulysse) ; se pencher sur la christianisation du concept (St Augustin, Thomas d’Aquin, Luther) où le mensonge tout comme la femme devient synonyme de péché, figure d’une duplicité diabolique ; approfondir la réflexion sur l’impact (répressif ?) des discours normatifs, notamment ceux du XVIIIe siècle, qui ont largement consacré la différence sexuelle comme opposition hiérarchisante entre corps/esprit, beauté/force, nature/culture (vérité ou véracité/mensonge ?) ; étudier, dans les textes qui condamnent le mensonge moralement, le lien discursif avec les représentations du masculin et/ou du féminin. L’on pourrait s’intéresser à l’hystérique, cette « grande simulatrice » (Charcot), ou comparer cette figure de la menteuse pathologique avec la sémantique à l’œuvre dans les cas d’hystérie masculine. Le début des modernités, tout particulièrement à Vienne autour de 1900 où l’inflation du mensonge et la question sexuelle préoccupent les esprits, serait à prendre en considération. Plus près de nous, on aura de nombreux exemples, notamment dans le champ de la littérature et des arts, où est mise en scène, souvent de façon ludique voire parodique, notre capacité à simuler ce que nous croyons être féminin ou masculin, et aussi à simuler une norme, ce que Judith Butler, dans sa relecture de Lacan, appelle la « comédie hétérosexuelle ».
Partant de la thèse de Jankélévitch, pour qui l’intention du menteur n’est pas tant de mentir mais « d’agrandir l’espace vital de son égo », on peut émettre l’hypothèse que le mensonge n’est pas seulement un stratagème pour des êtres particulièrement vaniteux, mais aussi pour ceux dont l’ego est fortement menacé. Que femmes ou hommes, marginalisé-e-s dans l’espace public ou l’ordre symbolique pour des raisons culturelles ou d’orientation sexuelle, utilisent ce stratagème n’est guère surprenant. Selon Jankélévitch, la ruse est l’arme des faibles, « le menteur [….] simule et dissimule afin d’obtenir, en trichant, de petites rectifications de frontière. » Une attention particulière sera ainsi accordée aux rapports entre mensonge et pouvoir, à la mise en lumière du caractère construit de ce qui s’avance comme discours essentialiste sur le menteur ou la menteuse. On pourrait retracer l’histoire du topos de la nature mensongère de la femme ou de la ruse féminine ; établir une typologie du menteur / de la menteuse en fonction des différentes époques ou médias ; comparer des figures de l’imposteur masculin (au sens de « Hochstapler ») avec son binôme féminin pour lequel le français n’a pas d’équivalent linguistique satisfaisant ; interroger les rapports entre le « mensonge genré » et l’image. Est-ce que le corps peut mentir ? Comment, dans le champ de la danse ou du cinéma par exemple, traite-t-on ce thème ?
Ces pistes de réflexions ne sont aucunement restrictives. Les réflexions théoriques seront les bienvenues, notamment dans le champ des gender studies, mais aussi les études de cas relevant de la littérature, de la philosophie, de la civilisation, des arts, de la linguistique et des sciences de la culture (Kulturwissenschaften).
Les Journées d’Etudes auront lieu les 26 et 27 septembre 2014 à Aix-en-Provence. Une publication est prévue dans les Cahiers d’Etudes germaniques au printemps 2015 (deuxième volume consacré à la notion de mensonge), sous réserve de l’accord du Comité de rédaction. Pour des raisons tenant au calendrier éditorial, il sera nécessaire de livrer le manuscrit fin septembre 2014.
Les contributions peuvent être rédigées en français ou en allemand. Merci d’adresser votre proposition avec résumé (environ 2000-3000 caractères), au plus tard le 8 mars 2014, à l’adresse suivante :
susanne.bohmisch@univ-amu.fr

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