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Deleuze / Foucault - Le Pouvoir cours 18 - 08/04/1986 - 1 Cours du 8 avril 1986 Gilles Deleuze aut participant RequestDigital 32 min 18 sec

Ce que... ce que nous avions essayé de débrouiller..., ce que nous avions essayé de débrouiller c’était, encore une fois, sur une très courte période - une fois dit que Foucault ne considère que de courtes périodes historiques - sur une très courte période, la succession de trois formes. La forme « Dieu » correspondant à l’âge classique, la forme « homme » correspondant fin XVIIIème - XIXème, et une forme que, par commodité et en raison des allusions de Foucault, nous nommions, en référence à Nietzsche, la forme « surhomme » ou la forme d’un avenir prochain. Et vous vous rappelez tout notre thème, c’est que, pour une fois, cette histoire du surhomme, c’est pas du tout ni aussi grotesque, ni aussi compliqué qu’on le présente, que ça veut dire quelque chose de très très précis. A savoir que, de toute manière, les formes Dieu, l’homme, le surhomme etc. sont l’expression de rapports de forces déterminables. Quand les forces...

Si bien que notre titre général aurait pu être : quand les forces dans l’homme entrent en rapport... trois petit points. « Trois petits points » parce que les trois petits points vont avoir une variable. Quand les forces de l’homme, dans l’homme entrent en rapport avec des forces venues du dehors, suivant la nature des forces du dehors, le composé des forces sera la forme « Dieu ». Le composé des forces étant toujours une forme. Le composé des forces sera, dans un cas, la forme « Dieu », dans un autre cas la forme « homme », dans un autre cas ce qu’on peut appeler la forme « surhomme ». Et la dernière fois on avait beaucoup... on avait essayé de préciser cette forme « surhomme » comme forme de l’avenir et l’on était arrivé à l’idée que la forme « surhomme » découlait d’un rapport de forces qui était lequel ? Lorsque les forces dans l’homme - vous voyez, c’est pas un monstre le surhomme - lorsque les forces dans l’homme libèrent dans l’homme même un être de la vie, un être du langage, un être du travail. Donc je ne reviens pas là-dessus, on avait essayé de dire en quoi un être du travail... d’une certaine manière c’était le silicium..., un être du langage, d’une certaine manière c’était ce que nous appelons « littérature » au sens moderne du mot « littérature »... un être de la vie, c’était, d’une certaine manière ce qu’on appelait le code génétique avec une toute nouvelle conception de la biologie et de la vie elle-même. Bon. Alors, ça, on se l’accorde à moins qu’il y ait lieu de revenir sur des points, c’est vous qui me dites, je veux bien... je suis tout prêt... euh... il n’y a pas lieu de revenir....

Je signale que la lettre de... j’avais fait allusion très rapidement à un texte de Rimbaud, un grand texte de Rimbaud qui, d’une certaine manière, coïncide fort avec les grands textes de Nietzsche à cet égard, lorsque Rimbaud esquisse l’homme de l’avenir, dans la grand lettre à Demeny, dite et ordinairement appelée la lettre du voyant, c’est un beau mot, « voyant »... La lettre du voyant nous dit quoi ? Il y a un paragraphe, vous le trouverez, par exemple dans n’importe quelle édition des lettres de Rimbaud, il y a un paragraphe qui m’intéresse particulièrement puisque le paragraphe de Rimbaud développe trois idées, trois points. Il nous dit que cet homme de l’avenir c’est l’homme, exactement comme je dis... que ce soit même pour le surhomme, il s’agit des forces dans l’homme et à quelle puissance les forces dans l’homme peuvent-elles être élevées ? Comprenez, ça veut dire : la forme homme n’épuise pas les forces dans l’homme. La forme homme correspond uniquement à un certain degré de puissance des forces dans l’homme. Si, pour des raisons quelconques, les forces dans l’homme atteignent un autre degré de puissance, vous aurez une autre forme que la forme « homme ». C’est pas compliqué tout ça, ça me paraît très très simple, très clair, cette histoire de surhomme. Euh, c’est pas du tout, c’est violemment poétique, mais c’est également un concept très rigoureux, très précis, tout ça ça va ensemble. Je dis, dans la lettre du voyant, le paragraphe auquel je pense, vous le trouverez facilement, est vraiment construit sur trois points, l’homme de l’avenir est présenté comme, je vous le disais, là c’est l’expression même de Rimbaud, « chargé des animaux mêmes ». Il est chargé des animaux mêmes. Ça, c’est le premier point. Je dirais : c’est l’homme en tant qu’il libère en lui un être de la vie.

Deuxième point : il est chargé de l’informe, dit Rimbaud, c’est-à-dire il est chargé de l’inorganique, c’est ce que j’appelais, pour commodité, la revanche du silicium sur le carbone. Il est chargé des rochers mêmes. Le rocher, c’est là où règne le silicium, c’est le règne de l’inorganique. Et voilà, je vous disais que, dans des conditions que ni Rimbaud, ni Nietzsche ne pouvaient prévoir, c’est vrai que tout ce qu’on nous raconte aujourd’hui sur les machines de troisième espèce, admirez que ce soit la revanche du silicium par rapport au carbone organique. Et moi ça m’intéresse beaucoup, si bien que, une année ou une autre, même cette année, peut-être, il faudrait qu’on fasse une séance sur les rapports silicium-carbone, car je vous rappelle que, en effet, il y a très longtemps que les biologistes les plus intéressants, ou les cosmobiologistes, posent la question : mais pourquoi la vie est-elle passée par le carbone ? Pourquoi pas autre chose ? C’est un problème passionnant pour la chimie ça. Vous feriez de la chimie, c’est ça qui vous intéresserait peut-être, et pourquoi le carbone ? Euh, c’est là ou, si vous voulez, la philosophie rejoint la science. La question « pourquoi », quand on dit qu’il n’y a pas de pourquoi, c’est pas vrai. Et pourquoi ? Pourquoi ? Ben, c’est un problème de la raison suffisante. Pourquoi la vie est-elle passée par le carbone plutôt que par autre chose, ça ne pouvait pas marcher autrement, ça met en jeu toutes sortes de questions, la contingence de la vie... Pourquoi ce matériau-là ?

Et [ ?] on peut toujours, mais vous savez c’est compliqué, si on nous dit, par exemple, on nous dit : le silicium, les chaînes de silicium, elles auraient pas été stable. C’est [ ?] aller y voir, ça dépend dans quelles conditions, qu’est-ce qui définit la stabilité d’une chaîne ? Bon, mais aujourd’hui c’est formidable parce que... vous voyez comment on pourrait poser le problème des rapports vie-machines... Notamment au niveau des machines modernes, c’est que ce qu’on appelle les puces, qui sont l’élément fondamental des machines de troisième espèce, eh ben les puces c’est du silicium. Les machines de troisième espèce, elles représentent une véritable revanche du silicium sur le carbone. Là c’est le silicium qui présente des avantages incontestables. On pourrait concevoir des machines de troisième espèce sur le carbone. Bien plus, bien plus : on nous l’annonce déjà, car les ordinateurs futurs, les machines de l’avenir à venir, elles reviendront au carbone. On nous dit bien que les vrais robots ce seront des robots organiques. Il va y avoir... c’est comme un détour, vous avez... ce serait très beau comme figure, là, nous sommes en pleine, en pleine prophétie. Vous voyez ? Vous avez les machines de troisième espèce, les machines modernes qui représentent... fondées sur le silicium, elles représentent la grande revanche du silicium. Il y a une guerre des éléments chimiques, hein. Le carbone a tout étouffé au niveau d’une chimie organique. Tout est passé par le carbone, mais les autres éléments protestent. Protestation des autres éléments. Il y a le vagissement des autres éléments, là, dans la nuit du monde et puis... Revanche, revanche du silicium, par l’intermédiaire de notre technologie. Le robot, bon, la machine à feed-back, l’ordinateur, tout ça, c’est la revanche du silicium. Et puis, on nous annonce que les vrais robots de l’avenir, ce sera un retour au carbone, ce sera des robots organisés. Bon, bien.

Et tout ça pour dire : c’est le règne de l’informe, c’est la promotion de l’informe, c’est l’homme qui libère les forces de l’informe, les forces du silicium. Ben, le surhomme, c’est aussi compliqué que ça [ ?] et ne me dites pas que, là, je réduis ça à du scientisme, l’histoire du surhomme... Non ! Parce que le rapport avec le silicium, il s’incarne dans certaines technologies, mais il déborde beaucoup la technologie. Les histoires de l’utilisation du silicium etc., ça déborde infiniment la science puisque ça animera des formes d’art, ça animera tout ce que vous voulez, ça met en jeu l’ensemble d’une condition humaine, ou post-humaine, suprahumaine ou surhumaine... tout ce que vous voulez. Donc ça m’intéresse beaucoup qu’après avoir dit « l’homme chargé des animaux même », Rimbaud ajoute « l’homme chargé de l’informe », et je crois qu’il faut traduire « informe » à la lettre, inorganique : le rocher.

Et il ajoute, enfin, « chargé de la langue », « chargé de la langue ». Il dit : un nouveau langage universel. Pourquoi il dit « un nouveau langage universel » ? Parce que c’est pas un retour au langage universel du XVIIème siècle. Un nouveau langage universel qui serait quoi ? Il précise : l’âme sur l’âme. « l’âme sur l’âme » c’est curieux parce que c’est une expression tellement, tellement voisine de celle que Artaud emploiera, un langage qui va de l’âme à l’âme, et dont on a vu - je reviens pas là-dessus- d’une certaine manière, qu’il pourrait définir la littérature moderne. Bien. Et pour grouper les trois notions « chargé des animaux mêmes », « chargé de l’informe » et « chargé de la nouvelle langue », Rimbaud a une expression admirable : la pensé accrochant la pensée et tirant, ce serait la formule d’une espèce de croc de la pensée. C’est beau « la pensée accrochant la pensée et tirant », le crocheteur de la pensée. Hein. Le surhomme comme crocheteur de la pensée a trois bras : l’informe ou l’être du travail, la littérature ou l’être du langage, les animaux mêmes ou l’être de la vie. Reportez-vous à la lettre de Rimbaud. Alors on en était là. Pas de question ? Tout est limpide ? Tout va bien ? Bon. Alors continuons.

Je me dis : on a été comme trop loin, en effet, vous comprenez. Alors il faut revenir à des choses plus modestes, hein, avant d’en finir avec tout ça. Et je voudrais dire : eh ben, soyons plus modestes, on se rabat sur un domaine moins lyrique, moins... on va se rabattre parce qu’il me semble que ça existe chez Foucault aussi et qu’on va trouver, décalée, une analyse semblable au niveau de ce qu’on pourrait appeler « trois formations juridiques ». Et c’est ça qui m’intéresse aujourd’hui. Trois formations juridiques où, peut-être, on pourrait découvrir la succession des trois formes sous un autre aspect : forme « Dieu », forme « homme », forme d’un quelque chose à venir. Ce serait comme trois états du droit. Alors, c’est là-dessus, c’est ça qui... Oui ? Question dans l’assistance : ?

Deleuze : la première question, je comprends. Pour moi... euh. La seconde question, elle est pas très claire pour moi. Euh. Redis la seconde question...

Etudiant : inaudible

Deleuze : mmh, non. Non, mais c’est intéressant. Oui, ça peut se dire, ça peut se dire comme ça. Bon, alors la première question, c’était ? Ça c’était la seconde question, et la première question, c’était ?

Etudiant : ?

Deleuze : tu dis, à juste titre : toute époque, quelle qu’elle soit, a un certain concept d’homme. Oui, c’est sûr, en revanche, ça ne veut pas dire que l’on pense en rapportant l’ensemble des concepts à la forme « homme ». On distinguera donc le concept et la forme en disant, je suppose : des concepts, vous en avez toujours, à chaque époque, vous avez par exemple un concept d’homme, un concept d’animal, etc., mais la forme c’est ce à quoi l’ensemble des concepts se rapportent comme à leur condition pour être pensés. D’accord ?

Donc à chaque époque, il y a un concept d’homme, par exemple chez les grecs, vous trouvez plusieurs, même, concepts d’homme, par exemple l’homme animal raisonnable, l’homme animal politique etc. Je remarque que - je vais très vite - le XVIIème siècle, l’âge classique, rompt avec ce type de concept d’homme, il prétend y substituer un autre type de concepts. Par exemple Descartes se refuse explicitement à définir l’homme comme animal raisonnable. C’est d’ailleurs ce qui est très intéressant chez Descartes, il dit : ça ne veut rien dire un animal raisonnable parce qu’il faudrait déjà savoir ce que veut dire animal et ce que veut dire raisonnable. Donc, pas moyen, c’est se donner trop de présuppositions, il faut définir l’homme autrement. Alors, ça, qu’il y ait des concepts d’homme qui changent, pas de problème. Bien.

Mais, je dis : à l’âge classique, le concept d’homme, quel qu’il soit se rapporte à une forme qui, nécessairement, ne peut pas être la forme « homme », c’est-à-dire la forme qui permet de penser les concepts ne peut pas être la forme « homme ». La forme qui permet de penser les concepts, c’est la forme « Dieu ». Mais c’est pas simplement..., si tu veux, ce que tu ajoutes est trop abstrait. Toi tu dis, c’est vrai, c’est la forme « Dieu » qui permet de penser les concepts à l’âge classique, parce que la connaissance a pour modèle les choses telles qu’elles sont connues par Dieu. C’est pas faux. C’est pas faux, mais c’est abstrait. Ça ne rend pas compte de ce qu’il y a de vivant dans une pensée ou dans un cercle. Je crois qu’on pourrait assigner en fait une raison plus profonde dont la tienne ne ferait que découler. Cette raison plus profonde c’est celle-ci : c’est même pas que l’âge classique pense à partir de l’infini. Car, penser à partir de l’infini, on pourrait dire que la théologie du moyen-âge l’a déjà fait. Ce qui fait vraiment quelque chose de nouveau à l’âge classique, là je crois que ce qui fait que les classiques sont incomparables, c’est qu’ils se lancent dans une tentative qui, réellement, leur appartient. C’est pas tant penser l’infini ou à partir de l’infini, c’est ce qui est assez différent, distinguer ... parce qu’encore une fois penser l’infini à partir de l’infini... vous pouvez le dire, mais c’est déjà du... c’est déjà Saint Thomas, euh... ou c’est déjà beaucoup de courants du Moyen-âge.

Ce qui me paraît incomparable..., là je parle un peu pour mon compte, parce que c’est pas l’aspect qui intéresse Foucault. Mais je me dis : raison de plus, ça lui donne raison de toute façon, c’est une tentative très très bizarre ça, c’est que le XVIIème siècle ne cesse pas de distinguer des ordres d’infini, c’est ça qui est [ ?]. Et pensez que c’était très original, à première vue, quand on a dit l’infini, on a dit l’infini, voilà, c’est pas facile mais... qu’il y ait des ordres d’infinité distincts et comment se débrouiller dans des ordres d’infini. Je dirais que pour un homme classique, tout est infini, mais tout n’est pas infini au même sens et de la même façon. C’est une besogne un peu folle, mettre de l’ordre dans l’infini. C’est pour ça que je vous disais, pour moi, les grands textes XVIIème siècle, ceux qui sont signés XVIIème siècle - et c’est par là qu’ils restent éternellement modernes - c’est ceux qui essaient de distinguer des ordres d’infini : ah, ne confondez pas cet infini-ci et cet infini-là. Et ils mobilisent tout, ils mobilisent la théologie, les mathématiques, la physique, tout, tout, les sciences, les arts, pour introduire un ordre dans les infinis. Distinguer des ordres d’infini. Et toute l’angoisse du XVIIème siècle, c’est, c’est pas simplement la peur de se perdre dans l’infini. L’angoisse du XVIIème siècle, c’est la peur d’être submergés par des infinis dans lesquels on pourrait pas mettre d’ordre. Alors, bon.

Du coup. Voyez bien que la situation de l’homme, au XVIIème siècle, c’est, je vous le disais, l’homme a perdu tout centre et on le voit très bien chez Pascal. Si, chez Pascal ça apparaît particulièrement, c’est en vertu du génie pascalien, mais chez tous c’est ça. On n’a plus de centre. Tout le début de Descartes, tout le début des Méditations de Descartes c’est : mais où est- ce que je vais trouver un centre ? Alors, ils vont pouvoir le trouver que dans la mesure où ils ordonnent des infinis. S’il y a un ordre dans les infinis, un infini premier, un infini second, un infini troisième etc., peut-être qu’on va pouvoir s’y reconnaître et reconnaître l’homme, dans tous ces infinis. Si bien que l’homme sera pensé, mais il sera pensé évidemment dans son rapport avec les infinis, c’est-à-dire en rapport avec la forme « Dieu », puisque tous les ordres d’infini doivent bien découler de la forme « Dieu ». Tous les ordres d’infini découlent diversement de la forme « Dieu ». Par exemple, l’infini du monde, c’est évident que l’infini du monde, il n’existerait pas, il ne serait si le monde n’avait pas été créé par Dieu. C’est donc un infini défait. Tandis que l’infinité de Dieu lui-même, c’est un infini par soi. Dieu est infini par soi, tandis que le monde est infini par sa cause (qui est Dieu), c’est pas le même infini, c’est déjà deux ordres d’infini. Alors quelle est la situation de l’homme [ ?] ? L’homme, il est dans le monde, il participe à l’infini du monde, mais il est à l’image de Dieu. Il va falloir trouver la place de l’homme dans ces ordres d’infini. Et penser l’homme ce sera : assigner la ou les places qu’il a en fonction de la forme « Dieu ».

Si bien que, ce qui est pensé, c’est, en effet, la forme « Dieu ». Il n’y a pas de forme « homme ». Il n’y a pas de forme « homme », pourquoi ? Pour la simple raison que la forme « homme », c’est uniquement la limitation à certains égards de la forme « Dieu ». Il faut simplement dire... pour avoir la forme « homme », il suffit de dire : quels aspects de Dieu se trouvent limités pour constituer la forme « homme ». La réponse de Descartes est célèbre : les forces dans l’homme, c’est l’entendement et la volonté. Et la réponse étonnante de Descartes c’est : la volonté dans l’homme est infinie, autant qu’en Dieu. Donc, au niveau de la volonté, il n’y a pas de différence. La volonté ne supporte pas la finitude, très bizarrement, chez Descartes. Peu importe pourquoi, mais... En revanche l’homme n’a qu’un entendement fini. Dieu a un entendement infini. En d’autres termes l’homme se définira par l’entendement fini, l’entendement fini étant une simple limitation de l’entendement infini. Dès lors, ce qui est pensé, c’est la forme « Dieu », l’entendement infini. Alors au niveau de l’entendement infini, t’as raison : c’est là qu’apparaît le problème « connaître les choses telles qu’elles sont ». Voilà pour la première question, il me semble.

La seconde question, qu’est-ce qui se passe ? Au niveau, là, de la découverte de la finitude qui va être la condition de constitution d’une forme « homme ». Vous voyez : la forme « homme », ça s’enchaîne très bien. Elle surgit quand ? À partir du moment où le fini n’est plus appréhendé comme une simple limitation de l’infini, mais saisi comme une force positive en elle-même, ou une force d’opposition. Or, pour le XVIIème siècle, c’est vrai que le fini est limitation et non pas opposition. Le fini est une limitation de l’infini, il ne s’oppose pas à l’infini. Pour que la forme « homme » surgisse et destitue la forme « Dieu », il faut que la finitude soit saisie comme force positive, comme force positive irréductible à une simple limitation.

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