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11- 10/03/81 - 1

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GILLES DELEUZE Cours du 10/03/81 (11A) transcription : laurence Ponsard

Cette semaine et l’autre semaine je parle encore de Spinoza et puis, c’est fini... A moins que vous ayez des questions a poser, ce que je voudrais beaucoup.

Alors voilà. Moi mon rêve ça serait que, soit très clair pour vous, cette conception de l’individualité telle que, on essayait de la dégager dans la philosophie de Spinoza. Parce que finalement, il me semble que c’est un des éléments les plus nouveaux du spinozisme. C’est cette manière dont, l’individu comme tel, va être porté, rapporté, reporté dans l’Etre. Et, pour essayer de faire comprendre cette conception de l’individualité qui me semble si nouvelle chez Spinoza, je reviens toujours au thème : c’est comme si un individu, un individu quelconque, avait trois couches. Comme s’il était composé là de trois couches. Et, je dis, on avait avancé au moins dans la première dimension, dans la première couche de l’individu, tout individu a une infinité de parties extensibles.

-  C’est ça le premier point. Une infinité de parties extensibles en d’autres termes il n’y a d’individu que composé. Un individu simple je crois que pour Spinoza c’est une notion dénuée de sens. Tout individu comme tel est composé d’une infinité de parties. Alors si j’essaie de résumer très vite, parce que c’est là encore une fois où l’on avait un peu avancé, si j’essaie de résumer très vite : qu’est ce que ça veut dire, cette idée que l’individu est composé d’une infinité de parties ? Qu’est ce que c’est ces parties ? Encore une fois c’est ce que Spinoza appelle les corps les plus simples. Tout corps est composé d’une infinité de corps très simples. Mais qu’est ce que c’est des corps très simples ? On était arrivé à un statut assez précis : ce ne sont pas des atomes, c’est-à-dire des corps finis et ce ne sont pas non plus des indéfinis. C’est quoi ? Et là Spinoza appartient au XVIIème siècle.

-  Encore une fois moi ce qui me paraît vraiment frappant, en tout cas ce qui me frappe vraiment quant à la pensée du XVIIème siècle, c’est l’impossibilité de saisir cette pensée si l’on ne tient pas compte, d’une des notions les plus riches à cette époque, qui est une notion à la fois métaphysique, physique, mathématique etc. la notion d’infini actuel. Or l’infini actuel, ce n’est ni du fini, ni de l’indéfini. Le fini ça signifie, avant tout, si vous voulez cela renvoie à, si je cherche la formule du fini c’est : il y a un moment où vous devez vous arrêter. C’est-à-dire lorsque vous analysez quelque chose il y aura toujours un moment où il faudra vous arrêter. Mais dont et pendant longtemps, ce moment du fini, ce moment fondamental du fini qui marque la nécessité de s’arrêter à, des termes finis, c’est tout ce qui a inspiré l’atomisme depuis Epicure, depuis Lucrèce. L’analyse rencontre une limite, cette limite c’est l’atome. Et l’atome est justiciable d’une analyse finie. L’indéfini c’est si loin que vous alliez, vous ne pourrez pas vous arrêter. C’est à dire si loin que vous portiez l’analyse, le terme auquel vous arriverez, pourra toujours être à son tour, divisé et analysé. Donc, il n’y aura jamais de dernier terme. Le point de vue de l’infini actuel il me semble dont on a perdu complètement le sens. Et on a perdu le sens, on a perdu ce sens là, pour mille raisons je suppose, entre autres pour des raisons scientifiques pour, tout ça.

-  Mais moi ce qui m’importe ce n’est pas pourquoi on a perdu ce sens, c’est comme si j’arrivais à le, un peu le restituer devant vous, pour que vous compreniez la manière dont ces penseurs pensaient .... C’est fondamental dans leur pensée. Encore une fois si je considère que Pascal écrit des textes très représentatifs du XVIIème siècle, c’est essentiellement les textes sur, l’ Homme par rapport à l’infini. C’est les gens qui pensent vraiment naturellement, philosophiquement, en terme d’infini actuel. Or cette idée d’un infini actuel, c’est-à-dire ni fini, indéfini, ça revient à nous dire quoi ?

-  Ca revient à nous dire : il y a des derniers termes, il y a des termes ultimes (voyez ça c’est contre l’indéfini : ce n’est pas de l’indéfini puisqu’il y a des termes ultimes), seulement ces termes ultimes ils sont à l’infini. Donc ce n’est pas de l’atome. Ce n’est ni du fini, ni de l’indéfini. L’infini est actuel, l’infini est en actes. En effet, l’indéfini c’est si vous voulez de l’infini mais virtuel, à savoir vous pouvez toujours aller plus loin. Là c’est pas ça. Ils nous disent il y a des termes derniers, les corps les plus simples pour Spinoza. C’est bien des termes ultimes, c’est bien des termes qui sont les derniers, que vous ne pouvez plus diviser. Seulement ces termes ce sont des infiniment petits. Ce sont des infiniment petits. C’est ça l’infini actuel.

-  Voyez que c’est une lutte contre deux fronts, à la fois contre le finitisme et contre l’indéfini. Qu’est ce ça veut dire ? Il y a des termes ultimes, mais ce ne sont pas des atomes puisque ce sont des infiniment petits, ou comme on dit, ou comme Newton dira, ce sont des évanouissants. Des termes évanouissants, en d’autre terme plus petits que toute quantité donnée. Qu’est ce que ça implique ça ? Mais des termes infiniment petits, vous ne pouvez pas les traiter un par un. Là aussi c’est un non sens. Parler d’un terme infiniment petit que je considérerai singulièrement ça n’a aucun sens. Les infiniment petits ne peuvent aller que par collection infinie. Donc il y a des collections infinies d’infiniment petits. Les corps simples de Spinoza, ils n’existent pas un par un. Ils existent collectivement, non pas distributivement. Ils existent par ensemble infini et je ne peux pas parler d’un corps simple, je ne peux parler que d’un ensemble infini de corps simples. Si bien qu’un individu n’est pas un corps simple, un individu quel qu’il soit, et si petit soit il, un individu a une infinité de corps simples. Un individu a une collection infinie d’infiniment petits.

-  Bon, c’est pourquoi, malgré toute la force du commentaire de Guérou sur Spinoza, je peux pas comprendre comment Guérou pose la question de savoir si les corps simples de Spinoza n’auraient pas une figure et une grandeur. C’est évident que si les corps simples sont des infiniment petits, c’est-à-dire, des quantités dites évanouissantes, ils n’ont ni figure ni grandeur pour une simple raison : c’est que ça n’a pas de sens. Un infiniment petit n’a ni figure ni grandeur, un atome oui, a une figure et une grandeur. Mais un terme infiniment petit par définition ne peut avoir, ni figure ni grandeur. Il est plus petit que toute grandeur donnée. Alors qu’est ce qui a figure et grandeur ?

-  Ce qui a figure et grandeur et là la réponse devient très simple, ce qui a figure et grandeur, c’est une collection, c’est une collection elle-même infinie d’infiniment petits, ça oui ! La collection infinie d’infiniment petits, elle a figure et grandeur. Si bien qu’on bute sur ce problème...oui mais d’où elle vient cette figure et cette grandeur ? Je veux dire si les corps simples sont tous des infiniment petits, qu’est ce qui permet de distinguer telles collections infinies d’infiniment petits et telles autre collections infinies d’infiniment petits ? Du point de vue de l’infini actuel comment est-ce qu’on peut faire des distinctions entre les infinis actuels ? Ou bien alors est-ce qu’il y a une seule collection, une seule collection de tous les infinis possible ? Or Spinoza est très ferme là, il nous dit : à chaque individu correspond une collection infini de corps très simples. Chaque individu est composé d’une infinité de corps très simples. Il faut donc que j’ai le moyen de reconnaître la collection d’infiniment petits qui correspond à tel individu et celle qui correspond à tel autre individu.

-  Comment ça se fera ? Avant d’en arriver à cette question, essayons de voir comment sont ces infiniment petits. Ils entrent donc dans des collections infinies et je crois que là le XVIIème siècle a tenu quelque chose que les mathématiques avec de tout autres moyens, de tout autres procédés (et je ne veux pas faire de rapprochements arbitraires) mais que les mathématiques modernes redécouvriront, avec de tout autres procédés, à savoir une théorie des ensembles infinis.
-  Les infiniment petits entrent dans des ensembles infinis et ces ensembles infinis ne se valent pas, c’est-à-dire qu’il y a des distinctions entre ensembles infinis. Et que ce soit Leibniz, que ce soit Spinoza, toute cette seconde moitié du XVIIème siècle est pénétrée de cette idée de l’infini actuel. L’infini actuel qui consiste en ces ensembles infinis d’infiniment petits. Mais alors, ces termes évanouissants, ces termes infiniment petits, quelles sont leurs preuves ? Comment ils sont ? Qu’est ce que, essayons, je sais pas, je voudrais que, ça prenne une figure un peu concrète tout ça.

-  C’est évident qu’ils ont pas d’intériorité. Des termes infiniment petits alors bon...j’essaie de dire ce qu’ils ne sont pas d’abord avant de dire ce qu’ils sont. Ils ont aucune intériorité. Ils entrent dans des ensemble infinis, l’ensemble infini peut avoir une intériorité, mais ces termes extrêmes, infiniment petits, évanouissants, ils ont aucune intériorité. Ils vont constituer quoi ? Ils vont constituer une véritable matière d’extériorité. Ils n’ont les uns avec les autres, les corps simples n’ont les uns avec les autres que des rapports strictement extrinsèques, des rapports d’extériorité. Ils forment une espèce de matière que, on appellera, en suivant la terminologie de Spinoza, une matière modale, une matière modale de pure extériorité, c’est-à-dire ils réagissent les uns sur les autres, ils ont pas d’intériorité, ils n’ont que des rapports extérieurs les uns avec les autres.

-  Mais alors, je reviens toujours à ma question donc, s’ils montrent que des rapports d’extériorité, qu’est ce qui permet de distinguer un ensemble infini d’un autre ? Encore une fois tous les individus, chaque individu (là je peux dire chaque individu puisque l’individu c’est pas, le corps très simple), chaque individu distributivement, a un ensemble infini de parties infiniment petites. Bon, ces parties elles sont actuellement données. Mais qu’est ce qui distingue l’ensemble, mon ensemble infini, l’ensemble infini qui me revient et l’ensemble infini qui revient au voisin ? D’où, et déjà on entame alors comme la seconde couche de l’individualité, ça revient à demander : sous quel aspect un ensemble infini de corps très simples, appartiennent à tel ou tel individu ? Sous quel aspect ? C’est entendu, j’ai un ensemble infini là de parties infiniment petites. Mais sous quel aspect, est ce que cet ensemble infini m’appartient ? Voyez que j’ai juste à peine transformé la question parce que lorsque je demande : sous quel aspect, l’ensemble infini m’appartient t’il ? C’est une autre manière de demander : qu’est ce qui va me permettre de distinguer tel ensemble infini de tel autre ensemble infini ? Encore une fois à première vue dans l’infini tout devrait se confondre, ça devrait être la nuit noire ou la lumière blanche. Qu’est ce qui fait que je peux distinguer des infinis les uns des autres ? Dans le fond quel aspect un ensemble infini est il dit m’appartenir ou appartenir à quelqu’un d’autre ?

-  La réponse c’est, un ensemble infini, la réponse de Spinoza me semble être, un ensemble infini, de parties infiniment petites, m’appartient à moi et pas à l’autre, dans la mesure où, cet ensemble infini effectue un certain rapport. C’est toujours sous un rapport, que les parties m’appartiennent. Au point que si les parties qui me composent prennent un autre rapport, à ce moment là ils m’appartiennent plus, elles appartiennent à une autre individualité, elles appartiennent à un autre corps. D’où la question quel est ce rapport ? Sous quel rapport des éléments infiniment petits peuvent t’ils être dit appartenir à quelque chose ? Et si je réponds à la question, là j’ai vraiment la, j’ai vraiment la réponse que je cherchais. Je veux dire j’aurais montré comment, à quelle condition, un ensemble infini peut être dit appartenir à une individualité fini. Sous quel rapport des infiniment petits peuvent appartenir à une individualité finie ?

-  Bon, la réponse de Spinoza si je reste à la lettre de Spinoza, c’est sous un certain rapport de mouvement et de repos. Seulement on en était toujours là : rapport de mouvement et de repos, nous savons que ça ne veut pas du tout dire (et que là on aurait tort de lire trop vite le texte), ça ne veut pas du tout dire comme chez Descartes, une somme (ça on l’a vu). Le rapport de mouvement et de repos ça peut pas être la formule cartésienne mv (masse, vitesse). Sinon il dirait pas « rapport ».Ce qui définit l’individu c’est donc, un rapport de mouvement de et de repos parce que c’est sous ce rapport que, une infinité de parties infiniment petites appartiennent, à l’individu. Si bien que : qu’est ce que c’est que ce rapport de mouvement et de repos qui invoque tellement, Spinoza ? Et là je recommence une confrontation avec le commentaire de Guérou. Guérou fait une hypothèse extrêmement intéressante.

-  Mais là aussi je ne comprends pas pourquoi. Je comprends pas pourquoi il fait cette hypothèse là, mais elle est très intéressante. Il dit finalement le rapport de mouvement et de repos, c’est une vibration. Il faut dire à la fois c’est une réponse là qui me paraît très curieuse parce que évidemment il faut que la réponse soit très précise. C’est une vibration. Ca veut dire quoi ? Ca voudrait dire ce qui définit l’individu, au niveau de sa seconde couche, à savoir le rapport sous lequel des parties lui appartiennent, des parties infiniment petites lui appartiennent, c’est une façon de vibrer. Chaque individu (tient ça serai bien, on peut se dire là ça devient concret), ce qui vous définirait, vous, moi, c’est qu’on aurait une espèce de manière de vibrer. Pourquoi pas ? Pourquoi pas ? Qu’est ce ça veut dire ça ? Ou bien c’est une métaphore, ou bien ça veut dire quelque chose. Qu’est ce qu’une vibration ? Une vibration ça renvoie à quoi en physique ? Ca renvoie au plus simple, à un phénomène bien connu qui est celui des pendules. Tiens, là l’hypothèse de Guérou semble prendre un sens assez, très intéressant parce que, la physique, au XVIIème siècle, a beaucoup avancé l’étude des corps tournants et des pendules. Et notamment, a fondé une distinction entre les pendules simples et les pendules composés.

-  Alors bon, à ce moment là vous voyez que l’hypothèse de Guérou deviendrait celle-ci : chaque corps simples est un pendule simple, et l’individu qui a une infinité de corps simples, c’est un pendule composé. On serait tous des pendules composés (c’est bien ça), ou des disques tournants. C’est une conception intéressante de chacun de nous. Qu’est ce ça veut dire ça ?

-  Et bien en effet, un pendule simple il se définit par quoi ? Il se définit, si vous vous rappelez vaguement des souvenirs de physiques mais de physique très simple, il se définit d’une certaine manière par un temps, un temps de vibration, un temps d’oscillation. Il y a la fameuse formule, pour ceux qui s’en rappelle, il y a la formule petit t= pi racine de l sur g ; petit t, c’est la durée de l’oscillation ; l, c’est la longueur du fil, auquel est suspendu le pendule ; g, c’est ce qu’on appelle au XVIIème siècle l’intensité de la pesanteur peu importe... Bien. Or ce qui est important c’est que dans la formule vous voyez que, un pendule, un pendule simple, a un temps d’oscillation qui est indépendant de l’amplitude de l’oscillation, c’est-à-dire de la distance entre le point d’équilibre et le point où, vous éloignez la tige du pendule. Donc tout à fait indépendant de l’amplitude de l’oscillation, indépendant de la masse du pendule, ça répond bien à la situation d’un corps infiniment petit, et indépendant du poids du fil. Poids du fil, masse du pendule n’entreront en jeu que du point de vue du pendule composé.

-  Donc il semble qu’a mille égards l’hypothèse de Guérou marche. Il faudrait dire alors bon voila une réponse. C’est bien, une réponse très bien. Les individus pour Spinoza ce seraient des espèces de pendules composés, c’est-à-dire composés chacun d’une infinité de pendules simples. Et ce qui définirait un individu c’est une vibration. Bon. Alors à la fois là je dis avec beaucoup de liberté, comme ça, je développe ça pour ceux qui s’intéresseraient techniquement à Spinoza, les autres vous pouvez en retenir ce que vous voulez...A la fois c’est curieux parce que cette hypothèse elle m’attire et je ne sais pas pourquoi, je vois pas bien pourquoi. Il y a une chose qui me gêne : c’est vrai que toute l’histoire des pendules et des disques tournants au XVIIème siècle elle est très poussée. Mais justement si c’est ça que Spinoza avait voulu dire, pourquoi il ne ferait aucune allusion à ces problèmes de vibrations, même dans ces lettres ? Et puis surtout, surtout, le modèle du pendule, ne rend pas du tout compte, enfin de ce qui me paraît pour moi l’essentiel, à savoir cette présence de l’infini actuel. Et de termes infiniment petits. Voyez la réponse de Guérou en tant qu’il commente Spinoza c’est le rapport de mouvement et de repos doit se comprendre comme la vibration du pendule simple.

-  Voilà, je ne dis pas du tout que j’ai raison, là vraiment pas, je dis : s’il est vrai que les corps très simples, c’est pour ça d’ailleurs que, Guérou a besoin, d’affirmer, que les corps très simples ont quand même chez Spinoza une figure et une grandeur. Supposez au contraire, et je dis pas, je dis pas du tout là que j’ai raison, supposez que les corps très simples soient vraiment des infiniment petits c’est-à-dire qu’ils ont ni figure ni grandeur. A ce moment là le modèle du pendule simple ne peut pas marcher. Et ça peut pas être une vibration, qui définit le rapport de mouvement et de repos.

-  En revanche, on a une autre voie. Et puis vous pouvez peut être en trouver d’autres, sûrement vous pouvez en trouver d’autres. L’autre voie ça serait ceci (encore une fois je reviens à ma question) : entre des termes supposés infiniment petits, quels types de rapports peut-il y avoir ? La réponse elle est toute simple : entre des termes infiniment petits, si on comprend ce que veut dire au XVIIème siècle infiniment petits, c’est-à-dire, qui n’a pas d’existence distributive, mais qui entre nécessairement dans une collection infinie, entre termes infiniment petits il ne peut y avoir qu’un type de rapport, des rapports différentiels. Pourquoi ? Les termes infiniment petits c’est des termes évanouissants, c’est-à-dire, les seuls rapports que peuvent avoir entre eux des termes infiniment petits, c’est, des rapports qui subsistent lorsque les termes s’évanouissent. Question toute simple : qu’est ce que des rapports tels que, ils subsistent lorsque leurs termes s’évanouissent ?

-  Faisons là des mathématiques très très simples. Je vois, si j’en reste au XVIIème siècle, un certain état des mathématiques et ce que je dis est très rudimentaire, je vois que ce qui est bien connu au XVIIème siècle, c’est trois types de rapports :
-  je dirais il y a des rapports fractionnaires, qui sont connus depuis très très longtemps ;
-  il y a des rapports algébriques qui sont connus, enfin qui étaient pressentis bien avant ça va de soi, mais qui ont reçu un statut très ferme au XVIè et XVIIè siècle, au XVIIè avec Descartes, c’est-à-dire dans le première moitié du XVIIè, des rapports algébriques ;

-  et enfin des rapports différentiels, qui, au moment de Spinoza et Leibniz, sont la grande question, des mathématiques de cette époque. Je donne des exemples, cela, je voudrais vraiment que cela soit limpide pour vous même, ce n’est pas des mathématiques que je fais là, pas du tout.
-  Exemple de rapport fractionnaire : deux tiers.
-  Exemple de rapport algébrique : ax +by = (d’où vous pouvez tirer x sur y =)
-  Exemple de rapport différentiel, on l’a vu : dy sur dx = z. Bien. Quelle différence y a-t-il entre ces trois types de rapports ? Je dirais le rapport fractionnaire, c’est déjà très intéressant parce que sinon on pourrait faire comme une échelle. Le rapport fractionnaire il est irréductiblement un rapport. Pourquoi ? Si je dis deux tiers, deux tiers encore une fois c’est pas un nombre. Pourquoi est ce que deux tiers c’est pas un nombre ? C’est parce qu’il n’y pas de nombre assignable, qui multiplié par trois donne deux, donc ce n’est pas un nombre. Une fraction c’est pas un nombre c’est un complexe de nombre que je décide par convention de traiter comme un nombre, c’est-à-dire que je décide par convention de soumettre aux règles de l’addition, de la soustraction, de la multiplication mais une fraction n’est évidement pas un nombre. Une fois que j’ai trouvé les fractions je peux les traiter comme des nombres. Non plutôt non, je dis des bêtises. Une fois que j’ai trouvé la fraction, je peux traiter les nombres comme des fractions, c’est-à-dire une fois que je dispose du symbolisme fractionnaire, je peux traiter un nombre, par exemple deux, comme une fraction, je peux toujours écrire : 4 sur 2, c’est vrai 4 sur 2 = 2.

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