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68- 06/11/1984 - 1

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Gilles Deleuze - cinéma /pensée cours 68 du 06/11/1984 - 1 transcription : Noé Schur

C’est évident que je vous demande beaucoup de patience puisque nous sommes en train de construire notre programme. En même temps, ça ne va pas vous échapper, que, en même temps que nous construisons ce programme, nous l’entamons déjà. Donc c’est pas tellement une patience...

Alors notre point de départ, ben euh, notre point de départ la dernière fois, il était très simple : ça consistait à se donner un ensemble de déclarations splendides, des premiers grands auteurs de cinéma, et qu’on relit toujours - si on les relit - qu’on relit avec beaucoup de passion, mais en même temps en se disant « ah ben... c’était le bon temps ». C’est-à-dire que plus personne n’y croit. Mais notre question c’est déjà : en quel sens plus personne n’y croit ? Pourquoi plus personne n’y croit ? Et puis, est-ce que ça veut dire que nous avons renoncé, à force de lassitude, et de médiocrité du cinéma, que nous avons renoncé à établir tout rapport d’un type nouveau entre le cinéma comme discipline et la pensée ?

Et la dernière fois je disais, ben, c’est de trois manières que le premier cinéma a lancé ces déclarations, qui aujourd’hui encore une fois nous paraissent un peu des déclarations de musée. C’était d’une part le cinéma comme nouvelle pensée, d’autre part le cinéma comme art des masses, d’autre part enfin le cinéma comme langue universelle, ou parfois disaient-ils « proto-langage ».

Alors on peut invoquer bien des choses, on l’a vu, pour ébranler cette confiance qui était celle des premiers grands auteurs, notamment concernant la langue universelle. Et parmi les lieux communs qui nous viennent tout de suite à l’esprit, le fait que le cinéma soit devenu parlant, a évidemment mis en question sa prétention à être une langue universelle. Plus encore, la linguistique quand elle s’est mise à inspirer la critique du cinéma, quand elle a inspiré une certaine conception critique du cinéma sous forme de sémiologie, a pris pour cible, pour objet de sa critique, l’idée supposée naïve de langue universelle et a prétendu appliquer ou devoir appliquer au cinéma, des catégories du langage infiniment plus précises qui le destituait de sa prétention à être une langue universelle. Mais enfin c’est pas un événement intellectuel malgré tout, comme l’analyse linguistique, à supposer même qu’elle ait été bien faite, c’est pas un événement de cette nature qui explique que nous ayons perdu la croyance au cinéma comme nouvelle pensée, comme art des masses, comme langue universelle.

Et je disais que, conformément aux remarques de, à la fois de Serge Daney et de Paul Virilio, il y avait un événement qui nous concernait d’infiniment plus près. Ne serait-ce que celui-ci :
-  le cinéma comme art des masses supposait que les masses deviennent de véritables sujets.

Et c’est vrai non seulement d’un point de vue d’un cinéma révolutionnaire du type Eisenstein, mais c’était vrai pour Gance aussi. Or, il n’y a pas besoin d’expliquer longtemps que les masses ont continué à ne pas devenir sujet ; que bien plus, le cinéma a participé très fort à leur mise en condition, et que finalement, une mise en scène politique a rivalisé avec la mise en scène cinématographique, et s’en est servie ; et que bref, en gros, que ce qui a sonné le glas des ambitions premières du cinéma, c’est le fascisme ordinaire, et comme dit Daney, les grandes manipulations d’Etat, les grandes mises en scène d’Etat. Reste que, si vrai que ceci soit, on se trouve devant deux problèmes : quand-même, -d’où venaient ces espérances du premier cinéma et en quoi consistaient-elles ? Notamment, je disais, il nous faudra un examen assez précis des rapport langue-langage-cinéma, pour régler cette question d’une langue universelle. Mais pourquoi et d’où venaient et comment se développaient ces espérances d’un cinéma, nommons-le par commodité « classique » ?

Notre deuxième problème, du côté de l’autre versant : quelle qu’ait été cette bizarre alliance que Virilio analyse si bien, la grande alliance Hollywood-fascisme (ce qui ne veut pas dire que Hollywood ait été fondamentalement fasciste, ce qui veut dire que le fascisme a rivalisé avec Hollywood, et s’est vécu, au moins dans la tête de Goebbels, comme rivalisant fondamentalement avec Hollywood, c’est-à-dire faisant une mise en scène d’Etat comme on en avait jamais vu, et comme les studios d’Hollywood ne pouvaient pas y arriver)- bien de l’autre côté du versant, c’est, une fois dit que notre cinéma moderne, après la Guerre, a renoncé et même s’est constitué sur la base de ce renoncement, à la grande mise en scène hollywoodienne, et a fondé toutes ces découvertes nouvelles - pensez au néoréalisme italien - sur cette rupture ; et ben, dans ce nouveau versant que le cinéma explorait, est-ce que ne se tissait pas un nouveau rapport cinéma-pensée d’un type très particulier ? Très différent du premier rapport. Et c’est ça qu’il nous faut.

Or, la dernière fois j’ai commencé à dire une chose très simple : pourquoi est-ce que le cinéma pensait et estimait dès ses débuts avoir une affaire particulière avec la pensée ? Et ma réponse elle est très décevante, à force d’être simple ; mais peut-être que c’est au fur et à mesure qu’on s’apercevra qu’elle est pas si simple... Je disais, le propre de l’image cinématographique, c’est d’être automatique. C’est la seule, ou c’est la première image automatique, c’est-à-dire douée d’auto- mouvements. D’autre part, l’image de la pensée (j’ai essayé d’expliquer la dernière fois en quoi la pensée présupposait une image d’elle-même irréductible à ses méthodes, c’est-à-dire préexistant à toute méthode, et préexistant à tout fonctionnement de la pensée suivant une méthode). Eh bien d’autre part, l’image de la pensée était inséparable de deux automatismes. Dès lors, loin que le caractère automatique de l’image, comprenez euh... l’idée qui est toute simple, loin que le caractère automatique de l’image est destitué de la pensée, de son pouvoir, comme le pensaient certains à l’époque du début du cinéma, le caractère automatique de l’image cinématographique allait rencontrer une fois et deux fois le caractère automatique de la pensée. Et je disais le premier caractère automatique de la pensée, nous le connaissons tous... Nous le connaissons tous, sans bien savoir si l’on peut fonder sur lui une catégorie consistante. Pourquoi ? Tellement les zones d’automatisme, les figures d’automatisme sont elles-même variées. On peut toujours les grouper sous la rubrique générale : « les mécanismes inconscients ou subconscients de la pensée ». « Les mécanismes inconscients ou subconscients de la pensée », bon, d’accord. On a vu, ça allait des états de rêve à des états très différents (suggestion, somnambulisme, délire...), et sans doute entre tout ça il y avait des transitions très subtiles, bon ; mais je sais pas moi, pour mon compte on ne sait pas encore, s’il y a lieu de former à ce niveau un concept consistant d’automatisme. S’il y a lieu, on pourra l’appeler « automatisme psychologique » ou « automatisme mental », sans savoir encore combien de phénomènes et lesquels cette catégorie recouvre. La tentative pour constituer un concept consistant d’automatisme psychologique a été faite, je disais, par Janey, à un moment contemporain du cinéma, sans aucune influence du cinéma, je veux seulement marquer la rencontre, et vers la même époque par Clérambault sous le nom d’« automatisme mental ». La grande différence étant que chez Clérambault, l’automatisme mental est avant tout neuro-psychique et non pas simplement automatisme psychologique, comme le voulait Janey.

Pour que vous voyez mieux à quel point déjà nous sommes en train de grouper des choses dispersées, je dis : mais d’autre part, à la même époque aussi, ou à partir de la même époque, se faisaient de plus en plus des tentatives pour exprimer, avec tout le vague de la notion d’expression, un automatisme proprement psychologique, ou si vous préférez les mécanismes inconscients de la pensée ; et la tentative littéraire pour exprimer se faisait de...de tels mécanismes, se faisait dans des horizons divers, d’une part, du côté du surréalisme avec l’écriture dite automatique (et je ne retiens là de l’écriture automatique que vraiment le plus grossier, c’est, c’est petit à petit qu’on verra ce que c’est l’écriture automatique). D’autre part, avec...[interruption, 45 secondes de silence] d’autre part avec Joyce et le monologue intérieur, et les deux sont déjà très différents, quitte même à ce qu’on ajoute des tentatives plus récentes, par exemple le cut up chez Berouze, qu’il faudrait aussi confronter à ces tentatives. Or, voilà, et voilà que le cinéma dès ses débuts s’estime à tort ou à raison plus apte que la littérature même à exprimer l’automatisme psychologique et les mécanismes inconscients de la pensée. Et j’insiste, parce que je voudrais que vous y réfléchissiez : moi ça me paraît évident que ce n’est pas par hasard que d’une part, à la fois, l’image cinématographique est une image automatique et que le cinéma dès ses débuts se remplit de personnages qui sont soit des zombies, soit des somnambules, soit des « suggestionnés », soit des automates, ce n’est pas par hasard que dès le début le cinéma s’estime en état d’affronter les phénomènes du rêve, de la confusion mentale, du délire, et même de la fameuse vision des pendus et des noyés, bon ; vous reconnaissez tout de suite les grands thèmes de l’expressionnisme allemand ; vous reconnaissez également, je disais la dernière fois, les grands thèmes de l’école française d’avant-guerre, où Renoir poussera sans doute particulièrement loin le peuplement de l’image cinématographique par l’automate ; mais vous trouverez, vous trouverez des éléments de ce goût du cinéma français pour l’automate mécanique chez tous les grands auteurs, à commencer par Vigo par exemple. Et je dis, comprenez que, un cinéaste aussi moderne que Bresson, lorsqu’aujourd’hui il développe sa fameuse théorie du modèle cinématographique par opposition à l’acteur de théâtre, ce n’est pas par hasard s’il fonde le caractère de base de ce qu’il appelle le modèle cinématographique sur l’automatisme quotidien.

C’est pour moi déjà une différence fondamentale entre le cinéma et le théâtre. Il n’y a pas de théâtre des zombies, il n’y a pas de théâtre des automates. Vous me direz, mais si, il y en a. il n’y a pas de théâtre des somnambules. Si il y en a, bien sûr, il y en a, mais il y en depuis quand, à mon avis, il y en depuis qu’il y a le cinéma. On a beau dire que le fameux docteur Caligari, c’est encore du théâtre de, c’est encore du décor de théâtre : d’une part ça ne me paraît pas évident, d’autre part, l’intrusion du délire, de l’automate, du sumnam...du somnambule, comme personnage principal signe un néo-expressionnisme proprement, non un expressionnisme proprement cinématographique. Et je crois que Bresson a fondamentalement raison lorsqu’il dit - il ne fait pas une théorie du modèle par opposition à l’acteur en général - il fait une théorie du modèle comme chose proprement cinématographique par opposition à l’acteur comme personnage proprement théâtral.

Donc il y a un lien entre la spécificité de l’image cinématographique en tant qu’elle est automatique et les contenus que le cinéma va brasser. Ça me paraît tout à fait évident, et confirmer notre première, notre premier point de départ :
-  rencontre fondée entre l’image cinématographique et les mécanismes inconscients de la pensée ou l’automatisme psychologique.

Et c’est déjà à ce niveau que le premier cinéma noue une sorte, noue une sorte d’alliance, de noce avec la pensée. Voyez, si vous me suivez, qu’est-ce que je suis en train de faire quand je parle d’une construction de programme, voyez dans cette partie, si minuscule qu’elle soit, on a réuni déjà beaucoup de directions de recherche, et quand je vous dirais ce que j’attends de vous, ce sera encore plus simple, puisque, rien que pour ce thème qui me paraît avoir sa cohérence, on a une direction psychiatrique, une direction littéraire et une direction proprement cinématographique.

Mais je dis « automatisme » a toujours signifié autre chose aussi, du côté de la pensée. Je dirais que le premier automatisme c’est quoi, c’est, il définit l’automatisme psychologique, du rêve à la suggestion, à tout ce que vous voulez, il définit une espèce de matière noétique, une espèce de chaos noétique, « noétique » signifiant ici uniquement : ce qui sollicite la pensée, ce qui s’adresse à la pensée ; un objet qui s’adresse à la pensée. Mais l’automatisme avait aussi un tout autre sens, et cette fois-ci, c’était un automatisme grandiose, un automatisme logique, et non plus psychologique. Et la pensée se rêvait comme capable d’instaurer un automatisme logique qui conjurerait l’erreur. Et quand est-ce que la pensée est entrée dans ce rêve d’un automatisme logique qui conjurerait l’erreur ? C’est une vieille histoire, mais pas tellement vieille, car, je crois, on peut toujours trouver des..., elle commence avec le dix-septième siècle ; et c’est Spinoza, dans le Traité de la réforme de l’entendement, qui lance sa grande formule, que l’on arrive : ce que, dit-il, les Anciens n’ont pas conçu (ça veut dire clairement, je romps avec Aristote), ce que les Anciens n’ont pas conçu (pourtant ils en ont conçu les anciens, dans le développement des syllogismes, dans une logique déjà formelle, ils ont conçu beaucoup de choses) ben voilà que Spinoza nous dit, ce que les anciens n’ont pas conçu, à savoir, saisir la pensée comme un automaton spirituale, et lancer la grande formule : la pensée comme automate spirituel. Inutile de vous dire qu’on n’est plus du tout du côté de l’automatisme psychologique ; on est passé dans un automatisme logique.

Je veux dire, à la limite, pour tout simplifier, mais c’est des simplifications qui doivent vous faire frémir, à l’horizon on pointe l’ordinateur, ou le cerveau artificiel, tout ce que vous voulez. On pointe à l’horizon, peut-être un horion relativement proche. M’enfin faut être prudent : il ne s’agit plus d’une matière noétique qui constituerait l’automatisme psychologique, il s’agit cette fois-ci d’une forme de noèse.
-  La noèse étant l’acte de penser, l’automatisme va être la forme de la noèse. C’est comme un automatisme supérieur. Et voilà que Leibniz est tellement, tellement séduit par le mot de Spinoza, qu’il le reprend, et que dans un texte, Système nouveau de la nature, vous retrouverez l’affirmation de la pensée comme automate spirituel ou mental. Voyez surtout alors qu’il ne faut pas mélanger l’automatisme mental de Clérambault - Clérambault a un autre aspect de l’automatisme - et puis l’automatisme mental ou spirituel de la pensée classique qui prétend au contraire fonder l’ordre des raisons et l’ordre de la logique au sein de la pensée. Eh ben essayons rapidement de voir : qu’est-ce qu’il entendait, Spinoza, par l’automate spirituel ? La pensée est en nous comme un automate spirituel. Il voulait dire ceci : c’est que la pensée a la possibilité d’enchainer ses propres pensées suivant un ordre purement formel, c’est-à-dire indépendant de la nature des objets qu’elles représentent.
-  C’est ça du formalisme. On ne considèrerait ni l’existence ni la nature des objets, dont la pensée forme l’idée et l’on enchainerait les idées les unes aux autres, suivant des rapports de nécessité, suivant des rapports de nécessité interne, indépendamment du contenu représentatif des idées. On ne considèrerait que la forme de l’idée ; et les enchainements formels des idées indépendamment de la nature des objets qu’elles représentent constitueraient l’automatisme spirituel.

Qu’est-ce que ça veut dire ça ? Pour nous, c’est d’une certaine manière ce qu’on appelle l’« ordre démonstratif ». Il faut croire donc que Spinoza avait des raisons de penser que l’ordre démonstratif n’avait pas atteint son plein développement formel même chez un Grec comme Euclide, et qu’il fallait lui donner de nouveaux caractères qui en fondaient la formalisation. Quels étaient ces caractères ? Très simple. Spinoza nous dit : de quelle manière une idée renvoie-t-elle à une autre idée indépendamment du contenu, c’est-à- dire de quelle manière une idée renvoie-t-elle formellement à une autre idée ? Sa réponse est toute simple, et ça fondait toute une géométrie à l’époque. Exigence d’une géométrie génétique, à savoir, où les définitions seraient des définitions génétiques.
-  En d’autres termes, une idée ne devait pas être rapportée à l’objet qu’elle représentait, elle devait être rapportée à sa propre cause ; et l’automatisme spirituel, c’est l’enchainement des idées suivant les causes et effets. Pas suivant les causes et effets des choses ; mais toute idée a une cause qui est une autre idée. Et l’enchainement des idées à partir des définitions et en fonction des définitions génétiques constitue le formalisme. Ça veut dire quoi ça ? J’ai l’idée de cercle. Peu importe encore une fois qu’il y ait des cercles ou qu’il y en ait pas dans la nature. Peu importe. Bien plus, peu importe la nature du cercle tel qu’il est dans la nature, c’est-à-dire les causes du cercle. J’ai l’idée de cercle comme figure, ou lieu des points situés à égale distance d’un même point appelé centre. Je réclame la définition génétique du cercle. Parce que, « lieu des points situés à égale distance », c’est bien une définition, mais c’est l’idée de cercle, c’est tout, c’est l’idée de cercle. La définition génétique, c’est quoi ? C’est « mouvement d’une droite autour d’une de ses extrémités ».

Remarquez, et Spinoza insiste là-dessus, jamais un cercle n’a été fait comme ça dans la nature, à supposer qu’il y ait des cercles dans la nature, chose encore une fois dont on s’occupe pas, en tous cas on est sûr d’avance qu’ils ont pas été fait comme ça. Jamais la physique ou la nature ne procède avec une droite - parce qu’une droite c’est une idée, c’est une pure idée - mobile autour d’une de ses extrémités. Donc je vais rattaché l’idée à sa propre cause en tant qu’idée. J’aurais un enchainement d’idées. [...coupure] mouvement d’un demi-cercle autour de son axe, etc. J’enchainerai les idées dans l’ordre dû, comme dit Spinoza, l’ordre dû, indépendamment del’existence de leur objet, indépendamment de la nature de leur objet. Pourquoi ? Parce que l’idée aura une nature formelle qui lui est propre. Et l’idée prise dans sa nature formelle, c’est quoi ? C’est l’idée rapportée à sa propre cause, cette cause étant parfaitement fictive du point de la nature, mais quoi ? Mais en revanche n’étant pas fictive du point de vue de ma puissance de pensée. L’enchainement formel des idées sera donc sous la dépendance d’une puissance de pensée, puissance de l’automate spirituel. Voilà c’est tout. Remarquez qu’on irait encore plus loin dans ce sens, car Spinoza ne s’occupe pas - ce qui intéresse Spinoza c’est une géométrie génétique - il s’occupe pas de la nature de l’objet représenté par l’idée. Ça n’empêche pas que chez les idées gardent chez lui une nature interne : le cercle, la sphère, la droite. On peut concevoir d’aller plus plus loin, à savoir : qu’est-ce qui se passe si l’on ne considère même pas la nature de la chose dont on pose l’idée, ou plutôt si on ne considère même pas la nature de l’idée même ? C’est autre chose, mais est-ce que c’est pas une autre figure de l’automate spirituel ? Je veux dire, à la limite, on a quitté le formalisme pour entrer dans quelque chose d’autre, mais qui réalise peut être encore mieux l’automate spirituel que le formalisme : on est entré dans le domaine de ce qu’on appellera bien plus tard l’axiomatique. Là, on considère des éléments dont la nature n’est pas spécifiée. Qu’est-ce que ça veut dire ça : considérer des éléments dont la nature n’est pas spécifiée ?

C’est très simple ce que je veux dire, c’est que, pour que vous ayez le sentiment de la différence entre formalisme et axiomatique, c’est, je veux dire c’est l’occasion que, enfin pour ceux, il y en a qui le savent déjà, pour d’autres c’est l’occasion de savoir quelque chose quoi. Bien c’est pas difficile, supposez que je vous dise, hein, c’est pas difficile à comprendre... Voilà je vais vous dire : quels que soient les éléments considérés, je réclame « e R x », vous me direz c’est de l’algèbre, non, c’est pas de l’algèbre... peut-être, il a fallut l’algèbre, mais peu importe... « e R x = x R e = x »... pas difficile hein... « R » veut dire relation. Donc « e R x »... « x =... »... « x R e = x ». Voyez, est-ce que c’est des cercles ? Est-ce que c’est des sphères ? Est-ce que c’est des droites ? Je ne considère même plus la nature formelle de l’idée. Alors qu’est-ce que je considère ? Oh ben, je définis une structure formelle, c’est-à-dire un ensemble (là je ne prends qu’un exemple, pas... pour que ça se complique pas ; euh... dans ce cas je n’ai qu’une relation) ; mais, supposons, je considère un ensemble de relations entre éléments non spécifiés. Une fois que j’ai défini ma structure, je peux toujours me demander, pour m’amuser : qu’est-ce qui l’effectue cette structure ? Là je peux toujours essayer de spécifier les éléments, mais j’en n’ai pas besoin. Alors je vous demande déjà : il y a quelque chose qui est évident, il y a un élément facile à spécifier qui répond parfaitement à la relation « e R x = x R e = x » : ...c’est... « e = 0 » ; « x » étant dès lors un nombre quelconque, et « R » étant une addition... un nombre entier mettons pour pas compliquer, un nombre entier quelconque et « R » étant une addition. Vous avez en effet « 0 + x = x + 0 = x ». Vous me direz bon, et puis après quoi ? Bon. D’accord, d’accord. Mais c’est pas forcément des nombres entiers. Ça peut être aussi des déplacements dans l’espace, dans l’espace euclidien. Ça peut être des déplacement dans l’espace euclidien. Des déplacements dans l’espace euclidien vérifient aussi « e R x = x R e = x ». « e » c’est quoi ? À ce moment là « e » c’est ce que l’on appelle le « déplacement identique ». Le déplacement identique étant celui qui laisse fixe chaque point de l’espace. Bon, voyez l’intérêt d’une axiomatique, c’est pas les seuls cas hein, je retiens les deux cas les plus simples. Structure qui convient à deux domaines absolument étrangers l’un à l’autre : l’addition des nombres entiers, la composition des déplacements dans l’espace euclidien. Vous direz que vous avez constitué une axiomatique. L’axiomatique, je n’en ai retenu qu’une relation. Il va de soi qu’une axiomatique implique plusieurs relations, soumises à la seule condition d’être indépendantes les unes des autres. Chaque axiome doit être indépendant. Et à partir de plusieurs axiomes vous tirez des conséquences, conséquences qui vaudront aussi bien pour l’addition des nombres entiers, la composition des déplacements dans l’espace, et bien d’autres choses encore.
-  C’est une nouvelle figure de l’automate spirituel.

Je dirais pour simplifier, c’est une combinatoire. Ce n’est plus simplement l’ordre démonstratif que Spinoza invoquait, c’est un ordre combinatoire qui était déjà celui de Leibniz. C’est pour ça que je dis : les cerveaux artificiels ne sont pas très loin. Chose qu’on aura à retrouver. Or, dans un livre qui a beaucoup agité le début du XXe siècle, le fameux Monsieur Teste de Valéry, qu’est-ce que vous trouvez ? Là encore, c’est un texte admirable. Mais loin d’être un un texte initiateur, inaugurateur, c’est comme la grande présentation, le grand achèvement de la pensée classique. Et Monsieur Teste, c’est le porteur d’une pensée qui se développe à la manière de l’automate spirituel. Et Monsieur Teste explique qu’il est porteur d’une pensée qui vit de sa propre substance, à elle pensée, et il invoque l’autonomie de la fonction pensante. Cette autonomie, il l’expliquera ; je lis le texte : « il ne connait que deux valeurs », Monsieur Teste, « il ne connaît que deux valeurs, deux catégories, qui sont celles de la conscience réduite à ses propres actes », « il ne connaît que deux valeurs, deux catégories, qui sont celles de la conscience réduite à ses propres actes : le possible et l’impossible ». En effet peu importe que ça existe dans la nature et comment ça existe. La pensée déduit ses pensées les unes à partir des autres ou combine ses pensées les unes avec les autres, à votre choix, indépendamment de toute question concernant la réalité. « Il ne connaît que deux catégories, qui sont celles de la conscience réduite à ses actes : le possible et l’impossible...

Dans cette étrange cervelle », alors là, Valéry, il dit quelque chose de très curieux, « dans cette étrange cervelle », bon, c’est une étrange cervelle, mettons, « où la philosophie a peu de crédit », oui, ouais, euh...c’est pourtant elle qui a inventé tout ça, hein, ça fait rien... « où le langage est toujours en accusation, il n’est guère de pensée... », non j’ai tort évidemment elle a pas inventé l’axiomatique la..., mais enfin euh..., l’idée de l’automate spirituel, dont se réclame Monsieur Teste, a typiquement son origine dans la philosophie. Euh, comme quoi Monsieur Teste est un ingrat, mais il est fondamentalement ingrat. « ...où le langage est toujours en accusation, il n’est guère de pensée qui ne s’accompagne du sentiment qu’elle est provisoire. Il ne subsiste guère que l’attente et l’exécution d’opérations définies. Sa vie intense et brève », à la pensée, « sa vie intense et brève se dépense à surveiller le mécanisme par lequel les relations du connu et de l’inconnu sont instituées et organisées ». L’automate spirituel surveille « le mécanisme par lequel les relations du connu et de l’inconnu sont instituées et organisées. »

Et dans ce Monsieur Test, une page moi me parait très insolite et puis nous..., devrait nous convenir. Car je suppose, je suppose que Monsieur Teste est malade. Je dis « je suppose » parce que ça ne me paraît pas dit formellement dans le texte. Bien plus, je suppose qu’il souffre d’une maladie incurable. Et cette maladie incurable, alors qu’il porte l’automate spirituel, le rappelle de temps en temps. Le rappelle de temps en temps à quoi ? À un autre ordre ; c’est-à-dire Monsieur Teste souffre. Et il tient un discours assez curieux une fois qu’il est couché, et il dit : « j’ai... », et il y a les trois petits points tout le temps, donc il balbutie ; « J’ai... pas grand chose... j’ai... un dixième de seconde qui se montre... attendez...il y a des instants ou mon corps s’illumine », alors qu’il est pensée pure, qu’il est porteur d’une pensée pure, porteur de l’automate spirituel, « il y a des instants où mon corps s’illumine...c’est très curieux...j’y vois tout à coup en moi [dans mon corps]... je distingue les profondeurs des couches de ma chair [le corps] et je sens des zones de douleurs, des anneaux, des pôles, des aigrettes de douleurs...Voyez-vous ces figures vives, cette géométrie de ma souffrance ? » C’est pas la même que tout à l’heure. Ça, ça m’intéresse beaucoup que Monsieur Teste de Valéry ait besoin... Voilà que à la haute géométrie de l’automate spirituel répond une autre géométrie, la géométrie de la souffrance. Les zones de douleurs, les anneaux, les pôles, les aigrettes. « Il y a de ces éclairs qui ressemblent tout à fait à des idées », n’empêche que c’est des envers d’idées, « ils font comprendre d’ici jusque là, et pourtant ils me laissent incertain...incertain n’est pas le mot...Quand cela va venir », c’est-à-dire la souffrance que Monsieur Teste attend, « Quand cela va venir, je trouve en moi quelque chose de confus ou de diffus... il se fait dans mon être des endroits brumeux », alors que l’automate spirituel au contraire est toute rigueur et clarté, « je trouve en moi quelque chose de confus ou de diffus...il se fait dans mon être des endroits brumeux... il y a des étendues qui font leur apparition...alors, je prends dans ma mémoire une question un problème quelconque, je m’y enfonce », je prends dans ma mémoire, c’est à dire dans l’automate spirituel, je prends dans l’automate spirituel « une question, un problème quelconque, je m’y enfonce... je compte les grains de sable, et tant que je les vois, ma douleur grossissante me force à l’observer », elle, la douleur, « ma douleur grossissante me force à l’observer...j’y pense », et voilà ce qu’il nous fallait, « je n’attends que mon cri...et dès que je l’ai entendu l’objet, le terrible objet » ladouleur, « l’objet, le terrible objet devenant plus petit et encore plus petit... se dérobe à ma vue intérieure ». Le cri, c’est ce qui a confronté les deux automatismes. La confrontation des deux automatismes : l’automatisme neuro-psychiqueetl’automatisme logique, l’automate spirituel, se sont étreints un court instant ; dans ce court instant a jailli le cri. Bon Et s’il y avait pas besoin de ça ? Le cri ou de quelque chose de semblable. Pourquoi ? C’est que l’automate spirituel, c’est la plus belle chose qui puisse nous habiter. L’automate spirituel c’est le dieu en nous. Seulement voilà, il y a qu’un inconvénient pour l’automate spirituel, c’est qu’il reste éternellement suspendu dans la pure possibilité. Il ne connait que deux catégories, le possible et l’impossible. Spinoza, il s’en tirera (je fais une très brève parenthèse pour ceux qui connaissent Spinoza) Spinoza, il s’en tirera parce que, mais il sera amené à ne pas reculer devant une conclusion fantastique, à savoir : « tout le possible est réel ». Comme ça...comme ça, il tient tout.

Mais même Leibniz ne pourra pas dire ça, il pourra pas dire que le possible est réel. En tous cas l’automate spirituel, même si tout le possible est réel, l’automate spirituel reste éternellement suspendu dans sa propre possibilité qui est la possibilité de pensée. Alors surgit - et je prétends ne pas faire des mélanges ; ce sera à vous de voir si tout ça est fondé et nécessairement fondé - alors surgit, peut-être une espèce de cri, ce que j’appelais la dernière fois un cri philosophique, peu importe pour le moment qui l’a dit, qui l’a prononcé : « Que nous ayons la possibilité de penser ne garantit pas encore que nous en soyons capables ». En effet, que la pensée soit notre possibilité logique, nous le savons tous ; est-ce que ça veut dire que nous pensons ? Que la pensée soit notre possibilité logique, cela veut dire que nous avons en nous, nous logeons en nous l’automate spirituel. Est-ce que nous pensons ? Que nous ayons la possibilité ne garantit pas que nous en soyons capables.

Ce beau texte, qui va avoir de grandes conséquences, beaucoup d’entre vous l’ont reconnu, c’est le début de "Qu’appelle-t-on penser ?" de Heidegger. Et je ne prétend pas le rattacher à la philosophie de Heidegger - on verra, on verra si on la rencontre. Mais j’extrais ce texte comme ayant de toute manière une valeur pour nous. Que nous ayons la possibilité de penser ne garantit pas encore que, et ne dit pas encore que nous en soyons capables.
-  En d’autres termes : qu’est-ce qui peut faire que l’automate spirituel entre en mouvement ? Il faut quelque chose - dans le langage de Heidegger - il faut quelque chose qui donne à penser, sinon nous resterons éternellement dans la possibilité de penser, mais nous ne penserons pas pour autant ; il faut quelque chose, dans son langage, il faut que nous accueillions ce qui donne à penser, sinon nous ne sortirons pas de la catégorie du possible. Bien.

Est-ce que c’est pas là alors que, tout à fait indépendamment de Heidegger, je vais trouver quelque chose qui m’intéresse..quant à notre problème cette année ? Je dirais, ce qui donne à penser, ce qui va donner la capacité par-delà la possibilité, c’est quoi, la nécessité d’un choc. Il faut un choc pour mettre en mouvement l’automate spirituel. Pas n’importe quel choc, il suffit pas de taper dessus, parce que si on tape dessus, alors on serait ramené à l’automatisme psychologique, c’est-à-dire l’étourdissement, au besoin l’évanouissement, l’amnésie, l’aphasie, si vous avez tapé trop fort sur l’automate spirituel pour tomber dans l’automatisme psychique. Il faudrait quelque chose de très particulier qui soit un « noo-choc ». Alors on peut toujours former cette notion de « noo-choc ». « Noos » c’est le mot grec qui désigne la pensée. Un noo-choc. Bon. Un noo-choc ce serait ce qui donne à penser. Ce qui nous fait donc sortir de la sainte catégorie du possible. Bien.

Je continue mes rêveries. Est-ce que le cinéma d’une certaine manière, qui donc, on l’a vu, affrontait l’automatisme psychologique, est-ce qu’il n’était pas amené aussi à affronter l’automatisme logique, l’automate spirituel ? Ça paraît beaucoup moins évident. Et pourtant, est-ce que les images cinématographiques n’allaient pas, dans certains cas, prétendre s’élever à un ordre où elles se déduiraient les unes des autres suivant des enchainements formels ? Ou bien ça veut rien dire, ou bien il faudrait dire quels sont ces enchainements formels. Je dis une hypothèses : ces enchaînements formels pourraient être des mouvements de caméra. Les enchaînements formels allant d’une image à une autre seraient les mouvements de caméra. Pas n’importe quels mouvements de caméra.
-  En d’autres termes, est-ce qu’il y a possibilité pour un cinéma théorématique ?

Alors on pourrait chercher des choses compliquées dans le cinéma abstrait. Mais c’est pas ça qui m’intéresse. C’est pas...non, c’est pas ça. Ce qui m’intéresse c’est très précisément une phrase d’Alexandre Astruc. Alexandre Astruc, à la fois cinéaste et réfléchissant beaucoup sur le cinéma, dit peu de temps après la guerre (c’est un texte de 1949), « l’expression de la pensée est le problème fondamental du cinéma ». Bon j’aime bien qu’il dise ça en 49, parce que Gance, Eisenstein disaient pas autre chose. Il y a eu pourtant la guerre. Donc Astruc, après la guerre, maintient que le cinéma n’a qu’un problème, l’expression de la pensée. Et il dit, avec la guerre quelque chose a changé ; et il dit voilà : avant le cinéma il est très prudent, le cinéma muet procédait plutôt par associations d’images, d’où l’importance du montage dans ce cinéma. C’est une chose très simple, le cinéma muet, il procédait par associations d’images, d’où l’importance du montage. On verra qu’est-ce que c’étaient que ces associations ; là on aura a retrouver ce thème. Et il dit « maintenant », voyez tout de suite que le texte est signé quant à sa date ; c’est le moment où on se lasse pas de découvrir à la suite de Welles la profondeur de champ. Et, ou à certains égards, on croit, peu importe si c’est à tort ou a raison, que la profondeur de champ met le montage dans l’image, donc intériorise le montage, et à la limite le secondarise, le rend secondaire.

Et voilà ce qu’ajoute Astruc : « nous avons de plus en plus tendance à nous apercevoir que le déroulement du film ne procède plus d’après une association d’images, mais se fait sur le mode d’un théorème ». Un « théorème », c’est curieux qu’il emploie ce mot hein. Une pensée théorématique. Le cinéma avec la profondeur de champ, avec d’autres... ou avec d’autres procédés, deviendrait un cinéma théorématique dont les enchainement formels seraient les mouvements de caméra. Pour ceux qui savent, ça ne vous étonnera pas - et c’est ça ce que voulait dire Astruc avec sa fameuse histoire de « caméra-stylo ». La caméra-stylo ça veut dire quelque chose de très précis, mais qui est pas le sens qu’on croit d’habitude ; c’est un cinéma qui engendrerait des images non plus d’après des associations d’idées, mais d’après les enchaînements formels constitués d’après les mouvements de caméra.

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