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66- 12/06/1984 - 2

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Gilles Deleuze cours 66 du 12/06/83 - 2 Vérité et temps transcription : Elsa Roques

A partir de là, faisons...suivons mieux l’ordre chronologique. Tout simple l’histoire Resnais. Ce n’est pas de la théorie. C’est tellement un problème qui l’obsède, que vous n’avez qu’à faire la liste. C’est toujours : coexistence de nappes de passé, sans centre c’est lui qui va servir de centre.

Je commence par "L’année dernière à Marienbad". Je ne peux pas suivre tout à fait l’ordre chronologique. « L’année dernière à Marienbad », qu’est-ce qui se passe ? Je peux dire : c’est encore quand même un passé commun. Il y a quelque chose de commun. A savoir : A et X, X l’homme et A la femme, se sont-ils rencontrés déjà, se sont-ils pas rencontrés ? question complexe. La réponse n’est pas difficile. X s’installe sur une nappe où il a rencontré A. A s’installe sur une nappe où elle n’a pas rencontré X. Elle s’installe sur une nappe où elle n’a pas "encore" rencontré X, et X s’installe sur une nappe où il a déjà rencontré A. Je le signale, et c’est ça qui pour moi fait problème, c’est qu’ on n’a jamais vu un film aussi cohérent fait par deux auteurs, qui le comprennent autant de deux manières absolument opposées. C’est même sûrement le secret des collaborations fécondes, parce que Robbe Grillet fait le film - une fois dit qu’il a été plus que scénariste, ce que tout le monde reconnaît - Robbe Grillet fait le film en le concevant - à mon avis - non pas du tout sous les espèces d’un signifiant linguistique, mais sous les espèces d’une simultanéité de pointes de présent, de pointes discontinues de présent. Et Resnais fait le film en le concevant comme une coexistence de marques continues. La merveille, c’est que ça ait marché. Mais c’est comme ça, les collaborations les plus merveilleuses viennent de ce qu’on a fait des choses absolument différentes. C’est comme ça que ça marche.

A la rigueur on pourrait les distribuer. On pourrait dire que la femme A est plus proche de Robbe Grillet, et que l’homme X est plus proche de Resnais. Parce que la femme A elle saute bien d’une pointe de présent à une autre, elle saute bien sur un mode discontinu, d’une pointe de présent à une autre. Tantôt niant qu’elle ait rencontré, tantôt à moitié convaincue. Tandis que l’homme, lui, il essaie d’envelopper la femme de ses nappes de passé. Si ce n’est pas celle-là que tu veux, c’est celle là. Il saute d’une nappe de passé à une autre, dans laquelle il essaie d’envelopper la femme dans une nappe de passé. Ça pourrait s’arranger en plus [inaudible]Mais enfin, dans "L’année dernière (à Marienbad)", ça marche encore cette histoire de passé, parce qu’il y a bien quelque chose de commun. Oui ou non se sont-ils rencontrés ?

Si je passe à Hiroshima, là vous voyez Resnais il détonne avec quelque chose de très curieux car ce sont deux nappes de passé, Hiroshima[inaudible] et qui n’ont rien avoir l’une avec l’autre. Et chacune des deux va servir de passé à l’autre qui, à son tour, chacune, va servir de présent par rapport à l’autre. Il y a affrontement des deux nappes de passé. Avec cette différence que le japonais veut chasser, il ne veut pas du tout que la femme entre dans sa nappe de passé. « Tu n’as rien vu à Hiroshima ». Tandis qu’elle l’attire de toutes ses forces dans sa nappe de passé à elle. « Tu es l’allemand, tu es le même que l’allemand ». Le problème d’Hiroshima mon amour, ça va être... Vous voyez que la mémoire décolle de l’individu. Comment se faire une mémoire à deux lorsque les deux n’ont rien de commun ? C’est le premier pas d’une mémoire supra-psychologique.

Avec "Murielle" - ça m’est bien égal, moi il me semble que les gens ils se perdent en se demandant qu’est-ce qui y est vrai, qu’est-ce qui y est faux, dans les souvenirs invoqués de Murielle. Ce n’est pas ça qui est intéressant pour moi. C’est que le problème se complique encore [inaudible]Cette fois-ci ce n’est pas une mémoire à deux. C’est une mémoire, d’une part, à plusieurs niveaux, et à plusieurs personnages. Deux niveaux : la guerre mondiale et la guerre d’Algérie. Et trois, quatre, autant que vous voulez de personnages. Trois au moins, non ? Quatre au moins, qui vont se répartir, et qui vont affronter [..[inaudible].] Et ce qui compte, ce n’est pas du tout que l’hôtelier soit plus ou moins convaincu de mensonge, et qu’il n’ait jamais été en Algérie, parce que, comme le remarquait perfidement Robbe-Grillet, il n’y a pas plus de raisons de croire que Bernard, le soldat, l’ancien appelé, ait été vraiment en Algérie. Ou meme [inaudible] Ce n’est jamais des images souvenirs, c’est des présences hallucinatoires. Quelle présence hallucinatoire va sortir du jeu des nappes de passé virtuel, et des continuums de passé ? Un pas de plus vers la révolution, je sais plus quoi ?

Le film suivant, après « Murielle », pardon, "La guerre est finie". Là vous avez - il faut que j’aille de plus en plus vite - une mémoire qui tend tellement à se dégager, que c’est une mémoire à trois niveaux. C’est une espèce de mémoire-monde, et même - ce qui va intéresser beaucoup Resnais dans ses films suivants - une mémoire-âge du monde. Voyez, il passe d’une mémoire à deux, une mémoire à plusieurs, à une mémoire-monde, et toute la mémoire du monde. Mémoire-âge du monde. Et "la Guerre est finie" va affronter, va brasser trois âges de l’Espagne. Et à chacun de ces âges, il y a la totalité de l’Espagne. Comme je disais, à chaque niveau il y a tout le passé. Il y a l’âge de la guerre civile et de ceux qui sont restés plus ou moins annexés à la guerre civile. Il y a l’âge, qui paraît l’âge du futur, l’âge des jeunes terroristes radicaux [...] C’est un continuum. Et puis il y a le niveau propre au héros, qui va à la fois rompre avec les images-souvenirs de la guerre civile, et qui trouve aussi que la politique des terroristes radicaux est une mauvaise politique [inaudible]Trois âges de l’Espagne [inaudible].] Il n’y a pas de centre, chacun sert de centre relatif par rapport aux autres.

Avec "Mon oncle d’Amérique" le thème d’une mémoire-âge du monde se complique encore - pas du tout du point de vue des images, tout ça c’est des films extrêmement clairs - puisque vous avez trois personnages, dont chacun brasse ses nappes de passé, les affronte à ceux des autres, là aussi dans des processus de fragmentation, de répartition, de recoupement, d’exclusion. Avec un effet curieux pour dégager ce qui est constant, pour dégager des constantes de chaque nappe. Ca c’est l’apport Laborie qui distingue dans chaque nappe : territoire, ligne de fuite hors du territoire, blocage des lignes de fuite. Si bien qu’à la faveur de ces constantes, les nappes de passé peuvent dépasser l’homme, c’est-à-dire s’appliquer à l’animal. C’est la grande réconciliation de l’homme et de la souris, telle qu’elle était interdite et exclue par "Je t’aime, je t’aime". C’est vraiment les âges du monde, y compris l’île et son trésor, avec des nappes de passé subhumaines, c’est-à-dire animales, et surhumaines, c’est-à-dire cosmiques.

Et puis le dernier," La vie est un roman" [inaudible]Trois âges du monde qui rentrent en confrontation. Et cette fois-ci, pourquoi ça représente encore un progrès, « La vie est un roman, du point de vue de l’œuvre ? de la poursuite éperdue de Resnais de ce problème, il a ce problème qui le hante. C’est parce que cette fois les âges du monde, ou les nappes de passé ont chacune absorbé leur personnages. Elles ne renvoient plus à des personnages. C’est elles-mêmes qui sont devenues des personnages. Tandis qu’avant, ça renvoyait à des personnages dont chacun avait plusieurs nappes de passé. Maintenant les nappes ont englouti leurs propres personnages. [...] Bon mais alors s’il n’y a plus de centre, comment ça se fait ?

Là aussi, je voudrais faire un peu la même chose que pour Orson Welles, mais en m’excusant parce que je prendrai plus de précautions, si on n’était pas si pressé. Parce que j’ai très peur que ça vous paraissent de l’application. Je suis très ennuyé, parce que Isabelle Stengers est là. Ça m’embete parce que je voudrais raconter une histoire qu’elle connaît beaucoup mieux que moi. Dans le livre justement de Prigogine et d’Isabelle Stengers, "La Nouvelle Alliance", on voit à un moment une opération qui est très, très, très charmante, très intéressante, que les mathématiciens appellent la transformation du boulanger. Vous allez comprendre pourquoi je la place là. Et Isabelle va comprendre, je l’espère, pourquoi j’en donne une présentation grotesque, tellement elle est simple, simplifiée au point d’être fausse.

Je me contente de ceci : je me donne un carré - j’ai le droit, nous avons le droit de nous donner un carré, nous avons le droit non pas du tout parce que tout le monde a le droit, mais nous, nous particulièrement nous avons le droit de nous donner un carré, puisque ce que nous appelons nappe de passé, c’est ça, ça c’est un carré, ça c’est un continuum, une nappe de passé. Le boulanger étire sa nappe, son carré, et il l’étire, il est un bon boulanger, en un rectangle dont la largeur est la moitié du carré, et la longueur, le double du carré. [inaudible] Ce rectangle, [inaudible]je le divise en deux moitiés, que j’appelle A et B. Là-dessus, je continue en tant que boulanger, et je prends la moitié B et je la mets sur A. J’aurais pu faire l’inverse. J’ai donc un carré, et je peux marquer la partition AB. Vous me suivez ? J’ai fait ça, j’ai étiré, puis j’ai pris la moitié B et je l’ai remise là-dessus : j’ai retrouvé mon carré, mais avec une partition AB.

C’est mon carré 2. Je prends mon carré 2, et je l’étire. Je ne complique pas, je l’étire dans la même direction. En même temps pensez dans vos têtes que si je l’étire dans une autre direction, ça va donner des choses très intéressantes. Mais il ne faut pas exagérer. Je le tire à nouveau en un rectangle, dans les mêmes conditions, de largeur moitié, et de longueur double. Je peux diviser mon rectangle. Mais, j’ai la partition de mon carré qui reste, au point que mon rectangle présente d’un côté AB et de l’autre côté AB. Et je fais la même chose : ma seconde moitié, je l’enfile sur la première. J’obtiens un nouveau carré, cette fois-ci à quatre partitions. Si je prends dans l’ordre : A, B, A, B - ça me suffit.

Ce que je viens de raconter est même à la limite faux. Car il va de soi que l’on peut faire intervenir là-dessus des étirements dans toutes les directions possibles. Vous aurez également des partitions verticales. Vous pouvez numéroter les transformations d’après le nombre de partitions. Voilà.
-  Premier point : vous pouvez numéroter les transformations d’après le nombre de partitions.
-  Deuxième point : si vous faites intervenir tout - et même si vous ne faites intervenir que ça, que les figures que j’ai faites - vous pouvez déjà comprendre que, si je prends une région de mon carré originel, si petite soit-elle, il y aura toujours un moment, à l’issu d’un nombre "petit n" de transformations, où deux points si proches qu’ils soient de la région seront fragmentés, dans la mesure où ils se trouveront dans des partitions différentes. Donc, premier principe : une transformation étant donnée, vous pouvez toujours calculer l’âge de la transformation d’après le nombre des transformations.

Deuxième point : une région si petite qu’elle soit, il y aura toujours à l’issu d’un nombre suffisant de transformations, un moment où deux points si rapprochés que vous voulez de la région, seront fragmentés parce que pris dans des partitions différentes. Vous comprenez ? Alors je m’excuse beaucoup auprès d’Isabelle Stengers, parce qu’elle doit souffrir énormément [inaudible]A partir de là, comprenez que ça engage à la fois des considérations - si je comprends bien - d’une part, probabilitaires, d’espace probabilitaire, et d’autre part, d’espace topologique, pas du tout confondus. [inaudible]Or, pourquoi je raconte ça ? Ce n’est quand même pas pour le plaisir [inaudible]Je raconte ça parce que ça me paraît évident que - non pas que Resnais fait de la transformation de boulanger, il n’applique pas ça - le problème de Resnais dans le cinéma est quelque chose comme le problème de la transformation du boulanger en mathématiques.

Si vous prenez un des premiers courts-métrages admirable de Resnais, c’est « Van Gogh ». Qu’est-ce qu’il fait dans « Van Gogh » ? Qu’est-ce que vous trouvez dans Van Gogh ? Il procède par travelling à l’intérieur des tableaux d’une même période. Voyez ce qu’il fait : il fait sauter les cadres. C’est un voyage à travers les tableaux différents d’une même période. Je dirai, une fois de plus, comme chez Orson Welles. Le travelling est facteur de temporalisation, beaucoup plus que de spatialisation : c’est une exploration de passé. Et ce n’est pas par hasard que Resnais a dit un jour : « chaque fois qu’il y a œuvre d’art, ou même lecture, il y a mémoire ». Il ne s’agit pas d’une mémoire image-souvenir. Il ne s’agit pas d’une mémoire psychologique. Donc, il fait ça. A mesure qu’il s’approche de la dernière période, de la période provençale, les travellings se font plus rapides, les fragmentations de plus en plus hachées. Les fondus se multiplient, ou bien les coupures, jusqu’au noir final. D’une période à l’autre de Van Gogh, c’est les nappes de passé, des continuums de passé. Il a assuré. Et c’est pour ça que c’était nécessaire à Resnais de ne pas faire un tableau, et puis un autre tableau, mais d’établir un continuum correspondant à une période, et couvrant plusieurs tableaux. Le travelling s’enfonce dans les tableaux, et ne connaît pas les bords qui séparent un tableau d’un autre. Il instaure donc des continuums. Et d’un continuum à l’autre, qu’est-ce qu’il va y avoir ? Il va y avoir remaniement (coupure)

Et des fragmentations... Et c’est constant, c’est la formule de Resnais. Et c’est la formule de quoi ça ? Ce n’est pas une formule qu’il applique, c’est la formule de son cœur. Ca répond à son problème. C’est exactement ce que je disais tout à l’heure pour Orson Welles, mais d’une toute autre manière. La conciliation chez Orson Welles du montage court et du long plan-séquence n’a jamais fait de problème pour Welles. Pourquoi ? On a vu la réponse chez Welles. C’est que, je crois vraiment, le montage court se charge d’une espèce de projective, tandis que le plan-séquence se charge de ce que la projective ne peut pas donner car les images de la projective sont forcément des images aplaties - se charge de la répartition des ombres, des plages d’ombre, et des reliefs. Donc la conciliation est évidente, il n’y a pas de problème. Il a besoin des deux comme moyens de sa création.

Chez Resnais, je dirai, c’est la même chose, mais pour une toute autre raison. Chez Resnais, comment se concilient le montage haché - qui triomphe par exemple dans « Muriel » - et les fameux travellings, les longs travellings de Resnais ? C’est la même chose. Le travelling, Resnais a besoin des deux. Et ça fait deux composantes de son art, parce que le travelling se charge de la nappe de transformation et de l’âge de cette nappe, et le montage haché se charge de l’état de fragmentation qui lui correspond.

Je résume : nos deux images-temps directes devaient être tout à fait distinctes de la forme empirique du temps. Nous les avons trouvées, nous les avons définies sous la forme suivante : - d’une part, simultanéité des pointes de présent désactualisés, - d’autre part, coexistence des nappes de passé virtuel et transformation de ces nappes les unes avec les autres. Dans les deux cas, on parlera - pour reprendre l’expression , je sais pas si je vous ai parlé d’un romancier russe très grand qui me paraît très proche de Resnais, on doit meme savoir si Resnais le connait, qui s’appelle Biely, qui a écrit un roman, un chef d’œuvre qui s’appelle « Pétersbourg » - de l’identité de la ville et de ce qu’il appelait, lui, Biely, le jeu cérébral, c’est-à-dire l’identité de la topologie de la ville et du jeu cérébral. Et dans son roman il invente dedans une biologie des ombres, en disant : "tant qu’on n’aura pas fait la biologie des ombres, on ne comprendra pas l’identité, précisément, de la ville topologique et du jeu cérébral".

Pour dire que - si on avait à continuer notre année, ce qu’on ne fera pas - ces deux images-temps directes, elles doivent nous ouvrir sur un certain exercice de la pensée. Et chez Resnais, c’est évident. Chez Robbe-Grillet aussi, c’est évident. C’est que ce cinéma, ce à quoi ce cinéma tend, c’est un jeu cérébral - pas du tout au sens ludique - comme détermination de l’exercice de la pensée, c’est-à-dire, le cinéma devient pensée en même temps qu’il libère l’image-temps. Voilà à peu près notre schéma.

Alors il nous resterait deux choses - Comtesse, tu as amené ton ami ? Où il est ? Comprenez, si vous avez la gentillesse, comme j’ai encore des conclusions à tirer, il faudrait... Comtesse m’a dit que vous pourriez nous donner juste quelques directions de recherche sur un domaine que je ne connais pas du tout, et qui est l’utilisation de thèmes cristallins dans la science-fiction. Alors nous, ce qu’on a appelé ici image-cristal, ou cristal, ça n’intervient pas. Mais je voudrais que vous le fassiez au maximum - et je m’excuse de vous demander ça - en dix minutes, parce que je n’ai pas le temps. Juste que vous nous donniez des directions de recherche, si on veut voir le rôle de l’image-cristal en science-fiction, qu’est-ce qu’il faut, et comment vous le concevez vous, mais que vous soyez très bref - pardonnez-moi parce que c’est ma dernière séance. On entend mieux ici . ;; . Ah je voulais en parler c’est Providence qui est le plus proche de Biély - ah ! Mon dieu j’ai oublié "Providence" un des plus beaux Resnais [inaudible] ; Bon, vous y allez.

L’ami de Comtesse : « Je suis très heureux d’être ici. Je m’appelle John , [inaudible] et j’écris de la science-fiction. Je n’ai pas publié beaucoup. Mais pour moi, les gens comme Borges, Joyce et Malcom Maurice sont des écrivains de science-fiction. Il y a aussi quelqu’un qui s’appelle Thomas Pintchin, pas du tout connu, même aux Etats-Unis. Il a écrit un gros livre qui s’appelle [Daddy Rain bow...] Il refuse de donner des interviews. On a oublié ce titre, mais lui aussi il fait partie, pour moi, de cette grande... des idées nouvelles. Je regardais le mot cristal dans le dictionnaire, et j’ai trouvé deux choses. Mon dictionnaire c’était un dictionnaire anglais. Mais je crois qu’il faut consulter plusieurs dictionnaires, un après un autre, après un autre, parce que si on consulte un seul dictionnaire, on a une idée, et on a la certitude de quelque chose. Mais si on regarde dans plusieurs dictionnaires, on trouve des choses différentes, et tout d’un coup, on n’est plus certain. Moi je trouve qu’on augmente l’intelligence avec l’incertitude, pas la certitude. Parce que si on est certain de quelque chose, on sait, et on ne comprend plus. Dans mon dictionnaire, j’ai trouvé : la glace et [inaudible]C’était quelque chose... l’étymologie du mot cristal. Et dès ce moment j’ai pensé aussi à Edgar Poe, qui a écrit un livre qui s’appelle Le voyage de [inaudible] Il a écrit une suite de ce livre qui s’appelle quelque chose comme « La pyramide » ou « La maison de glace ». Cette histoire vient d’une vraie histoire. De quelqu’un qui a pensé qu’au pôle sud, il y a un paradis, qu’on va trouver quelque chose, un trou dans la terre, qu’on va trouver dans ce trou un paradis. Et l’état des Etats-Unis a donné de l’argent à cet homme. Il a fait un voyage. Il n’est jamais retourné. Peut-être il a trouvé ce trou, je sais pas. Mais c’était une vraie histoire. Et il y a des gens qui pensent des choses qui sont vraiment folles. Ce matin j’ai pensé, je suis en train de lire un livre qui s’appelle "Comment construire une soucoupe volante" ? Et un autre - c’est très bien, c’es tres intéressant - qui s’appelle « La Vie de Nicolas [inaudible] ». Et ce matin, j’ai regardé dans un...un... vous savez il y a ce petit livre où il y a tout les rues... il y a une rue qui s’appelle la rue d’Edison [inaudible] Il a donné le microscope électronique, et aussi il a donné courant alternatif. C’est Edison qui a donné le courant continu. Lui il a donné le courant alternatif. Il est mort aux Etats-Unis, à New-York, très pauvre. Et quand il est mort, les flics sont venus dans son appartement, et ils ont pris toutes ses notes. Ils étaient je crois du FBI. Ils ont pris toutes ses notes, toutes ses...Et lui, la seule chose qu’il a voulu faire, c’est... Dans ce livre, gros livre, ici il y a tout un chapitre qui s’appelle le cristal-planète, la planète-cristal. [inaudible]Et lui il parle de son génie. Il a voulu, il a voulu... il a fait l’expérience d’avoir de l’électricité pour tout le monde, avec la terre, en creusant un trou dans la terre. Et pour capter l’électricité, je ne sais pas comment il a fait [...] Aux Etats-Unis, dans l’état de New-York, je crois ; il y a eu six ou sept morts, parce que le gens n’ont pas, n’ont pas...une famille de six ou sept personnes est morte parce qu’il n’avait pas payé sa note de l’électricité. Et lui a voulu faire avoir l’électricité à tout le monde »

Gilles Deleuze : Il faut me pardonner de vous interrompre parce que j’ai peur qu’on n’ait pas le temps. Ce que vous dites est bien intéressant. Ce que nous espérions dans la perspective - mais ça déborde beaucoup notre travail de cette année, il faudrait une autre année. Ce dont Comtesse m’avait parlé, c’était un point très précis : la possibilité que vous auriez de nous dire dans quelle direction, et dans quel grand film de science-fiction, apparaissent des thèmes liés au cristal. Il ne vous a pas dit ça, Comtesse ? Il ne vous a pas raconté ça ?

L’ami de Comtesse : « Je commence à écrire une histoire de... [inaudible].. ;c’est quelqu’un à Chicago...[inaudible] qui s’appelle [inaudible]... et lui il fait des photographies avec son cerveau »

Oui, d’accord. Je vois que vous êtes dans tout autre problème que le nôtre, et qui était la science-fiction dans le cinéma, et le cristal. Il semble qu’il y ait eu confusion. Ecoutez, je serai très heureux si l’année prochaine vous avez la gentillesse de revenir un jour, parce que sûrement je parlerai du cerveau l’année prochaine. Mais je vous remercie beaucoup.

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