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40- O3/05/83 - 2
Deleuze - Cinéma cours 40 du 03/05/83 - 2 transcription : Jean-Charles Jarrell 0’00 ... mais, un peu de temps à l’état pur, à mon avis il y en a deux formes... il y en a deux formes. Il y a cette forme de l’agrandissement infini qui défini l’intérieur du temps, et il y a cette forme, là, des... des... des... de l’éternité de vie que tu as définie. Et comment ça s’arrange ? Je suis sûr que ça s’arrange, hein... Intervention : Il me semble que l’insistance du temps retrouvé... G.D : attends, il faut... je suis navré, il faut, il faut que j’y aille, sinon... sinon je suis perdu. I : je te le dis comme ça... c’est un problème chez Pascal... il faut qu’ils soient isomorphes (...) G.D (s’éloignant) : dans le cas de Pascal, oui, mais pas dans le cas de ce dont on parle, pas dans le cas de Proust... bon... soyez sages... attendez moi bien... 1’00 Euh... quand même... c’est intéressant parce que ça nous fait... ça nous fait avancer... faudra... faudra me rappeler que j’ai déjà parlé de Pascal quant à la notion de point de vue, hein... parce que sinon j’oublierai que j’en ai parlé, et puis... si je dis quelque chose qu’on a déjà vu la semaine d’avant, vous me dites, vous me le rappelez, hein, parce que... Oui... oui... oui... pas trop...pas trop long, hein, parce que on a plus beaucoup de temps. Intervention : (longue question avec fort accent hispanique, difficilement audible, sur Pascal, l’intériorité du temps et le noyau psychique) G.D : (un temps) J’sais pas ! (rires) J’sais pas ! Vous me posez une question, heu... j’y ai pas de réponse... non, je me sens pas honteux, moi je ne suis pas censé tout savoir, ou répondre à tout. J’sais pas ! Moi je vous rappelle... je vous rappelle le principe... parce que c’est tellement... c’est généralement à celui qui pose la question d’y répondre, parce que... il n’y a que lui qui sait ce qu’il veut dire... Alors, si vous me dites : « mais enfin, tu parles de l’intériorité du temps, qu’est-ce que c’est pour toi ? », là alors, pour d’autres raisons, je réponds : ah bah... c’est une notion difficile, on avance petit à petit, je ne peux pas donner une définition d’une chose aussi monstrueuse, aussi abominable... j’peux pas... alors je ne peux pas répondre, parce que on ne fait que ça, on essaie de... on essaie de... euh... de sentir vaguement ce que ça peut être que l’intérieur du temps. C’est déjà pas facile de définir l’extérieur du temps, alors l’intérieur... Alors, ce que tu ajoutes sur... je sais pas bien, sur les explosions psychiques ? du noyau psychique ? Comme noyau psychique est pour moi une notion qui n’est pas claire, je sais pas bien... je peux pas te répondre ! Mais je suis sûr que toi tu as des réponses... Tu comprends... c’est bien plus... c’est plutôt ce qu’on fait ici, si ça t’amène... Toi tu as l’idée « noyau psychique », alors, on échange : je te donne « intérieur du temps », « intériorité du temps », tu me donnes « noyau psychique », mais j’sais pas ce que j’en fais, moi ... (rires) ! Oui, là, je peux pas te répondre, vraiment, parce que j’en sais rien, j’en sais rien...
8’30 Intervention de Comtesse : Est-ce que... est-ce que, justement, à partir de la notion de point de vue, dont tu as parlé tout à l’heure, est-ce que maintenir avec Marcel Proust la notion de point de vue, ça n’est pas ramener, justement, le narrateur au point de vue du créateur de romans classiques, c’est à dire au créateur du roman balzacien ?
G.D : Ouais... J’ai un sentiment, pardonne-moi, j’ai quand même un sentiment que, quand tu me flanques toujours « ce qu’il appelle »... qu’est-ce que t’as... répète-moi ce qu’il appelle, parce que ça me paraît une drôle de phrase chez Proust... c’est peut-être vrai... tu dis ce que Proust appelle le pouvoir... ?
12’16 D’accord, je te réponds en deux mots, pour qu’on n’en reste pas là. Je vois bien ce que tu veux dire, ouais... Et ça peut se dire, en effet. Alors, moi je ne sais plus si j’ai... parce que on n’en finirait pas avec les textes... est-ce que j’ai un texte où il dit quelque chose comme - là, je ne cite pas entre guillemets : les essences sont des points de vue. Faudrait que je cherche pour te répondre. Là, j’ai pas, j’ai pas... mais je vais chercher... tu me donnes envie... euh... bon. Mais, c’est évident, là tu peux dire... à mon avis, il n’y aurait pas tellement de problèmes parce que... faudrait dire qu’il y a deux... Dans le roman balzacien, même si l’on peut parler d’un point de vue du romancier, c’est pas du tout au sens que je viens d’essayer de dégager, c’est à dire cette conversion de l’essence à l’état de point de vue... euh... Sauf que, là aussi c’est trop compliqué, ta question elle est trop compliquée pour le moment pour... Parce que je me dis : d’accord, il rompt avec le roman classique... euh... Quel roman classique ? euh...Quel hommage il fait à Balzac ? Qu’est-ce qu’il estime que Balzac a parfaitement trouvé, a parfaitement... ou qu’est-ce qu’il estime que Balzac a parfaitement pressenti ? Quand même, son entreprise à lui, elle a quelque chose à faire avec Balzac qui se ramène pas simplement à une récusation de Balzac, et... il a quelque chose a en retenir, de Balzac. Et je dirai juste que évidemment, ces deux notions de point de vue il me semble, si... ma réponse à ce que tu viens de dire, c’est que ce seraient deux notions de point de vue complètement différentes. Bon, point de vue au sens ordinaire si je dis... point de vue dans un espace euclidien, ça existe, et c’est même ça qui permettra de définir la perspective. Une perspective, dans l’espace euclidien, ça existe tout à fait, hein... mais c’est tout à fait... Et, ça n’empêche pas qu’il y a un monde d’essences, à savoir les essences étant définies, à ce moment-là, comme des personnages stables. En ce sens, je dirais - ce que Proust serait très en droit de dire, je ne sais pas si il le dit...-, quant au roman balzacien, vous voyez bien que les personnages sont traités comme des essences. Bien plus, Balzac lui-même emploie le terme « espèces ». Ce sont des espèces, ce qui ne veut pas dire que ce soient des généralités. Il y a des espèces à un seul membre. Ce sont des espèces à un seul membre, Vautrin, c’est une espèce, hein... Bon, donc je dirais, moi : d’accord, ce que Proust reproche, peut-être -peut-être, sous réserve, à charge pour moi d’aller revoir ses textes que je n’ai pas présents dans l’esprit-, ce serait d’une part d’avoir conservé l’idée d’une essence du personnage, et, deuxième point, d’avoir conçu le point de vue comme une espèce de perspective en espace euclidien. Bon... Ça empêcherait pas que Proust, et à la même époque des auteurs qui n’ont aucun rapport avec lui - parce que là, je ne suis pas entré... en même temps, ce que je dis est très confus, très équivoque... j’ai l’air de favoriser cet...cet appariement qui me révulse, alors que Henry James et Proust n’ont strictement aucun, mais strictement aucun rapport... Ils ont quand même un thème commun qui les poursuit, c’est aussi ce thème du point de vue comme caractéristique du roman alors vraiment post-balzacien, du roman naissance vingtième siècle, hein... C’est donc... je dirais qu’ils se font du point de vue une toute autre conception. A mon avis, c’est parce que, chez Proust, les personnages ne sont plus du tout des essences... alors qu’est-ce qu’ils sont ? Ça c’est... moi je crois que précisément, ils sont des... ils sont des perspectives temporelles, et que ça les a destitués complètement du statut d’essence. Aucun rapport avec Henry James, mais chez Henry James il y a une révolution aussi grande quant au statut du personnage... Non, c’est comme des perspectives temporelles, Charlus, c’est une perspective temporelle, tout ce qu’on a dit sur le démesuré c’est... Les personnages ne correspondent plus, ne sont plus du tout des essences, et en revanche, l’essence, elle est devenue le point de vue, mais le point de vue en un sens tout à fait nouveau, c’est à dire le point de vue au sens de la géométrie projective, ou même de l’Analysis situs. Euh... mais là-dessus, c’est peut-être pas... faudrait... enfin on en reparlera puisque, si tu veux bien... 17’15 Bon, écoutez... bon, on aura pas... Voilà ce que je voudrais juste, alors en deux minutes, regrouper, c’est - une fois de plus -, c’est ce qui me servira pour l’avenir, uniquement mes deux figures du temps, et puis entamer le problème suivant. Plutôt, pas figures du temps, les deux images indirectes du temps. Tout ce à quoi on est arrivé, maintenant, je mélange tout ce qu’on a fait sur le temps et je dis : on en dégage deux directions.
Car les deux images indirectes du temps que nous avons, c’est quoi ? Et ben, pour garder - je reviens à mon souci qui était mon souci de cette année -, ma classification des signes, je dirais ces images indirectes du temps constituent de véritables chronosignes. Ben nous avons deux chronosignes, et là j’ai pas des mots qui me satisfont. Le premier, on l’a vu, c’est l’intervalle ou le présent variable. Je maintiens cette notion car, même si Comtesse ajoute que ça n’épuise pas le problème du présent, dans la mesure où il y a des formes de présent invariable, ces formes là, ou bien je ne les considérerai pas n’étant pas capables de le faire, ou bien on les rencontrera plus tard, peut-être qu’elles feront partie d’un temps direct, je ne sais pas. Je dis juste : moi, ce que j’ai retenu, c’est l’intervalle comme présent variable. L’intervalle de temps. En quoi c’est lié au mouvement ? l’intervalle de temps, comme présent variable, nous donne une unité quelconque de mouvement. C’est l’unité de mouvement. Donc, en fait, il dérive des unités de mouvement, il constitue les unités de mouvement, c’est par là qu’il est relatif au mouvement. L’intervalle ou le présent variable. L’intervalle ou le présent variable -je groupe juste les notions que je retiens- a une limite. (passage effacé)... ça, on l’a pas fait, on peut pas tout faire. Mais je dis, généralement sa vectorisation le précipite. C’est un présent accé...c’est un...c’est un intervalle... c’est un présent variable accéléré. Qu’est-ce qui le remplit ? et ben... ou, il constitue quoi ? et ben... -il constitue pas nécessairement, hein, vous vous rappelez, tout ça c’est des groupements que je fais, mais pas nécessairement. Il peut constituer et se reconnaître à ce qu’on appelle un saut ou un bond qualitatif. Bien... 20’43 Le présent variable accéléré, donc, serait en ce sens la production de la qualité nouvelle. Il est passage d’une qualité à une autre, émergence de la qualité nouvelle. Tiens, alors là, pour te faire plaisir, un dernier plaisir, comme dit Eisenstein, compression et explosion. Bon... Aaahhh... Je dis qu’il a une limite qui est l’instant, c’est très équivoque, comprenez... A un certain niveau d’analyse, à un premier niveau, je peux dire : oui, l’intervalle est entre deux instants. Le présent variable est l’intervalle entre deux instants. A ce moment-là, présent variable ou intervalle supposent la notion d’instant. Je dis : oui, oui, mais c’est pas très intéressant. C’est vrai, l’intervalle suppose la notion d’instant, parce qu’il est intervalle entre deux instants, mais d’une manière abstraite, in abstracto, pas concrète... Pourquoi ? Ça s’oppose pas. Il présuppose pas en fait deux instants, il présuppose le concept d’instant, le concept bipartite d’instant, le concept binaire d’instant. Parce que, concrètement, c’est le chemin inverse, c’est le présent variable qui par son accélération même nous conduit à l’instant. Si bien que concrètement, le présent n’est pas un intervalle entre deux instants, c’est le saut qualitatif qui constitue l’un des instants abstraits à une nouvelle puissance, c’est à dire qui va faire passer un des instants au concret, et un seul. Là, hein, j’aimerais reprendre tout le problème de l’instant, déjà, parce que là j’ai l’impression que je tiens quelque chose. Qui est que : le bond qualitatif, on me dira... - vous comprenez, il n’y a pas contradiction, parce que vous aurez beau me dire « le bond qualitatif, si tu le conçois comme intervalle, t’as déjà mis deux instants, c’est un intervalle entre deux instants », je dis oui, c’est vrai, si vous prenez instant abstraitement. Mais concrètement, - et il faut... -, mais concrètement, le présent variable c’est ce qui tend vers une limite qui est l’instant, à savoir le deuxième instant, et le deuxième instant c’est un instant élevé à la puissance deux, ou ce qui revient au même à la puissance n. Et c’est là, comme instant élevé à la puissance n, qu’il devient concret. En d’autres termes, le présent variable accéléré, c’est la production de l’instant, c’est la production de l’instant concret si vous considérez l’instant concret comme i au carré, ou i puissance n. Qu’est-ce que ça veut dire ? C’est ce que -encore une fois là... là je résume, je reviens sur un thème pour vous le rappeler juste -, c’est ce que Eisenstein a très bien compris, a très bien compris même au niveau de ses images. 24’25 Je reprends l’image fameuse, là, mais le plus vite que je peux, de l’écrémeuse, hein... dans la ligne générale. Il y a un présent : l’écrémeuse dont le tuyau est vide. Et tout le village attend - production de quoi ? de la qualité nouvelle-, la première goutte qui va sortir. La première goutte qui va sortir de l’écrémeuse. Je dirais, là : le présent, c’est le passage de l’écrémeuse montée avec son tuyau vide et on a mis le... on a mis le matériau, à... - c’est en ce sens que je vous rappelle, le présent variable en est composé de toutes sortes de présents, moi je dirais par exemple on n’est pas des explosions, mais une multiplicité de présents variables... bon... voilà... et alors... Bon. Production de la qualité nouvelle, donc là vous avez un présent variable, que vous vivez dans l’attente, comme entre deux battements de cœur, si vous vous dites, quand vous êtes... si vous vous dites « oh... et si ça ne reprenait pas ? » hein ? Ha ! rire amer ! - là-dessus, j’aurais envie de m’écrouler, comme ça... ça reprend pas ! Euh... bah, là-dessus, je ne sais plus ce que je voulais dire, parce que... (rires)... Vous me comprenez, bon, j’attends, j’attends la première goutte de lait. J’attends, bon, que reprenne tout ça : présent variable... Ça se précipite, ça s’accélère, si j’ai couru, là, mon cœur bat très vite, bon, c’est un présent variable. Tout ça c’est des présents variables, les pulsations c’est des présents variables. Bon, alors, cette écrémeuse, elle va marcher ? présent variable. 26’22 La première goutte se forme : l’intervalle apparaît, là, pour ce qu’il est : le bond qualitatif, le saut qualitatif. Surgissement d’une qualité nouvelle. Et voilà : le passage d’un instant à un autre, c’est ça ! C’est ça le secret du bond qualitatif, je dirais.
En d’autres termes, l’instant, c’est comme la vitesse, encore une fois, l’instant c’est toujours i au carré, ou i puissance n. Et je dis, c’est ce que Eisenstein a très bien compris, puisque l’apparition du lait, la production du lait par l’écrémeuse est immédiatement relayée par des puissances qui vont pas du tout prolonger, qui vont élever cet instant à des puissances supérieures. Je veux dire : le passage d’une qualité à une autre ne se fait jamais... n’est jamais un passage simplement matériel, c’est aussi un passage formel. Et le passage formel élève l’instant à des puissances supérieures. Et en effet, dans les images d’Eisenstein, puissance deux c’est que : les flots de lait sont remplacés par des jets d’eau, c’est à dire qu’il donne à l’instant une nouvelle puissance, quelle puissance, cette fois-ci ? La puissance du lumineux. Je suis dans le commentaire d’Eisenstein. Puis remplacés par - ça se fait successivement, mais comprenez, c’est rapporté à l’instant, ce sont les puissances de l’instant... Puis remplacés par des feux, des feux d’artifices, où cette fois, dit Eisenstein, c’est la couleur, c’est la puissance de la couleur qui est atteinte. Puis par des éclairs qui forment des chiffres sur l’écran. Des éclairs lumineux qui forment des chiffres, nouveau passage formel : l’image passe du visible au lisible. On ne voit plus du lait, on ne voit même plus des jets d’eau, on ne voit même plus des feux d’artifices, on lit des chiffres, et le passage du visible au lisible est un bond qualitatif. Mais un bond qualitatif formel. Je dis que dans le présent variable - c’est ça qui...c’est la seule chose qui m’importe -, dans le présent variable il y a nécessairement saut qualitatif, mais que dans ce saut qualitatif, il y a toujours élévation de l’instant à une série de puissances supérieures. On pourrait l’exprimer mathématiquement : i2, i3 et i4, c’est à dire une série de potentialisations. Pour moi, ce serait le premier aspect du temps, et je dirais ce premier signe du temps, c’est le saut. Ça me plait pas bien, parce que le saut, c’est pas un nom de signe... le bond, le saut... mais, je ne vois rien de mieux pour le moment. Faudrait trouver un mot qui renvoie plus à un type de signe, mais enfin... 31’08
35’30 Le temps, c’est avec l’hélice qu’il va l’introduire dans la peinture. Comme si, déjà... vous avez une très belle forme d’hélice chez Delaunay, lorsque vous prenez des demi-cercles par rapport à une verticale, un d’un côté, un autre de l’autre côté, avec tous les effets de couleur, là... Où il va découvrir l’identité, à ce moment-là, de la lumière et de la couleur, et du temps. Bon, mais... ça fait rien tout ça... Or, voyez... je peux dire la grande spirale, je peux dire la grande hélice, mais chez Delaunay - pourquoi j’invoque Delaunay ? parce que c’est, précisément, ce qui va constituer l’âme du nom qu’il crée, ou que des amis à lui créent pour désigner ce qu’il est en train de faire : le simultanéisme.
L’intérieur du temps c’est la spirale, l’hélice des couleurs, le simultanéisme, la simultanéité du futur et du passé, et c’est dans cet intérieur du temps que nous prenons une taille sans commune mesure, ou des dimensions sans commune mesure... avec, et caetera... Bien plus, dans les textes précis de Delaunay, il y en a un qu’on m’a passé, formidable, où il dit, où il oppose la lumière du soleil et la lumière de la lune... Et c’est bien, ça, il est beau ce texte, qu’est-ce qu’il est beau, parce que il dit : Ah, ben voyez... un soleil, c’est le tout. Lumière du soleil : c’est le tout. C’est vraiment le simultanéisme. Mais... mais la lune, elle est formidable, parce qu’elle assure les passages. Le mot y est, tout le temps, revient... Pour la lune, c’est les passages. La lumière lunaire, c’est les passages. Si bien que c’est bien, la lune ce serait le présent variable, le soleil ce serait le simultanéisme, la... Alors, évidemment, en même temps, tout se mélange, vous comprenez... c’est beau les époques, il faut... Et puis nous, notre tâche, quand on réfléchit sur quelque chose, c’est... là où ça se mélangeait... Delaunay était furieux quand on le comparait aux futuristes, et vous comprenez pourquoi, ça...ça se comprend tout seul... C’est que les futuristes, ils veulent aussi le simultanéisme, ils veulent la simultanéité, mais les futuristes, ils conçoivent la simultanéité comme la limite de la vitesse. Contresens ! Abominable contresens pour Delaunay ! Je veux dire, c’est une limite du mouvement cinétique, pour eux, un mouvement qui irait infiniment vite vous donnerait la simultanéité. Donc c’est une limite du mouvement cinétique. En d’autres termes, pour eux, la simultanéité c’est la limite du présent variable, alors que pour Delaunay c’est quelque chose d’absolument différent : c’est pas la limite d’un mouvement cinétique, c’est la totalité du mouvement de la couleur, ou de la lumière. C’est la totalité du mouvement-lumière, ou de la lumière-mouvement, si bien que, c’est...c’est ce qui arrive toujours, en employant les mêmes mots ils ne se sont jamais aussi haïs. Ouais, bon, peu importe... 41’39 Et voilà notre acquis. Mais tout se regroupe très bien. Vous voyez, j’insiste énormément sur ce point :
Et pourquoi c’est la même chose ? Ben... c’est pour ça que j’ai eu besoin, aussi, de passer par Proust, parce que c’est à l’intérieur du temps que nous prenons cette dimension par delà toute commune mesure, que nous devenons vraiment des géants, c’est à dire que...bon... Et, ce tout de temps, je dirais c’est aussi bien les deux figures... c’est à dire que vous pouvez le concevoir de mille manières... c’est les deux figures du sublime, telles que nous les avons distinguées. C’est la figure du sublime mathématique, dont je dirais qu’il est assez proche du simultanéisme type Delaunay, mais c’est aussi la figure du sublime dynamique, dont je dirais cette fois qu’il est beaucoup plus proche de quelque chose qui est radicalement différent de Delaunay, à savoir de l’expressionnisme. Bon... mais enfin... c’est vous dire combien tout ça est... mais, on devrait pouvoir retrouver, pouvoir mettre les choses... 43’14 Et enfin, je passe alors, mais à peine, comme ça... parce que je pensais, euh... je termine, là, où je pensais commencer, c’est bien... On se trouve devant un autre problème, c’est qu’on avait dit des images-mouvement ne se dégagent pas seulement des chronosignes, c’est à dire des images indirectes du temps, s’en dégagent aussi fondamentalement des figures de la pensée. Figures indirectes, ce seront pas des images-pensée... je veux dire : ce seront pas des images... ce seront pas des images trait d’union pensée, ce seront des images de la pensée, des images indirectes de la pensée. Et c’est pas étonnant qu’il y ait un rapport très fondamental entre les figures du temps, entre les images du temps, et les figures de la pensée, bon, c’est... Si bien que ce qui nous reste à faire c’est, pour la pensée, la même chose. La composition des images-mouvement doit nous donner des figures de la pensée. Nous n’avons fait que la moitié de notre tâche, c’est à dire, on a fait la partie figures du... images du temps. Mais les figures de la pensée... Mes deux chronosignes... alors là, cherchons un mot, nous les appellerons... euh pour faire... pour faire... pour faire savant, et puis pour faire un beau tableau des signes, nous les appellerons, conformément au mot grec, des noosignes, puisqu’en grec la pensée c’est le noos, le no-os, des noosignes, n-o-o-signes. On a donc des chronosignes et des noosignes. 45’15 Les chronosignes - évidemment je ne suis pas bien content de mes mots, faudrait en retrouver d’autres -, c’est les sauts ou les bonds d’une part, et d’autre part, la grande spirale ou l’hélice. Ça, c’est un bon signe, parce que c’est pas une figure comme une autre. Quand vous trouvez... quand vous vous trouvez devant une grande spirale ou une hélice, vous pouvez dire : c’est le signe monumental. C’est le signe du monumental, ou c’est le signe du sublime.
Alors des noosignes, il faudra aussi qu’on en trouve, des noosignes... Et je me dis : bah oui, des figures de la pensée, ça veut dire quoi ? Bah ça veut dire des manières de se représenter, comme dit l’autre, ce que veut dire penser. A notre tour, on va pas se demander ce que signifie penser, ou ce que veut dire penser. Nous, on va se demander :
Alors quand même, on se dit : oh, c’est un sujet infini... non, on va pas faire ça comme un sujet infini, on va faire ça aussi en liaison avec notre souci perpétuel de cinéma. On va faire ça avec nos soucis d’esthétique, on ne va pas demander ça aux philosophes, forcément.... c’est pas... ils ont, peut-être qu’ils ont... non, ils n’ont même pas de privilège, là-dessus, les philosophes, hein...ils sont comme tout le monde. On pense tant bien que mal... Je veux dire, on pense tant bien que mal, c’est à dire : chacun pense, pas seulement d’après sa méthode, mais chacun a une certaine figure de la pensée, et on ne peut pas penser sans engendrer par là même... c’est à dire... et, la figure de la pensée, je l’appellerai une manière de penser, et c’est pas du tout la même chose qu’une méthode. Chacun de nous il a sa manière de penser, ou de ne pas penser... Et une manière de penser, mais qu’est-ce que c’est qu’une manière de penser ? Il y a des manières de penser, alors ? On pouvait croire que penser, c’était... Et oui ! Il y a des manières de penser ! C’est pour ça que je crois que, entre personnes qui ont des manières de penser différentes, il n’y a pas de langage commun possible. Seulement, les manières de penser, c’est très curieux : on peut avoir des manières de penser correspondantes d’une civilisation à une autre, et en même temps, à l’intérieur d’une même civilisation, rien... pas commun. Je veux dire ça ne suit pas les différences... ce que j’appelle manière de penser ne suit pas les différences de civilisations, de cultures, de classes, de sociétés... Alors, ça suit quoi ? hein ? ben... peut-être si on arrivait à une réponse, on avancerait, mais il faut encore savoir ce que c’est que ces manières de penser. Manières de penser, manières de penser... bon... je dirais... bah oui... On s’appuie sur... 48’39 Manières de penser, il faut que je les conclue des images-mouvement. Sinon, je tricherais. Et bah oui. Nos analyses précédentes, et notamment nos deux images du temps, nous ont mis sur la voie. Moi je vois des manières de penser, moi je vois des gens dont la manière de penser, hein... c’est... - j’emploie des mots vagues...-, c’est le travail. Et c’est pas mal... parce que, partout il y a du bon et du mauvais, vous savez, hein... Il y a des gens de génie pour qui la pensée est un travail, il y a des idiots pour qui la pensée est un travail, c’est pas ça qui compte... Et en même temps, bizarre, c’est aussi des gens pour qui - c’est peut-être pas tout à fait les mêmes... la pensée est un combat, est une lutte. C’est comme une lutte avec les ténèbres... Oh, mais c’est autre chose que des mots, hein... si c’est une lutte avec les ténèbres, c’est un travail. D’accord. Mais alors, ces ténèbres, c’est quoi ? Il n’y a pas de raison que la pensée ait à lutter avec les ténèbres si il n’y a pas des ténèbres dans la pensée. Ça se complique... Cette manière de penser implique qu’il y a dans la pensée quelque chose qui est capable de nous empêcher de penser. Jusqu’à maintenant, les gens, ils ont souvent dit : "ah oui, ce qui nous empêche de penser, c’est l’extérieur". Ce serait dans la pensée qu’il y aurait quelque chose qui pourrait nous empêcher de penser... Aaahh... tiens... C’est bien possible, à ce moment-là, la pensée serait un véritable combat, mais un combat quoi ? Un combat avec elle-même... Mmm, ça se complique, ça... Elle serait un combat avec elle-même, du coup, je pourrais pas dire que le signe de ça, c’est le duel. Heureusement, parce que le duel, on s’en est servi pour autre chose, c’est un signe d’action. Non, la pensée, elle serait dans un état d’un duel si particulier que ce serait bien autre chose qu’un duel. Son combat avec les ténèbres... enfin... la pensée serait combat. Et pourquoi, qu’elle serait combat ? Pourquoi, qu’elle aurait à être combat ? Et pourquoi, qu’elle aurait à être travail ? Bah je vais vous dire le secret : parce qu’elle serait reprise. Elle serait reprise... Reprise de quoi ? Et ben, elle aurait pour destin d’avoir à reprendre... quoi ? Quelque chose de déjà pensé. Oh, ça devient de plus en plus obscur... Je veux dire, je sais au moins comment j’appellerai ça, alors, un tel signe, où la pensée reprend quelque chose qui est déjà pensé, et naît comme pensée parce que... Donc la pensée qui renvoie perpétuellement à un présupposé, et qui se définit comme le recommencement de ce qu’elle présuppose. Et elle a à recommencer ce qu’elle présuppose, et c’est là sa lutte, c’est là son combat. Dieu merci, j’appellerai ça alors une contremarque. Et la contremarque, ce serait le premier des noosignes. Vous vous reporterez dans votre dictionnaire, pour voir ce que ça rappelle, une contremarque... Je ne vous le dit pas, je le dirai la prochaine fois. Hein ? mais... comme ça. Et pourquoi je dis ça ? Vous sentez tout de suite... Dans cette manière de penser, un des exemples c’est évidemment la dialectique. Et ce que je suis en train de définir, c’est la dialectique. Et pourquoi, que... 52’58 Evidemment, chacun sait que la dialectique c’est le travail comme travail du négatif, dans la pensée, et chacun sait que la dialectique, c’est le combat, hein... dans l’opposition. Le combat des opposés et le travail du négatif... bon... Mais je dis, en fait... en fait, le vrai signe de la pensée dialectique, c’est la contremarque, pourquoi ? parce que voilà, je pourrais presque terminer là-dessus, comme ça... j’entame à peine, c’est pour lancer la prochaine fois. La pensée a toujours pensé un déjà... déjà quoi ? Ce déjà que la pensée avait toujours déjà pensé se nomme principe d’identité, et il s’exprime... ce présupposé de la pensée s’exprime... - c’est bien le présupposé de la pensée -, il s’exprime sous la forme célèbre : « A est A ». A est A... Qu’est-ce que dit la dialectique ? Il faut être un imbécile - justement, je ne cite personne, personne... ça ne peut venir à la tête de personne ! -, il faut être un singulier imbécile pour croire que la dialectique dit « A est non-A ». Euh...pourquoi ? euh...parce que... Lewis Carroll peut dire A est non-A, pour nous faire rire, c’est même ce qu’on appellera un non-sens. Mais Lewis Carroll a son génie, qui n’est pas dialectique. En revanche, personne, en tant que philosophe, à moins... pour vouloir faire rire, ne dira A est non-A, et jamais il n’est arrivé à Hegel ni à Marx de dire A est non-A. Ce qu’il dit, c’est quelque chose d’infiniment plus profond, et qui pourtant vous étonne moins. Ce que Hegel dit, c’est : A n’est pas non-A. Vous me direz : bah c’est pas très fort, alors, Hegel... Et ben si, c’est le coup de génie de Hegel. Le coup de génie de Hegel est d’avoir dit A n’est pas non-A . Bon... ce serait ça, le coup de génie de Hegel ? Bah oui ! Pourquoi c’est ça le coup de génie de Hegel ? Parce que, que A ne fût pas non-A, avant Hegel, tout le monde le savait et personne n’y attachait la moindre importance. Ce qui importait aux gens, c’était que A fût A. Quand Hegel dit « A n’est pas non-A », il est le premier à prendre au sérieux ce principe bien connu, c’est à dire à lui donner une valeur logique et ontologique.
58’20 A n’est pas non-A... et voilà, Hegel n’en demande pas plus. Surtout, il ne demandait pas que A fût non-A, pour une raison simple : il n’était pas idiot. Il demandait que A ne fût pas non-A. Et il allait prendre toute la philosophie à la gorge à partir de là en disant : vous ne vous rendez pas compte, vous vous en êtes toujours tenus au principe d’identité comme présupposé, mais ce qu’il fallait c’était produire le principe d’identité, c’était le reproduire dans les choses. Or vous n’aviez pas le moyen de le reproduire dans les choses, vous vous le donniez comme un présupposé, vous n’aviez pas le moyen de le reproduire. Seul le principe de non-contradiction vous permet de faire passer le principe d’identité dans les choses. Si A est A, c’est parce que A n’est pas non-A, et c’est A en tant qu’il n’est pas non-A qui va produire A en tant qu’il est A. En d’autres termes, le principe de non-contradiction est la contremarque du principe d’identité. Il fait passer l’identité dans le réel, et la philosophie avant Hegel a été abstraite, elle n’a jamais touché au concret - là, c’est Hegel qui parle -, parce que elle n’a pas su faire passer l’identité - l’identité dont elle se réclamait -, elle n’a pas su la produire dans les choses. Dès lors, elle était pure abstraction. Elle était métaphysique, et Hegel est le premier, à part les empiristes, qui propose - ou qui pense achever Kant -, à savoir la transformation de la métaphysique en logique, ou en ontologie. 60’35 Bon... c’est compliqué... ça a l’air très simple, mais c’est très, c’est très très... c’est un truc très très curieux. Vous comprenez, la dialectique, c’est... - je reviens là-dessus -, c’est ça... c’est ça... et c’est par là que c’est un travail.
64’28 Si vous comprenez ça, vous avez tout compris de Hegel, et de son coup... et de son coup de génie et ce par quoi c’est un grand philosophe. Bon alors, je dis juste ça, voilà... J’appellerai - du coup j’ai presque justifié -, moi j’appellerai contremarque une telle image de la pensée. Et puis vous avez d’autres types, tout à fait différents... Oh... Oh la la... Vous en pouvez plus, oh bah je vais très vite (une voix : si, si...). On risque de les confondre avec les premiers, mais c’est tout à fait autre chose. Vous avez des types, et là aussi c’est le pire et le meilleur, car Dieu que ces métaphores ont engendré des œuvres médiocres... Vous avez des types pour qui penser, c’est pas travailler, c’est... c’est pas, non... c’est pas... c’est pas combattre, c’est pas lutter. C’est... - et ils se détestent, on sent qu’ils vont détester les autres -, c’est... je lance un premier mot : la lumière ne combat pas les ténèbres. Qu’est ce que c’est que cette histoire ? Il y a des gens qui disent : mais de quoi tu parles ? La lumière combat les ténèbres, mais où t’as vu ça ? Où t’as vu ça, toi, tu vis comme ça ? Tiens, tu penses comme ça ? La lumière, alors elle combat les ténèbres... Il dit : moi, je vois pas ça comme ça, moi... Moi, je dirais plutôt -ils disent- le clair et le sombre, ou la lumière et les ténèbres, alternent. En quoi que c’est un combat ? Il dit : oh, c’est une alternance... tiens, c’est : ou bien, ou bien... ou bien il fait jour, ou bien il fait nuit, c’est une alternance, bah... pourquoi que t’appelles ça un combat ? T’es... t’es... ça va pas ta tête, tu vois des combats partout, toi... (rires) Ah bon ? Tiens... C’est une alternance... Remarquez que Hegel déteste ça... (rires) Quand il veut critiquer un de ses rivaux, pourtant... ou un de ses maîtres, il dit : « il a réduit le travail du négatif à une simple alternance » (10 secondes manquantes). ... alternance de lumière et d’ombre. C’est pas du tout la même conception de la lumière, c’est pas du tout la même conception de la couleur, c’est pas du tout la même conception de tout sur... et caetera... Et puis, c’est les mêmes gens qui disent : bon, allez... je parie, pile ou face ? nuit ou jour ? pile ou face ? Comme dit l’un d’entre eux parmi les plus grands : crois ou pile ? crois ou pile... Admettons... C’est plus tout à fait alternance, c’est alternative. Et voilà que penser, pour eux, c’est faire l’alternative, c’est poser l’alternative, poser le « ou bien, ou bien ». Poser le « ou bien, ou bien », dans quelle situation qu’on se trouve, alors... ça... ça devient comique, toute cette affaire. On appellera ça... j’ai mon signe, pour ce type de pensée, je dirais c’est le pile ou face. C’est un signe, pile ou face. Il est bien connu que les gens, là, de l’alternance ou de l’alternative, à première vue ce sont des joueurs. Voilà qu’ils conçoivent alors la pensée comme jeu. Souvent des choses ... le... le... le joueur... la pensée joueur... il y a eu des choses que... bon... il y a du bon et du mauvais partout... hein... pensée comme jeu... qui ont été dits et répétés... Ce qui me paraît bizarre, c’est que c’est parfois dit par des dialecticiens. Alors là, je ne comprends plus ce qu’ils veulent dire parce que... euh... la dialectique c’est pas du jeu, c’est vraiment pas du jeu. C’est... c’est... c’est le contraire... c’est le contraire, c’est du travail comme je viens... c’est... c’est de la contremarque, c’est pas du pile ou face. 69’03 Ça devient un peu plus sérieux lorsque, que ce soit Nietzsche, ou que ce soit du côté de Mallarmé, on entend des thèmes... que la pensée, c’est émettre un coup de dés... Il y a un coup de dés dans la pensée. Là, on sort de la métaphore du jeu. Là, on sent qu’on est plus dans la dialectique. Ou bien d’autres, pour qui c’est crois ou pile, et ça c’est une tradition, ça forme une tradition... Et parfois, on les mélange avec les dialecticiens, et l’on parle, par exemple, d’une pensée dialectique chez Pascal. Pascal n’a rien à voir... ça a été longtemps... par exemple, toute l’interprétation que Lucash et Goldmann ont donné de Pascal, Pascal dialecticien avant la lettre, penseur dialectique par excellence... Et là aussi, c’est une force de Serres, alors, d’avoir dit : mais...mais... il faut ne pas savoir un mot de mathématiques pour penser que la pensée de Pascal est dialectique... ça... elle est tout ce que vous voulez sauf... Pourquoi, il faut ne pas savoir un mot de mathématiques ? Parce que tous les passages de Pascal qu’on invoque pour conclure que Pascal est dialecticien, ou a un pressentiment de la dialectique, c’est des passages qui s’expliquent d’un tout autre point de vue par les références mathématiques explicites que ces passages comportent. Alors, à coup sûr, c’est une pensée pas ordinaire, la pensée de Pascal, mais la rapprocher de la dialectique est un non-sens. Et ça, je crois... alors là il faut faire hommage à Serres de l’avoir très très très bien montré, hein... Vous comprenez, d’après ce que je viens de dire, la dialectique c’est pas le pour ou le contre. Le pour ou le contre, ça c’est un mode de pensée tout à fait différent, c’est l’alternance et l’alternative. Et je dirais que cette pensée, donc, de pile ou face, ce second noosigne, vous le trouvez chez qui ? Et bah, vous le trouvez... mettons, chez Pascal. Vous le trouvez chez Kierkegaard. Vous le trouvez éminemment chez Sartre. Un chrétien catholique, d’une extrême violence, un réformiste, un athée. Curieux, ça... parce qu’on aura à voir... bon... Le texte de base, pour nous,là, ce sera le pari. Ce sera le pari de Pascal, qu’est-ce qu’il veut dire, de quoi il s’agit là-dedans... Mais, vous voyez pourquoi on en aura besoin... 72’20 Donc, je résume, nous en sommes là, il va falloir que l’on creuse un peu cette histoire de Hegel et de la pensée comme contremarque, j’en suis là... et que l’on approfondisse l’autre aspect, la pensée alternance-alternative. Ce seraient nos deux figures, nos deux figures fondamentales de la pensée. |
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