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10- 17/02/81 - 2

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Gilles deleuze - Spinoza cours 10 du 17/02/81 - 2 transcription : Vanessa Soubiran

- Georges Comtesse : la possibilité même de voir l’eïdos comme conditionné par la séparation de l’âme et du corps sensible...

Gilles Deleuze- oui ah ben non je croyais que tu m’avais.. c’est peut être que j’ai été trop vite... je veux dire ça c’est la lettre du texte, tu as complètement raison.. L’eidos est saisie par l’âme. et ça nous dit encore rien. L’eidos, l’idée pure n’est évidemment saisissable que par l’âme pure. Ma question est tout à fait autre.. A savoir que comme l’âme pure, nous ne pouvons en parler, selon Platon lui-même, que par analogie vu que notre âme, nous ne l’expérimentons qu’en tant qu’elle est liée à un corps, nous ne pouvons en parler que par analogie. Donc, du point de vue de l’analogie, j’aurais toujours à me dire : d’accord, c’est l’âme pure qui saisit l’idée pure. Rien de corporel là dedans. C’est une saisie purement intellectuelle ou spirituelle. Mais cette âme pure qui saisit l’idée, est-ce qu’elle procède à la manière d’un oeil - "à la manière de" - ou est-ce qu’elle procède aussi à la manière d’un toucher ? Toucher qui serait alors purement spirituel, tout comme "oeil" qui serait purement spirituel.

-  Cet oeil c’est le troisième oeil. tout comme ce toucher ce serait le onzième doigt. Ce serait "manière de dire", mais il faut bien l’analogie. Il faut bien à Platon des raisonnements analogiques. Alors toute ma remarque consiste à dire : l’âme pure elle n’a pas plus, en toute réalité, d’oeil que de toucher, elle est en rapport avec les idées. tu as complètement raison mais ça n’empêche pas que le philosophe, pour parler précisément de cette appréhension de l’idée par l’âme, doit se demander quel est le rôle - on dirait, toujours pour parler grec - d’un analogon d’oeil et d’un analogon de toucher ? Un analogue d’oeil et de toucher dans la saisie de l’idée. A quoi je réponds. Il y a bien ces deux analogues car l’idée est constamment dit vue par l’âme encore que l’âme n’est pas Dieu mais en même temps, cette idée pure forme vue par l’âme, n’est vue par l’âme que dans la mesure ou elle se réfère aussi à un contour qui est élément constituant de la forme vue et ce contour renvoie à un analogue de toucher.
-  d’accord ? pas tout à fait ?
-  Comtesse : la limite ce n’est pas simplement le contour, c’est aussi la force qui contient (inaudible) que Platon ressent comme une puissance démoniaque, (inaudible - GDon est d’accord la puissance terrifiante qui a provoque l’union mortelle du corps et de l’âme dont la philosophie est la séparation..

- Oui mais alors tu me dépasses en me donnant encore plus raison que je n’aurais voulu avoir raison. Cela revient à dire attention ; Platon a un pressentiment d’une toute conception de la limite qui ne serait plus la limite contour mais elle précisément elle lui parait plus ou moins démoniaque ; tout dépend des textes -d’accord - et c’est ce monde qu’il faut à la fois conjurer et comtempler il s’en sauvera par le contour même si il y a chez lui des textes qui prépare une tout autre conception de la limite je croyais que tu allais foncer là dessus par que c’est très important là Comtesse il vient de me donner un exemple où il corrige de lui même ce que je dis. En effet c’est tellement plus compliqué ? d’accord je ne dis pas une vérité absolue mais ce qui me parait une tendance de cette pensée grecque. Mais c’est toujours plus compliqué que ce que l’on dit. C’est ça cette conception de

-  Ça c’était la première conception de la limite-contour. Or qu’est-ce qu’il se passe lorsque, pour que quelques siècles plus tard, on se fasse de la limite une tout autre conception, et que les signes les plus divers nous en viennent ? nous en viennent de tous les côtés si bien que je numérote mes exemples :

-  Premier exemple avec les stoïciens Premier exemple. Les stoïciens s’en prennent très violemment d’après les textes d’eux qui nous restent, à Platon s’en prennent violemment à patonet je vous demande dans tous les exemples que je vais prendre d’avoir vous, en arrière pensée que peut être ça va culminé tous ces courants avec Spinoza. Premier exemple les stoiciens. Les stoïciens, ce ne sont pas les Grecs, ils sont au pourtour du monde grec. On pourrait toujours raffiner et dire que ça va être important. Ils sont sur les contours du monde Grec. Et ce monde grec a beaucoup changé aussi, il a tellement crevé à la lettre sous le thème de la rivalité des cités déterminéesque il y a eu le rève d’Alexandre Il y a eu un problème du monde grec, comment faire le monde grec ? c’était autre chose que comment faire l’Europe chez les grecs, ça engageait plein de choses, on ne peut pas comprendre Aristote ou les neo-platoniciens si vous n’avez pas de vagues idées sur tout ce qui se passe dans l’histoire à ce moment là.

-  Voilà que ces stoïciens qui sont à peine des grecs qui sont à moitié des barbares, qui sont vraiment des drôles de gens ces stoîciens, attaquent Platon, et à partir de quoi ? pourtant c’est pas que Platon manquait d’idées déjà venues de L’Orient, c’étaient pas les mêmes faut croire, ou alors il y a un nouveau flux oriental. il y a un grand auteur allemand qui a fait un livre qui est une merveille et qui s’appelle "la Grèce entre les bras de l’orient", pour désigner cette époque, cette époque qui commence avec l’ancien stoïcisme. C’est un beau titre :"la grèce entre les bras de l’orient" Ces grecs pas grecs, ces stoiciens qu’est ce qu’ils disent ?
-  Les stoïciens nous disent c’est bizarre, Platon et les Idées, ce n’est pas cela qu’il nous faut, c’est une conception insoutenable. Finalement ils disent, le contour de quelque chose qu’est-ce que c’est ? C’est du non-etre disent les stoiciens. Le contour de quelque chose, c’est l’endroit où la chose cesse d’être. Le contour du carré ce n’est pas du tout là où est le carré. Vous voyez comme c’est fort comme objection. Les grandes objections elles sont touours trés simples. Ils prennent à la lettre ce platonisme que j’ai esquissé très sommaire, à savoir : la forme intelligible c’est la forme rapportée à un pacte spirituel, c’est à dire c’est la figure rapportée au contour. Ou bien l’expérience du sculpteur Ils diront aussi bien, contre Aristote, mais l’exemple du sculpteur c’est complètement artificiel, le moule du sculpteur. C’est pas naturel ! La nature n’a jamais procédé par moulage. Ce qui a l’air très simple mais ce qui est fort, quand on arrive à dire de quelqu’un : ah bien oui il prend des exemples mais ces exemples ne sont pas pertinents. Si on veut comprendre quelque chose aux problèmes de limites, on ne peut pas prendre le cas du sculpteur puisque le problème du sculpteur c’est un problème de pur artifice à savoir mouler quelque chose. Dans quel cas est-ce que la nature procède avec des moules ? elle procède pas avec des moules la nature il faudrait les compter, c’est sûrement dans les phénomènes superficiels que la nature procède avec des moules.
-  Ce sont des phénomènes dits superficiels précisément parce qu’ils affectent les surfaces, mais la nature, en profondeur, ne procède pas avec des moules. Par exemple quand j’ai le bonheur d’avoir un enfant qui me ressemble, Je n’ai pas envoyé un moule. Remarquez que des biologistes se sont accrochés à l’idée du moule, jusqu’au 18ème siècle. Ils ont insisté sur le spermatozoïde analogue à un moule, ce n’est pas bien raisonnable. Buffon là-dessus avait de grandes idées ; tiens ça me fait dériver mais ça fait rien : il disait que si l’on veut comprendre quelque chose à la production du vivant, il faudrait s’élever jusqu’à l’idée d’un moule intérieur. Formidable ça ! Le concept de Buffon "moule intérieur" pourrait nous servir. Ça veut dire quoi ? C’est gênant parce qu’on pourrait aussi bien parler d’une surface massive. Il dit que le moule intérieur c’est un concept contradictoire. Il y a des cas où on est forcé de penser par concept contradictoire. Le moule, par définition, il est extérieur. Il concerne les surfaces. On ne moule pas l’intérieur. Si vous moulez l’intérieur c’est que vous avez mis l’intérieur à l’extérieur C’est dire que, pour le vivant déjà, le thème du moule ne marche pas. Pourtant il y a bien une limite du vivant. Les stoïciens sont en train de tenir quelque chose de très fort, la vie ne procède pas par moulage. Aristote a pris des exemples artificiels. Et sur Platon ils se déchaînent encore plus sauvages, les stoïciens : ils disent mais vous comprenez l’idée du carré, comme si c’était sans importance que le carré soit fait en bois, ou en marbre, ou en ce que vous voulez. Mais ça compte beaucoup. C’est un sale truc, disent les stoïciens Quand on définit une figure par ses contours, à ce moment là tout ce qui se passe à l’intérieur c’est pareil. C’est à cause de ça, disent les stoïciens, que Platon a pu abstraire l’idée pure. Ils dénoncent une espèce de tour de passe-passe. C’est très injuste quant à Platon .

-  Moi ce qui m’intéresse c’est pas si c’est juste ou pas quant à Platon c’est : qu’est ce qu’ils ont à dire eux ? et là cela cesse d’être simple ce qu’ils ont à dire. Comprenez ils sont en train de se faire de la limite une tout autre image. Quel est l’ exemple, qu’est ce qu’il vont opposé au sculpteur d’Aristote c’est à dire au moule extérieur, à la figure optique-tactile ? Ils vont opposer des problèmes de vitalité. Problèmes de vitalité de quel type : Où s’arrête l’action ? tiens ce n’est pas " où s’arrête la forme ?" , réponse : "au contour". Ce n’est pas qu’ils contredisent ça. Mais çà, ça n’a aucun intérêt de dire ça. Ps intéressant. La question ce n’est pas du tout où s’arrête une forme, parce que c’est déjà une question abstraite et artificielle. La vraie question c’est : où s’arrête une action ? Or la vous n’allez pas pouvoir designer les contours. Qu’est ce que ça veut dire ça ?

-  deuxième exercice pratique : Toute chose a-t-elle un contour ? bibliographie de l’exercice pratique : un grand auteur américain actuel qui s’appelle Bateson a écrit dans un livre en deux tomes récemment traduit en français, un très beau livre qui s’appelle : "vers une écologie de l’esprit" où il y a un texte admirable sur le langage des dauphins et toutes sortes d’autres choses à la fois récréatives et instructrices.

-  C’est un génie Bateson, c’est un très grand homme. Et bien, il y a un tout petit texte très amusant qui s’appelle "toute chose a-t-elle un contour". Il prend des exemples, il parle avec sa fille qui n’est pas très mâline. Il dit : et bien oui tu vois on parle en ce moment, est ce que notre conversation a un contour ? C’est intéressant ça parce que lorsqu’un prof vous reprochait, du temps où vous en faisiez encore mais ça va revenir, du temps où vous faisiez des devoirs, des dissertations, lorsqu’un prof vous reprochait de sortir du sujet.

-  Hors du sujet, prenons à la lettre, en dehors du sujet. Est-ce que ça veut dire que le sujet a un contour ? Peut-être. Sinon est-ce que ça voudrait dire hors limites ? Est ce que c’est spatial ? A première vue ça a l’air spatial. Mais est-ce que c’est le même espace ? Est-ce que le hors limites et le hors du contour, est ce que c’est le même espace ? la conversation ou mon cours d’aujourd’hui a t il un contour ? Ma réponse est oui . il a un fort contour. On peut le toucher. On a aborder ce problème un peu : est ce que toute forme picturale a un contour ? Pas sûr !

-  En fin revenons à ces stoïciens. J’oublie Bateson, voyez c’était un problème : Quels sont les sens différents de "hors du sujet"
-  c’est notre deuxième exercice pratique. Donc dans la semaine prochaine vous devez me remettre deux exercices pratiques. N’oubliez pas et dessinez le contour d’une conversation , vous verrez si il vous faut un trait fermé ou pas ; Qu’est ce c’est leur exemple favori c’est : jusqu’où va l’action d’une graine ? c’est bon ça rudement bon ! une graine a une limite mais une limite de quoi ? pas de figure quand même ? Si elle a bien un contour une graine mais ce n’est pas de ça dont il est question ? sans doute alors est ce qu’il y aurait deux limites ? la graine je peux bien avec mon doigt en suivre le contour mais qu’est ce j’aurai saisi de la graine ?

- Lorsque j’apprends ensuite qu’une graine perdue dans un mur est capable de faire sauter ce mur. Ah la graine de tournesol fait sauter mon mur. Une chose qui avait un si petit contour. Jusqu’où va la graine de tournesol, est-ce que ça veut dire quelle est sa surface ? Non, disent les stoïciens la surface c’est là où se termine la graine. Dans leur théorie de l’énoncé, ils diront que ça énonce exactement ce que la graine n’est pas. C’est à dire là où la graine n’est plus, mais sur ce qu’est la graine, ça ne nous dit rien. Ils sont très fort quand à Platon. Ils vont arriver et Ils diront de Platon que, avec sa théorie des idées, il nous dit très bien ce que les choses ne sont pas, mais il ne nous dit rien sur ce que sont les choses. Les stoïciens lancent triomphants : les choses sont des corps. Des corps et pas des idées. Les choses sont des corps ça veut dire que les choses sont des actions. La limite de quelque chose c’est la limite de son action et c’est pas le contour de sa figure. exemple encore plus simple :
-  Vous marchez dans la forêt touffue, en d’autres termes dans la forêt puissante vous avez peur. Enfin vous arrivez et petit à petit, la forêt s’est éclaircie, vous êtes content. Vous arrivez à un endroit et vous dites "ouf, voici la lisière". La lisière de la forêt c’est une limite. Est-ce que ça veut dire que la forêt se définit par son contour ? C’est une limite de quoi ? Est-ce une limite de la forme de la forêt ? on peut le dire , c’est pas qu’on puisse pas le dire mais c’est un genre de limite qui est mal défini comme limite de la forme de la forêt. C’est une limite de l’action de la forêt, c’est à dire que la forêt qui avait tant de puissance arrive à la limite de sa puissance, elle ne peut plus mordre sur le terrain, elle s’éclaircit. Elle s’éclaircit.

Ce qui montre que ce n’est pas un contour, c’est que vous ne pouvez même pas assigner le moment précis où ce n’est plus la forêt. Est ce que vous étiez déjà dans les sous bois, comment vous êtes passé de la forêt au sous bois et du sous bois au taillis, tout ça j’ai pas besoin de me forcer beaucoup pour dire : Il y avait tendance, et cette fois la limite n’est pas séparable, une espèce de tension vers la limite.

C’est une limite dynamique qui s’oppose à la limite contour. La chose n’a pas d’autre limite que la limite de sa puissance ou de son action. La chose est donc puissance et pas forme. La forêt ne se définit pas par une forme, elle se définit par une puissance : puissance de faire pousser des arbres jusqu’au moment où elle ne peut plus. D’où la seule question que j’ai à poser à la forêt ce n’est pas : quelle est ta figure et quels sont les contours ? La seule question que j’ai à poser à la forêt c’est : quelle est ta puissance ? C’est à dire : jusqu’où iras-tu ?

-  Voilà ce que les stoïciens découvrent et ce qui les autorise à dire : tout est corps. Lorsqu’ils disent que tout est corps, ils ne veulent pas dire que tout est chose sensible, parce qu’ils ne sortiraient pas du point de vue platonicien. Si ils définissaient la chose sensible par forme et contour, ça n’aurait aucun intérêt.

Lorsqu’ils disent que tout est corps, ils veulent dire des choses très simples par exemple un cercle ne s’étend pas dans l’espace de la même façon s’il est en bois ou en marbre. Bien plus, tout est corps, signifiera qu’un cercle rouge et un cercle bleu ne s’étendent pas dans l’espace de la même façon. Donc c’est la tension. Chose que tous les peintres savent très bien

Quand ils disent que toutes les choses sont des corps, ils veulent dire que toutes les choses se définissent par "tonos", l’effort contracté qui définit la chose. Si vous ne trouvez pas l’espèce de contraction, la force embryonnée qui est dans la chose, si vous ne la trouvez pas, vous ne connaissez pas la chose. Ce que Spinoza reprendra avec l’expression "qu’est-ce que peut un corps ?"

-  Deuxième exemple. Après les stoïciens, au début du christianisme, et pourtant pas forcément chez des auteurs chrétiens, se développe un type de philosophie très extraordinaire : l’école néo-platonicienne.Et là je voudrais montrer que le préfixe néo est particulièrement bien fondé. C’est en s’appuyant sur des textes de Platon extrêmement importants que les néo-platoniciens vont complètement décentrer tout le platonisme. Si bien que, en un certain sens, on pourrai dire que ça y était déjà chez Platon. Seulement ça y était comme pris dans un ensemble qui n’était pas celui-là. Un des plus grand platonicien Plotin, on en a recueilli les Ennéades. Parcourez l’Ennéade quatre, livre cinq de la quatrième ennèe. Vous verrez une espèce de prodigieux cours ou discours ou méditation poetique sur la lumière. Texte admirable, Texte prodigieux où Plotin va essayer de montrer que la lumière ne peut être comprise ni en fonction du corps émetteur, ni en fonction du corps récepteur. Et son problème c’est : la lumière fait partie de ces chose bizarres qui vont être, pour Plotin, les vraies choses idéales.( Là il y a une espèce de courcircuitage de Platon très étonnant.)La lumière fait partie de ces choses idéales dont on ne peut plus dire qu’elle commence là et qu’elle fint là. Où commence une lumière ? Où finit une lumière ? quelle histoire

Pourquoi ne pouvait-on pas dire la même chose trois siècles plus tôt ?

Pourquoi est-ce dans le monde dit alexandrin que font proliférer ces méditations sur la lumière pure ? C’est un manifeste pour un monde optique pur. La lumière n’a pas de limite tactile, et pourtant il y a bien une limite. Mais ce n’est pas une limite telle que je pourrais dire ça commence là et ça finit là. Je ne pourrais dire ça. En d’autres termes, la lumière va jusqu’où va sa puissance.en d’autres termes Plotin

Plotin est hostile aux stoïciens, il se dit platonicien. Mais il pressentait l’espèce de retournement du platonisme qu’il est train de faire. C’est avec Plotin que commence, en philosophie, un monde optique pur. Les idéalités ne seront plus que optiques. Elles seront lumineuses, sans aucune référence tactile. Dès lors la limite optique est d’une toute autre nature. La lumière fouille les ombres. Est-ce que l’ombre fait partie de la lumière ? Oui, elle fait partie de la lumière et vous aurez une gradation lumière-ombre ou ombre lumière qui développera l’espace. Ils sont en train de trouver que, plus profond que l’espace, il y a la spatialisation. Ça Platon ne le savait pas.

art des nuances Si vous lisez les textes de Platon sur la lumière, "la République", fin du livre 6, et, en face les textes de Plotin, il fallait quelques siècles entre un texte et l’autre.

Il faut ces nuances. Ce n’est plus le même monde.

Vous le savez de certitude avant de savoir pourquoi, que la manière dont Plotin extrait ses textes de Platon, développe pour lui-même un thème de la lumière pure. Ça ne pouvait être platonicien. Encore une fois, le monde de Platon n’était pas un monde optique, mais un monde tactile-optique. La découverte d’une lumière pure, de la suffisance de la lumière pour constituer un monde, cela implique que, sous l’espace, on ait découvert la spatialisation. Ça n’est pas une idée platonicienne, pas même dans le "Timée".

L’espace saisi comme le produit d’une expansion, c’est à dire que l’espace est second par rapport à l’expansion et pas premier. L’espace est le résultat d’une expansion, ça c’est une idée trés bizarre qui à mon avis pour un Grec classique, serait incompréhensible.

C’est une idée qui vient d’Orient. Que la lumière soit spatialisante : ce n’est pas elle qui est dans l’espace, c’est elle qui constitue l’espace. Ce n’est pas une idée grecque.

Il faut qu’en vous lisiez de la philosophie Encore quelques siècles après éclate,( je vais allez vite car c’est comme un confirmation), une forme d’art qui a une très grande importance, l’art byzantin. C’est un problème pour les critiques d’art que de rechercher en quoi, à la fois l’art byzantin reste lié à l’art grec classique et en même temps et d’un autre point de vue rompt complètement avec l’art grec classique. Si je prends le meilleur critique à cet égard, Rigel, il dit une chose rigoureuse, c’est un des meilleur spécialiste de l’art byzantin dans l’art grec vous avez un primat de l’avant-plan. La différence entre l’art grec et l’art égyptien, c’est que dans l’art grec se fait la distinction d’un avant-plan et d’un arrière-plan, tandis que dans l’art égyptien, en gros, les deux sont sur le même plan. tout le bas relief egyptien Le bas-relief. Je résume très sommairement. L’art grec c’est le temple grec, c’est l’avènement du cube. Le cube : six faces. Tandis que Les égyptiens c’était la pyramide, des surfaces planes. Où que vous vous mettiez vous êtes toujours sur une surface plane. la pyramide, c’est diabolique car c’est une manière de cacher le volume. Ils mettent le volume dans un petit cube qui est la chambre funéraire, et ils flanquent des surfaces planes, des triangles isocèles, pour cacher le cube. Les égyptiens ont honte du cube. Le cube c’est l’ennemi, c’est le noir, l’obscur, c’est le tactile.

Les grecs inventent le cube. ils ont pas honte du cube, eux Ils font des temples cubiques, c’est-à-dire qu’ils décalent l’avant-plan et l’arrière-plan. Mais, dit Rigel, il y a un primat de l’avant-plan, et le primat de l’avant-plan est lié à la forme parce que c’est la forme qui a le contour. primat de l’avant plan, C’est pour ça qu’il définira le monde grec comme un monde tactile-optique. vous me suivez ? Les byzantins c’est très curieux. Voyez les mosaïques ils les nichent, ils les flanquent dans des niches, ils les reculent. trés rigolo ça ! et l’espace ? Comme on dit il n’y a pas de profondeur dans l’art byzantin, pourquoi il n’y a pas de profondeur dans l’art byzantin et pour une raison très simple, c’est que la profondeur, elle est entre l’image et moi. Un des drame de l’art byzantin , c’est un drame moderne à savoir c’est à cause de l’appareil photo, tout est venu des méfaits de la photo, on photographie les mosaïques c’est à dire on va se mettre à dix centimètres c’est une honte ! il faudrait tuer les photographes ! par définition c’est le contre sens puisque toute la profondeur byzantine, c’est l’espace entre le spectateur et la mosaïque. Si vous supprimez cet espace c’est comme si vous regardiez un tableau hors de toute condition de perception, c’est odieux. En d’autres termes, les byzantins l’air de rien, font un coup de force énorme. A savoir ils mettent le privilège dans l’arrière-plan, et toute la figure va sortir de l’arrière-plan. Toute l’image va sortir de l’arrière plan. Mais à ce moment-là, comme par hasard, la formule de la figure ou de l’image ce n’est plus forme-contour. Forme-contour, c’était pour la sculpture grecque. Ce n’est plus forme contour. Et pourtant il y a bien une limite, et pourtant vous me direz il y a bien des contours même dans les mosaïques, mais ce n’est pas ça qui agit, c’est pas ça qui est interessant ce n’est par là que l’oeuvre agit, contrairement à la statuaire grecque où c’est bien le contor qui agit, le contour capte la lumière. Mais c’est pas du tout ça pour la mosaïque byzantine, ce n’est plus forme contour, c’est lumière-couleur, c’est-à-dire que ce qui définit, au sens propre de définir à savoir marquer les limites de quelque chose, ce qui definit la figure byzantine ça n’est plus forme-contour, mais c’est le couple lumière-couleur, c’est à-dire que la figure se poursuit jusqu’où va la lumière qu’elle capte ou qu’elle émet, et jusqu’où va la couleur dont elle est composée.

Et l’effet sur le spectateur est quelquechose prodigieux, à savoir qu’un oeil noir va exactement jusqu’où ce noir rayonne. D’où l’impression de ces figures dont le visage est dévoré par les yeux. En d’autres termes il n’y a plus un contour de la figure, il y a une expansion de la lumière-couleur. La figure ira jusqu’où elle agit, par lumière et par couleur. Je peux dire : c’est le renversement du monde grec. Je peux dire les deux à la fois. Mais oui ça part du monde grec et ce que les grecs n’avaient pas su faire, Les grecs n’avaient pas su ou pas voulu procéder à cette libération de la lumière et de la couleur.

C’est avec l’art byzantin que se libèrent et la lumière et la couleur par rapport à l’espace pourquoi ? parce que ce qu’ils découvrent c’est que la lumière et la couleur sont spatialisantes. Donc l’art ne doit pas être un art de l’espace, ce doit être un art de la spatialisation de l’espace. Donc je dirai entre l’art byzantin du point de vue de la peinture des mosaïques par exemple et de l’architecture aussi et les textes un peu antérieurs de Plotin sur la lumière, il y a une résonnance évidente. Ce qui s’affirme c’est une même conception de la limite. dernier exemple sur lequel je voudrais passer là plus vite maintenant il y a donc deux sortes de limites. Je pourrai multiplier mes opposition entre limite - limite
-  1 - Il y a une limite-contour et il y a une limite-tension.
-  2 - Il y a une limite-espace et il y a une limite-spatialisation il y a une limite contour et un limite lumière couleur il y a une limite état, il y a une limite terminus une limite tension ce qui m’intéresse en un sens ce n’est pas les remarques des mathématiciens actuels qui m’interesse sur le non sens mathématique que représenterait en quoi l’idée de fondre vers une limite, pour le dire plus brièvement encore, un autre exemple d’expérience de pensée, expérience esthétique qui changeait complètement

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