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7- 27/01/81 - 3
Transcription : Hamida Bename cours 7 du 27/01/81 - 3 La fin d’un 17ème siècle ou la découverte propre du 17ème siècle est en fait en train d’être remise en question. Le siècle des lumières, il me semble finalement, faut garder le mot il est pas mal... Les lumières, les lumières c’est une espèce de déclinaison de l’équilibre du 17ème. Et en effet à partir du 18ème siècle il y aura une espèce de divorce qui ne cessera de s’accentuer entre la science et la métaphysique. C’est à dire le coup réussi par le 17ème, est réussi pour toujours et en même temps il ne peut pas durer. Il ne peut pas durer. Alors ce que je voulais vous dire...... Comtesse : Une remarque la-dessus, c’est que pour tout ce qui parle d’espace optique, il ne faut pas oublier non plus, par exemple Descartes, c’est l’espace optique qui lui permet, c’est l’espace optique pur, d’homogénéiser le rêve à cet espace. C’est à dire, par exemple Descartes est en train de créer une science, qu’il fait 3 rêves incroyables qui ressurgissent en lui. Et c’est pour autant qu’il interprète lui-même ces rêves, c’est-à-dire il les fait passer dans cet espace pur que l’homogénéisation du monde nocturne du rêve avec l’espace permet l’équilibre entre la science et la métaphysique. Et donc....... Deleuze : Très juste. Comtesse : permet de continuer la science physique en refoulant encore pour 3 siècles la science des rêves possibles. Deleuze : Très juste, quel bonheur ! très juste, très juste ! Parce que je me dis même dans mon souci de prolonger ce parallèle philosophie-peinture, je me dis en effet alors tout comme je parlais, j’invoquais les intérieurs des églises tout à l’heure, le thème du rêve dans la peinture, il faut voir comment il le traite au 17ème siècle, le personnage du rêve, le thème du sommeil, de la méditation etc... Justement par rapport à la lumière, ça change constamment. Le méditant du 17ème ce n’est pas du tout la même chose que le méditant du 16ème, ni du 15ème etc, etc... oui mais ta remarque est très très juste. Voilà pourquoi ils n’avaient pas de psychanalyse quoi, voyez. Ah bien quel équilibre ils avaient atteint eux heim ! Quelle honte pour nous ! Bon. Etudiant :............................. quelque chose de très important du 17ème siècle. C’est la suivante c’est l’apparition du monde de l’infiniment petit qui a été tiré des observations de l’ombre et c’est particulièrement un art de se confronter au 17ème sur le microscope ou les implications à l’étude de la nature a été le plus développé. C’est vrai que cela a été unanime. Même le siècle dernier quelqu’un comme Cuvier a appelé le microscope "cette inutile miroir à puces". Non mais pardon. Vous avez beaucoup plus raison que vous ne le prétendez. Parce que si Cuvier fait ça, en revanche les gens du 17ème ne se trompaient pas, Leibniz c’est plaint du thème du microscope. étudiant : L’entourage disons de Spinoza adepte par exemple : l’activité était frémissante en ce qui concerna l’observation du... Deleuze : très juste, très juste. Etudiant : L’observation : Plusieurs personnalités le roi d’Angleterre Charles II, Georges 1er, la Reine a ?? Pierre le Grand de Russie qui lui sont rendus et, le problème technique capital sérieux du microscope était un problème humain et plutôt que le problème non de lentes car il ne pouvait travailler avec le microscope. Deleuze : je suis trés content, les deux interventions ont été parfaites, parce qu’elles sont vraiment précieuses il me semble, et en effet vous venez de lancer un thème qui nous occupera la prochaine fois, car on a pas fini avec cette histoire de l’équilibre du 17ème.
Alors vous comprenez à ce niveau la aussi dire : "ah ! Ils croyaient à l’infini !" Mais c’est idiot enfin, vraiment c’est idiot cela fait même souffrir. C’est vrai qu’ils croyaient à l’infini. Mais de quelle manière ? Ils ne croyaient pas à l’infini parce que l’église leur disait de croire à l’infini ! Et quand on fait de l’histoire mauvaise, vous comprenez quand on fait de l’histoire mauvaise on présente les choses comme ceci, par exemple : "on dit dans un premier temps, il y a eu des conceptions, je pense à des livres très simples qui exposent toujours ce point de vue, en premier temps, ils ont découvert l’analyse infinitésimale mais comme ils étaient, comme ils étaient pas aussi intelligents que nous, ils ont cru que c’était du domaine de l’infini, et qu’ils l’ont interprété en terme d’infiniment petit". Et puis 2ème temps, ce qu’on appelle une conception pré-scientifique, du calcul infinitésimal. Et il serait venu un second temps d’ailleurs très tardif, où on se serait aperçu que l’analyse dite infinitésimale ne faisait aucune référence à l’infiniment petit. Quelle devait s’interpréter en terme strictement fini, en terme d’ensemble. Bon, quand on présente les choses comme ça, on comprend rien, je crois ! Ba c’est facile à ce moment la, on a l’air de dire - Ah ba nous on a dépassé les préjugés du 17ème. Prenez si ils lient l’analyse de l’infinitésimal à l’infiniment petit. C’est pas parce qu’ils sont idiots ou insuffisamment savants ! Ou parce qu’ils manquent des données scientifiques qui permettrait de faire autrement ? C’est en vertu, de tous les présupposés qui leur font découvrir le calcul infinitésimal, ces mêmes présupposés qui leur font découvrir le calcul infinitésimal, les déterminent à penser le calcul infinitésimal en termes d’infiniment petit ! Puisque c’est inséparable de cette espace optique. Si bien que c’est idiot de faire des, il faut plutôt dire ah ba ! oui ! à chaque époque, ils avaient le secret de quelque chose et les secrets ne cessent pas d’être perdus. Les secrets des peintures, les secrets de philosophie, Dieu merci, ils ne cessent d’être perdu, c’est pas triste puisqu’on en a d’autres. Mais, c’est à partir de nos secrets à nous que l’on peut retrouver quelque chose du secret des secrets du 17ème. Exactement comme en peinture quand on dit : " ah ba ! mais de quoi il se servait comme liant tel peintre " ? De quoi il se servait, on voit pas bien, qu’est que c’était ? Ou bien quel vernis ? Comment il faisait son vernis ? Qu’est-ce que c’était tout ça ? Les secrets, il faut se dire ça des philosophes du 17ème siècle. Il faut pas dire ah ! ils croyaient que le calcul infinitésimal, c’était de l’infiniment petit ! Il faut se dire bien mieux. Eux ils avaient le secret de le lier à l’infiniment petit, par précisément le développement de l’espace optique pure. Que nous cela ne soit pas notre problème c’est bien possible ? Mais qu’on est encore affaire avec ce problème, et qu’aujourd’hui ce problème se repose sur d’autres bases c’est évident. Bon, il faut que j’aille faire ma course. Oui. Deleuze : parle plus fort je n’entends pas ! Deleuze : la perspective oui, oui. Mais là, c’est tellement compliqué, tu en sais plus que moi, toi sur la perspective heu... Je dirai la même chose, qu’il y a des perspectives purement optiques et que le 17ème siècle, l’apport du 17ème siècle à la perspective, c’est finalement la découverte d’une perspective purement optique. Parce qu’avant il y a aussi des perspectives. La perspective grecque ou bien la perspective dite par axe de fuite, ça me paraît encore une perspective tactile optique, pas optique pure. C’est toi, qui peut-être au besoin, si tu réfléchis là dessus que si tu faisais une intervention la prochaine fois ce serait très bien. Qu’est-ce que c’est une perspective purement optique oui heu... réfléchis-y... la perspective par point de fuite, le point de fuite au lieu de l’axe de fuite, quelle différence il y a entre ? Mais il faudrait, cela nous entraînerait à définir... Mais ta remarque est juste moi, je la traduirai en disant, le problème de la perspective au 18 ème, au 17ème siècle, doit être lié précisément à ce développement d’un espace optique pur, oui ? Deleuze : j’entends pas. Deleuze : complètement, ouais, complètement. Anne Querrien : Nicolas de Cuges Un type qui serait sur la planète mars, eti dirait lui que tout tourne autour de ta planète mars ? Deleuze : Tout à fait. Je me demande là en effet, Nicolas de Cuges, je n’y pensais plus, mais est-ce que cela serait pas une espèce de charnière, il y a ces types-charnière. Charnière renaissance, âge classique, très très... anne Querrien : Deleuze : la, à ce niveau astronomique et la je n’en sais pas assez. Mais au niveau astronomique cela se poserait, la constitution d’un espace pur astronomique ça... D’un espace optique pur en astronomie. Il faudrait reprendre, mais cela serait trop fatiguant tout ça, parce que faudrait reprendre déjà l’astronomie grecque, essayer de montrer comment les modèles d’astronomie grecque ont des référents tactiles. Je suis sur que cela serait possible. C’est pas un espace optique leur astronomie. Oh ! Oui ! Il faudrait faire ça ! Tu veux pas faire ça ? Bon et bien je vais faire une course attendez moi ! Deleuze : Bon on va pas, on va finir vite, parce que je sens votre extrême fatigue et tension. Comprenez tout ça, vous ne considérez pas que c’est terminé ! Je veux dire, il faudra voir la prochaine fois, il faudra revenir ce thème de l’infini, j’en suis pas là. Mais précisément ? parce que là, l’ontologie, le problème de l’ontologie est directement lié à cette question de l’infini. Et encore une fois quand on se dit ça - je ne sais pas moi, mon seul but ce serait vraiment que vous considériez tous ces gens, comme vraiment des créateurs ba... oui, si j’arrive à ça oui. Comprenez que la question, ce n’est pas : est-ce que c’est vrai ou est-ce que c’est faux. Si je me dis tiens, je vais concevoir l’activité de la pensée comme si elle se faisait dans un espace purement optique mental. Vous me direz, et bien essaie, on verra quel effet ça fait ! Je veux dire, c’est pas la question est-ce qu’ils ont raison ou est-ce qu’ils ont pas raison ? La question c’est, comment on le dit, il faut le faire ! Il faut le faire. S’ils réussissent ça sera ce qu’on peut appeler un "grand moment", en un sens non hégélien. C’est-à-dire pas quelque chose qui est dépassé, ni dépassable, cela sera un très grand moment dans l’histoire de la pensée. Et encore une fois aujourd’hui si la tentative est reprise, s’il arrivait qu’elle fût reprise, ça pourrait pas se faire évidemment sur les mêmes bases qu’aux 17ème siècle ! Dont je dirais que les vrais disciples du 17ème siècle, aujourd’hui c’est ceux qui reprennent cette tentative mais avec de tout autres moyens. Si bien qu’on s’aperçoit même pas, qu’ils sont d’une certaine manière cartésienne ou spinoziste etc... Mais en même temps, ceux qui parmi vous pourraient avoir une réaction, : ah ah ! Voilà moi ce dont je rêve de répondre à la question, ce dont je rêve ce serait, que l’on cesse de dire : Oh ! Non ! Ca ne m’intéresse pas au profit d’une autre réponse qui serait déja une réponse et pas une question et qui consisterait à dire d’avance les raisons pour lesquelles ça peut ne pas intéresser quelqu’un. Il est évident que dans l’exemple du développement d’un espace optique pur, n’est pas le problème principal pour quelqu’un qui aurait pour 1000 raisons, qui aurait des attaches ou un sens tactil, tel que son problème à lui serait tout autre ! On me signalait tout à l’heure qu’en effet ce que je disais de la peinture du 17ème siècle, ça valait avant tout pour la peinture hollandaise, mais qu’évidemment ça valait pas pour la peinture italienne ! L’Italie elle a là aussi, tout comme les grecs, c’est pas du tout un peuple de la lumière. Bizarrement, dans cela ça été les Pays-Bas le grand peuple de la lumière et de l’optique. Bizarrement est-ce que c’est bizarre ? Non pas bizarre je crois. C’est pas tellement bizarre. Si vous pensez aux paysages hollandais, c’est pas bizarre du tout, que se soient eux, finalement le soleil c’est pas la lumière. Hein ?
CP : Le soleil fait des formes ? Deleuze : Le soleil fait des formes oui, ou bien il fait autre chose qui n’est plus forme mais qui est...heu... CP : c’est pour cela que les peintres italiens ont une architecture pure ? Deleuze : Ce que je dis ne vaut pas pour la peinture italienne, mais justement la peinture italienne c’est pas elle qui fait... Etudiant : ???? ne se sont pas intéressés à la lumière. Deleuze : Il y en a qui n’y s’intéresse pas. Il y en a beaucoup. : C’est pas qu’ils n’y s’intéressent pas ! Deleuze : C’est délicat, c’est complexe quoi. Bon alors voilà, revenons à notre point de départ, mais on peut revenir au point de départ maintenant avec plus de force, A savoir. Je disais : Spinoza veut nous tirer du monde des signes pour nous amener à quoi ? Je disais simplement tout ce temps,j’ essayais de donner un sens plus concret à ça. Il veut nous tirer de ce monde des signes qui est fondamentalement variable, un monde associé, un monde équivoque pour nous amener à une espèce de monde en effet de la lumière.
Des expressions univoques. C’est-à-dire des expressions où chaque -je ne peux plus dire chaque signe, puisque le signe est dans son essence équivoque. Donc chaque terme des expressions chaque terme aurait un sens, et n’aurait qu’un sens. Cela serait ça le monde de la lumière. Le monde mental de la lumière serait ça. Ce serait un langage de la pure univocité. Un langage fait d’expressions univoques alors que notre langage est fait de signes équivoques. Question là-dessus : ça nous fait, même quand on nous pose le problème comme ça, ça nous fait faire un bond ! Le bond, je voudrais presque vous l’aillez prévu à savoir qu’est-ce que c’est cette drôle de manie qu’il a de faire un exposé géométrique ? Qu’est-ce qu’il attend de la géométrie ? Qu’est-ce qu’il attend de ce procédé ? Il est pas plaqué ce procédé ? Mais alors quoi ? Qu’est-ce qu’il veut nous dire ? C’est évident que pour lui, même si on s’en tient là, en fait c’est encore plus compliqué que ça, même si on en tient là, le langage de la géométrie est un langage essentiellement univoque par opposition au langage quotidien et au langage courant. Le langage de cette science est le langage univoque. Et alors, il arrivera à faire une métaphysique exposée géométriquement. Il a une horreur de toutes les expressions équivoques.
Donc si vous me comprenez, c’est, parce que en même temps que je parle vous arrivez à déterminer le sens. En quel sens j’emploie chaque mot. Mais donc, c’est ça notre langage si j’ose dire naturel ou conventionnel, peu importe. C’est ça les conditions dans lesquelles nous parlons. Si bien que de se réclamer d’un langage univoque, c’est quoi ? Mais c’est s’engager à le construire. Il est pas donné tout fait ! C’est s’engager à le construire et faire un langage univoque c’est pas du tout choisir un sens pour un mot en disant, ça sera le seul sens ! Ca serait trop facile ! Qu’est-ce qui me permettrait de fixer un sens, en disant :"ça doit être le seul " ? Un sens originel, je pourrais toujours invoquer un sens originel et dire le mot n’aura que "ce sens originel". Pas beaucoup d’intérêt, parce que ça sera une décision complètement arbitraire, conventionnelle. Ca empêchera pas que le mot continuera a être de telle nature qu’il aura plusieurs sens possibles, même si je néglige les autres sens ? En fait, comprenez qu’il faut une création extraordinaire ! Pour inventer des termes, et pour inventer des sens tels que ces termes n’auront qu’un sens et ce sens sera le seul sens possible du terme - tout ça est entièrement à inventer. Si bien, que lorsque Spinoza nous dit, je prends la substance, le mot substance en un seul sens, en un seul et unique sens. Faut pas croire qu’il privilégie un sens préexistant du mot substance. Le mot substance se disait en plusieurs sens. Ca veut dire quoi ? C’est clair, toutes les philosophies, c’est clair, il y avait des substances spiritelles par exemple, je prends Aristote, il y avait des substances purement spirituelles, et puis il y avait des substances matérielles. Bien plus qu’il y avait des belles substances matérielles en plusieurs sens différents, à savoir : il y avait des substances qui n’avaient pas d’autres matières que locales. Il y avait matières locales + d’autres types de matières. Ou bien dans toute la théologie classique : Dieu est substance, les créatures aussi sont substances cela ne peut pas être dans un seul et même sens ? Comme on dira "Dieu est substance "éminemment" donc le mot substance, se dit de Dieu et des créatures, mais il se dit de Dieu et des créatures "par analogie" disait St-Thomas. C’est-à-dire en des sens différents, ces sens étant simplement analogues. Lorsque Spinoza dit ;" je prends substance en un même seul et même sens", et en conclut :" il n’y a qu’une seule substance, encore une fois, ne croyait pas qu’il se contente d’isoler un sens du mot substance pour lui donner la préférence ! Il s’engage à faire tout à fait autre chose, à savoir : inventer un sens du mot substance tel que ce sens soit unique et donc, qu’il n’t est qu’une chose, qu’il n’y ait qu’un terme qui vérifie ce sens. Donc un langage de l’univocité, c’est pas un langage tout fait, qui exclut l’équivocité ! C’est un langage a creer à partir de notre langage équivoque et de telle manière qu’ils nous sortent de l’équivocité. Je prends un texte de Spinoza, très précis qui a fait l’objet de beaucoup de commentaires. Spinoza dit à un moment dans l’Ethique - je donne pas trop de référence parce que mon rêve c’est tellement que vous les découvriez les textes que je cite par votre propre lecture de l’Ethique. En tout cas, assez au début, dans les 2 premiers livres de l’Ethique. Cela vous en fera lire 2 au moins, si vous pouvez trouver le texte. Dans les deux premiers livres de "l’Ethique", Spinoza dit ceci : une formule très très curieuse très belle : "Si Dieu, Si Dieu avait un entendement et une volonté « Si Dieu avait un entendement et une volonté », "le mot entendement et mot volonté devraient être compris à peu près comme le mot chien qui désigne tantôt l’animal aboyant, tantôt la constellation céleste". C’est un beau texte, vous devez sentir qu’il est au cœur de notre problème. "Si Dieu avait un entendement et une volonté, les mots entendement et volonté devraient être compris à peu près comme le mot chien qui désigne à la fois l’animal aboyant et une constellation céleste". La constellation du chien, quoi ! Qu’est-ce qu’il est en train de nous dire ? Le texte est très riche, il est en train de nous dire évidemment - un clin d’œil, pour ceux qui savent, mais vous savez ça. Pour Descartes, pour les cartésiens Dieu a un entendement et une volonté.
La différence entre nous et Dieu, c’est que dans le cas de Dieu, c’est un entendement infini, tandis que pour nous, c’est un entendement fini.
Au niveau de la volonté c’est plus compliqué parce notre volonté selon Descartes la volonté est infinie. Donc je laisse tomber la question de la volonté qui nous entraînerait trop loin.
Mais enfin Dieu a un entendement infini, nous on a seulement un entendement fini. Du fini à l’infini c’est pas la même forme, je veux dire : tout change.
En d’autres termes, entendement est un mot chez Descartes exactement comme substance.
Vous trouvez chez Descartes - un même auteur n’est pas complètement aligné sur un plan unique - je vous disais tout à l’heure Descartes, faisait partie de ces philosophes de la lumière, ça n’empêche pas qu’il reste thomiste, il reste disciple de St-Thomas sur un point très précis, à savoir l’analogie de l’être, la substance se dit en plusieurs sens.
Et chez Descartes on voit très bien que c’est dit en 3 sens, elle se dit de
Bien, donc Spinoza dit : là il marque bien, forcément à ce moment la, ils ne pourront pas - et Descartes appartient encore au Moyen-Age - l’idée de Spinoza parce que Descartes n’a pas pu créer ou n’a pas su créer, les conditions d’un langage univoque. Dans la mesure où il accorde à Dieu entendement et la volonté ; c’est forcé il en reste à une simple analogie. Il n’a pas les moyens de faire la langue univoque. Il n’a pas les moyens d’arriver à une expression univoque. On voit très bien ce que veut Spinoza, pour Spinoza "entendement" ne peut avoir qu’un sens. Et que ce soit l’entendement de Dieu ou de l’entendement de l’homme. Qu’il soit infini ou fini, là il va très loin Spinoza je veux dire c’est un des points les plus nouveaux chez lui. Il aurait pu dire un entendement infini c’est contradictoire, il ne peut pas y en avoir. Or il ne dit pas ça. Il dit : mais oui un entendement infini ça peut exister mais si cela existe, s’il y a un entendement infini c’est exactement au même sens, où il y a des entendements finis. En d’autres termes il va lancer son idée qui est très - appartenant à un point de vue de l’immanence - à savoir, les entendements finis sont des parties de l’entendement infini. Et il y a adéquation de la partie et du tout. C’est en un seul et même sens que le mont entendement se dit : il y a qu’un sens pour le mot entendement. Dès lors, ça veut dire quoi ? Si l’entendement infini comme l’entendement fini, si ça a le même sens, ça veut dire une chose très simple : l’entendement ne fait pas partie de la substance. L’entendement est un mode, l’entendement c’est un mode de la pensée. Donc la substance, elle, elle n’a pas d’entendement. L’idée d’une substance douée d’entendement c’est contradictoire puisque l’entendement ce sera un mode de la pensée. Une substance peut-être douée de pensée même elle l’est nécessairement, mais la pensée et l’entendement.... C’est pas du tout pareil. La pensée c’est un attribut de la substance, l’entendement.... Vous voyez , ça le force à une espèce de terminologie la qui renouvèle beaucoup de choses. Je vous dirai pourquoi, quel intérêt ? C’est précisément, dans telles conditions, qu’il peut arriver à constituer un langage ou quelque soit le mot employé il n’aura qu’un seul sens. Sa condition, de faire tout un système d’invention où ce nouveau sens, le sens unique est strictement inventé, entendement va prendre évidemment un autre sens.
Et les genres de signes, je voudrais juste en finir la aujourd’hui, et même pas je voudrais juste les indiquer, parce que les genres de signes, il me semble là aussi en groupant les textes, mais c’est à vous de le refaire. Si vous arrivez à un autre résultat, c’est très bien. C’est juste le problème que je me pose la.
Il a tout une théorie de la perception-empreinte très simple. A savoir une perception, ou - on l’a vu la dernière fois, je ne reviendrais pas la-dessus, je rappelle juste - ou une affection, une perception ou une affection c’est pareil pour lui. C’est une empreinte d’un corps extérieur sur mon corps. C’est ça un signe, l’empreinte d’un corps extérieur sur mon corps, c’est un signe. En d’autres termes, un coup de tampon dans la cire quoi. Voilà un signe. Ben les corps, les corps extérieurs agissent sur mon corps de cette manière. Par exemple : Le soleil (corps extérieur) agit sur mon corps dans de telles conditions c’est-à-dire d’après son empreinte, dans de telles conditions, que je le vois à telle distance avec telle taille, etc...
Voilà, voilà ma situation. C’est la situation de la perception. C’est par là, ces effets dont je perçois, je perçois le soleil d’après l’effet du soleil sur mon corps. J’ignore les causes de cet effet. C’est-à-dire, j’ignore comment cette empreinte est produite ! Moi j’éprouve l’empreinte c’est tout.
Prenez l’exemple fameux de Kant dans une tout autre... "Le soleil fait fondre durcit l’argile, et fait fondre la cire". Exemple admirable, puisque vous savez que c’est pas un exemple. J’ai longtemps cru, je dis vous savez mais non - j’ai eu une illumination un jour, parce que j’ai appris dans un, dans un comme on dit, dans un dictionnaire, qu’une méthode pour faire l’acier, une méthode très ancienne, utilisait à la fois, l’argile et la cire. Du coup j’ai mieux compris l’exemple de Kant. J’ai l’air de parler d’autre chose mais pas du tout. Kant nous dit, dans un l’exemple qu’il invoque pour de toutes autres raisons. Admirez c’est quand même bizarre ! Le soleil, durcit l’argile et fait fondre la cire. C’est le commentaire vivant de l’idée de Spinoza ! A savoir l’empreinte nous renseigne beaucoup plus sur la nature du corps affecté que sur la nature du corps affectant. Puisque dans ce cas, le corps affectant c’est le soleil, mais il a 2 effets contraires suivant la nature des corps affectés ! La cire est ainsi constituée qu’elle fond sous l’action du soleil alors que l’argile sèche et durci. Bon alors, l’effet nous dit Spinoza, l’empreinte, le signe-empreinte indique plus la nature du corps affecté que la nature du corps affectant. Je dirai c’est ça le statut des signes qu’on pourra appeler, qu’on devra dès lors appeler des signes "indicatifs". Des signes indicatifs.
Bon, voilà 1er groupe de signes.
On va dire que la véritable raison des choses c’est "l’idée de l’effet" et que c’est elle qui contient tous les secrets. Comme on est tellement borné, qu’on a aucune idée des causes, qu’on est réduit aux empreintes des choses sur notre corps. On va brandir l’idée de l’empreinte en disant, c’est ça qui contient le secret de tout. C’est-à-dire le soleil est fait pour me chauffer, le soleil est fait pour me chauffer, orgueil dément de l’homme. A ce moment là, lorsque vous avez érigé ce mythe des causes finales, là je vais vite parce que je vais vous donner le schéma de Spinoza. Vous avez, vous vivez dans un monde, où vous avez perpétuellement l’impression que non seulement les choses sont faites pour vous. Mais quelqu’un les commande ou qu’elles vous commandent vous-même en fonction d’un bien ? Que le soleil me dit : chauffe-toi à mes rayons ? Que Dieu me dit chauffe-toi au soleil ! En d’autres termes, l’illusion des causes finales vous introduit directement dans les signes impératifs qui sont la seconde catégorie des signes. Voyez comment on passe des signes indicatifs - aux signes impératifs ! Ca se fait tout seul ! Et ces signes impératifs on les a analysés, dans toutes nos séances précédentes, c’est dans quel type ! Adam ne c’est pas, il n’y comprend rien, il ignore le jeu des causes. Il est réduit à l’effet de la pomme sur son organisme. L’empreinte de la pomme sur son corps, c’est quoi ? c’est que la pomme l’empoisonne. Elle décompose ses rapports. Lui il y voit une cause finale, il fait de l’idée de l’effet, une cause finale, et il dit : c’est l’ordre de Dieu ne mange pas du fruit ! Voyez du signe indicatif vous passez au signe impératif, par l’illusion de la finalité. C’est votre seul moyen d’en sortir, dans ce monde des signes. Construire des finalités. Mais les finalités c’est dangereux en quoi ? Elles distribuent vos ordres et vos obéissances. Dans le monde des finalités vous ne cessez pas d’ordonner, de commander ou d’obéir. Et les 2 à la fois. Et c’est ça le poison du monde, vous ne cesser pas d’obéir, d’obéir, commander, commander ou les deux à la fois.
Et ça, s’il y a une vie misérable c’est celle-la. La vie misérable c’est vraiment les types qui passent leur temps à... ils ne peuvent rien voir sans que ça leur rappelle quelque chose. C’est terrible ça ! Chacun de nous en connaît des comme ça. Moi j’en connais. Quoi qu’on dise à quelqu’un ça lui rappelle quelque chose. On a envie de lui dire arrête avec ta mémoire de con tout ça. C’est pas que je ne plaide pas le thème : tout est nouveau ! C’est pas ça ! Je dis pas que tout soit nouveau, je dis :
Jamais, jamais une écrivain de génie n’a eu la moindre mémoire. Je le dis même ceux à qui on la prête, je veux dire même Proust et surtout Proust n’a jamais travaillé à la mémoire quoi. Alors, c’est quand même curieux ça, comprenez ? ça ne fait qu’un : la chaîne associative et l’interprétation. Tu dis tel mot. Ah ! Quel autre mot ça te rappelle ? Oh ! Mais on a envie ...je ne sais pas ce dont dont vous avez envie. C’est pas que, c’est pas qu’il faille nier que cela rappelle ça ! Mais, évidemment ça rappelle, si on se pose, si on se met dans ces conditions ! si on se met dans ces conditions d’associativité, ba oui on peut toujours se mettre dans les conditions les plus débiles possibles ! On peut même se vautrer, on peut défiler la débilité ! On peut en faire un fil kilométrique, ça marche toujours.
Pourquoi ça ne marcherait pas ! Ca existe les associations ! Simplement il s’agit de savoir ce qu’on veut ! Est-ce qu’on veut en sortir, ou on veut y vivre et mourir ?
On aura le temps d’y vivre y mourir parce que et puis on crèvera encore plus crétin qu’on était né.
Ben c’est tout heu... bon... rompre les associations, ça toujours été ça, toutes les raisons de la vie, et toutes les raisons de l’art ! Et dès lors l’art et la vie c’est strictement pareil ! Si on rompt pas les associations, ba on gatouille dans son coin, c’est trés bien !
On peut gatouiller comme ça 10, 20 ans, 40 ans tant qu’on tient le coup ! Pas difficile !
Vous comprenez ? Alors à ce moment la, il vaut mieux sauter à la fin, c’est-à-dire faire le coup de génie de Beckett.
Dire, bon d’accord, mais on va s’installer à la fin.
C’est-à-dire au moment où les associations elles commencent à... elles coincent, elles commencent à patauger dans la nouille quoi ! alors heu..
bon la c’est très bien parce que ça c’est la vérité finale de l’association.
Si vous prenez ce chemin vous aboutissez à ça, et alors Beckett peut là dessus nous donner sa grande leçon de vie et de joie.Nous dire : c’est marrant tout ça !
Evidement, mais enfin méfiez-vous de tous ses trucs là.
Comtesse : on peut se demander si par exemple le problème de Rousseau de la dernière fois, si Rousseau pour exemple n’a eu qu’un préssentiment de la selection acquise et de la compositiondans dans la selection acquisel’e ce que peut-être....les" confessions"en témoignent. Il était dans l’efficacité des traces justement. Mais pas dans la sélection ou tout lui rappelait quelque chose d’autre ! Par exemple, l’objet du désir présent ne fait que lui rappeler l’objet -trace d’un désir ancien, et cela renvoit à l’infini. Dans le cas remarquable c’est Mademoiselle de Lambersier instigatrice virile ou toute femme lui rappelle cette trace on peut multiplier les exemples Il y aurait la quelque chose entre une dijonction entre l’efficacité des traces. Et la sélection... selon les évènements. Deleuze : Très juste, je dirai juste pour nuancer juste de mon point de vue. Tu prends le plus bon texte, mes confessions de Rousseau. De mon point de vue, c’est fascinant le cas Rousseau, parce qu’il s’en tirait jeune, et tout qu’il a été jeune, il a pas craqué, c’est un cas très très impressionnant Rousseau. Il s’en sauve, parce que, il joue, les chaînes associatives, elles jouent complètement sur lui ! Mais d’une certaine manière, il les domine justement par un art de sélection. Il se construit les situations, alors ça va jusqu’au bouffon, il est le bouffon. Il est, il se fait une espèce de personnage bouffon qui est fantastique, qui est presque Dostoïevskien quoi toutes proportions gardées, formidable. Et puis ça craque, ça craque avec les malheurs qu’il lui arrive, ça craque et je vous disais moi, ce qui me paraît tellement émouvant dans les confessions, ce qui en fait un grand grand livre, c’est la manière dont quelque chose, je me souviens plus exactement, mais admettons les 5 premiers livres, sont une espèce d’hymne à la Joie. C’est une espèce d’immense rire où Rousseau se fabrique un personnage et nous montre le secret de la fabrication du personnage Rousseau. Dans une espèce de pas inauthentique, alors dans une espèce d’authenticité absolue. Et puis petit à petit alors c’est un processus de toute autre nature s’enclenche la-dessus. Les chaînes associatives se mettent plus du tout à jouer, dans un art propre à Rousseau qui garde la sélection, mais il y a plus de sélection. Et on assiste vraiment quoi, à la formation d’un processus paranoïaque s’enclenche la-dessus. Et c’est comme un changement de couleur quoi ! De livre en livre, les confessions c’est comme si, l’ombre arrivait, ça s’assombrissait et ça se termine dans le noir absolu. ça à cet égard c’est un livre de, si on parlait des "couleurs" chez confessions, c’est fantastique. Comme à partir d’un certain roman. Tout devient noir tout devient... la suite la prochaine fois. |
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La voix de Gilles Deleuze en ligne |