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6- 12/01/82 - 1

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cours 6 - 12/01/82 - 1

la dernière fois, j’ai essayé de rattraper du temps mais ça a consisté en ceci : j’ai commenté ou j’ai prétendu commenté le premier chapitre de "Matière et mémoire". C’est donc fini pour nous ça.

La question c’est : qu’est ce qui va en sortir pour nous c’est-à-dire quelle aide, quel apport va être pour nous ce premier chapitre de" Matière et Mémoire" ? Et si je résume la direction des apports que nous avions retenus dans ce texte si étrange, je dis voila bon :

-  Bergson nous mettait en présence d’un univers "matériel" des images-mouvements et l’on entrait véritablement dans cet univers images-mouvements qui se présentait comme un monde d’universelles interactions des images les unes sur les autres et il montrait comment dans cet univers d’images-mouvements étaient distribués, au hasard, des centres d’indéterminations.

-  N’oubliez pas le pari que faisait Bergson dans ce premier chapitre : "il n’introduirait rien qui ne fut "matière" c’est-à-dire "mouvement". Il n’introduirait surtout pas quelque chose d’une autre nature et en effet il gagnait son pari dès le moment où les centres d’indétermination n’impliquaient rien qui ne fut "matière et mouvement". Les centres d’indéterminations se définissaient simplement par l’écart, l’intervalle entre une action subie, une réaction exécutée. Les centres d’indéterminations étaient dès lors, complètement compris eux même en termes d’image-mouvement.

-  Il y avait centre d’indétermination lorsque au lieu qu’une action subie se prolongeant immédiatement en réaction exécutée, il y avait un intervalle entre l’action subie et la réaction exécutée. Reste que dès qu’il se donnait les centres d’indéterminations au sein de l’univers matériel des images-mouvements. : trois types d’images en découlaient. Je reviens pas là dessus puisque j’essaye de résumer notre acquit au point que l’on pouvait dire : les images-mouvements, l’univers des images-mouvements lorsque on les rapporte à un centre d’indétermination sous cette condition, à condition qu’on les rapporte à un centre d’indétermination, va nous donner trois types d’images ; donc ce sont trois types d’images-mouvements : les images- mouvements rapportées au centre d’indétermination donnent trois types d’images
-  des images-perception
-  des images-action
-  des images-affections c’est en ce sens que le centre d’indétermination sera dès lors et pourra être défini comme un sujet en un triple sens c’est-à-dire
-  quelque chose qui perçoit une image, une image qui perçoit d’autres images
-  un sujet qui agit,
-  un sujet qui est affecté. Sujet ne désignant toujours rien d’autre qu’une image-mouvement qui présente un écart entre le mouvement reçu et le mouvement exécuté, qui présente un intervalle, bien. Dès lors on a toutes sortes de problèmes pour nous : qu’est-ce que ça va être ? maintenant on reprend comme notre autonomie. Et on se dit bien le moment déjà venu de fixer une sorte de pressentiment, notre pressentiment c’est que bien entendu et on le savait depuis le début, l’image-mouvement ce n’est qu’un type d’image. Il en a bien d’autres, on ne sait pas encore quelles autres, toutefois on commence à avoir un indice.

Car on a fixé la dernière fois cette notion de univers matériel d’images-mouvements ou plus précisément d’agencement machinique d’images-mouvements. Et on disait ben oui, le cinéma sous un de ses aspects c’est un agencement machinique humain bien plus on pourrait dire c’est l’agencement machinique des images-mouvements. Mais et la je fais appel à ceux qui ont suivi ce qu’on fait ici depuis beaucoup d’années parce que c’est un thème que je ne voudrais pas reprendre - il nous est arrivé dans d’autres années d’essayer d’analyser ce concept d’agencement et on arrivait à dire : "oui, tout agencement est double, il a comme deux faces" Si l’on analyse bien ce qu’est un agencement, on voit qu’il n’est indissolublement sur une de ses faces :
-  agencement machinique de choses - ici agencement machinique d’images-mouvements -
-  et sur un autre face il est agencement d’énonciations.

En d’autres termes si vous voulez il a un "contenu" et une "expression" : le contenu de l’agencement c’est l’aspect machinique renvoyant aux images-mouvements et il a un autre aspect : agencement d’énonciations et tout agencement est double en ce sens. Quel rapport il y aura entre les énoncés de l’agencement et le contenu de l’agencement ? - ici les images-mouvement, on ne le sait pas. Tout ce que je veux dire c’est que nous ne tenons qu’une moitié de l’agencement cinéma, et il est bien évident qu’un agencement machinique d’images-mouvement se double d’un certain type, d’une certaine forme d’énonciation.

-  Qu’est-ce que c’est, les énoncés qu’on pourra appeler cinématographiques ? Est-ce que je peux dire que dans la "Naissance d’une nation", dans le "Cuirassé Potemkine" etc. etc. il y a un certain style d’énoncés qui ne vaut pas et qui ne se définit pas seulement par son contenu mais qui se définit comme "énoncés de cinéma" ? Pourquoi est ce que j’introduis déjà cela, pour bien marquer que de toute manière, tout ce que nous disons sur l’image-mouvement ne concerne qu’une partie de l’agencement. Encore une fois il y a bien d’autres images, au point que lorsque je me réfère alors à l’aspect "énonciation" de tout agencement pour faire pressentir l’existence de ces autres images, ça veut dire : est ce qu’il y aura des images-énoncés ? est-ce qu’il faudra par exemple donner un statut particulier aux images-sons ? l’image-son est-ce que c’est quelque chose qui diffère en nature de l’image-mouvement ? et de quelle manière ?

Tout ceci pour dire déjà au point où nous en sommes, au moment même où nous sommes de plus en plus en train de nous enfoncer dans l’image-mouvement pour essayer d’en sortir quelque chose, nous savons aussi qu’il y a un au delà de l’image-mouvement et qu’on n’a pas fini notre affaire. il faut tout faire cette année, quoi sinon ça va plus. Alors Bon ! L’idéal ce se serait quoi ? ce serait que ce soit notre analyse de l’image-mouvement qui nous amène à dépasser l’image-mouvement pour tous les autres types d’images. Est ce que c’est possible ? est ce que c’est l’image-mouvement elle même qui nous forcera à découvrir qu’il y a d’autres types d’images qui font partie de l’agencement "cinéma" ? ce serait parfait ça, comme ce serait parfait, c’est ce qui arrivera.

Mais non seulement il n’y a pas un "au delà" de l’image-mouvement, c’est à dire autre chose que des images-mouvement mais je reviens au point où nous en sommes précisément, il y a un en-deça de l’image-mouvement

Je veux dire : non seulement il y a d’autres types que l’image-mouvement mais l’image-mouvement elle même dans certaines conditions nous livre trois types d’images-mouvement. Et c’est à ça que je reviens : ces trois types d’images qui ne dépassent pas l’image-mouvement - on n’en ai pas encore là, hélas - mais qui sont comme les espèces de l’image-mouvement sous une certaine condition, à savoir que les images-mouvement soient rapportées à un centre d’intermination.

Lorque les images-mouvement sont rapportées à un tel centre d’intermination qui pourtant en fait parti, alors elles livrent tantôt des images-perception, tantôt des images-action, tantôt des images-affection qui font partie de l’image-mouvement. Dés lors notre tâche est comme double :
-  pour plus tard la recherche pleine de pressentiment d’autres types d’images que l’image-mouvement,
-  Mais immédiatement l’analyse precise, aussi précise que l’on pourra, l’analyse des trois types d’images-mouvement à savoir :
-  les images-perception
-  les images-action
-  les images-affection En quel sens ? qu’est ce que ça veut dire ça ?

-  c’est notre objet immédiat : analyse des trois types d’images-mouvement. Essayons avec tout ce que nous a apporté Bergson. je dirais d’abord un premier point : un film, je peux le présenter toujours partiellement, ne me dites pas c’est pas seulement ça puisque nous nous réduisons très provisoiremernt à la considération de l’image-mouvement

De ce point de vue restreint, je peux dire un film c’est quoi ? un film c’est un mélange en certaine proportion des trois types d’images. c’est un mélange d’images-perception, d’images-affection et d’images-action. supposons une séquence puérile, rudimentaire - bien plus cette séquence a des invraisemblances - il faudra se demander ce qu’il y d’invraisemblable dans cette séquence que je propose comme ça comme exemple vraiment rudimentaire.

-  Première sorte d’image : un cow-boy vu de face, il regarde et puis on voit ce qu’il regarde : il regarde l’horizon dans un paysage western. Je dirais : c’est une image-perception ; Tout ceci encore une fois ça suppose tout ce qu’on a vu la dernière fois. Manifestement il cherche quelque chose. Il est inquiet, il cherche comme dirait Bergson "ce qui l’intéresse" et il passe sur ce qui ne l’intéresse pas. Qu’est ce qui l’interesse : est ce qu’il y a des indiens ?

-  premier type d’image je dirais, bon, en termes techniques mais je risque beaucoup de me tromper, c’est juste pour essayer de fixer les concepts : vous pouvez avoir là une série : champ, contre champ et panoramique : image perception

-  Deuxième sorte d’image qui s’enchaîne - on est encore dans l’image perception - il faut que ça s’enchaîne, que chaque image ait une racine dans l’autre, on est encore dans l’image-perception mais tout se passe comme si l’horizon s’incurvait. On a vu l’importance de - comment dire, quel est le substantif ? en fin vous voyez - de cette courbure prise par le monde de la perception. C’est là que l’image perception va donner l’image-action. Car lorsque le monde prend cette courbure, qu’est ce qu’il se passe ? les choses et les êtres du monde s’organisent suivant des rapports de distance et des profondeurs qui définissent à la fois simultanément l’action virtuelle des choses sur moi et l’action possible de moi sur les choses. c’est la naissance de l’action : cet univers s’incurve et en effet les indiens sont apparus au sommet de la colline ou de la montagne. un indien, deux indiens et voilà que immédiatement on est déjà dans l’image-action, apparemment dans l’image-action : les indiens descendent, ils se groupent, ils descendent au galop, voilà, bon, et les cows boys, ils arrangent leur chariot : image-action techniquement cela peut être un travelling. Bon

-  troisième sorte d’image : le cow-boy reçoit une flêche dans l’oeil - gros plan du visage douloureux : image-affection. Je dis : il y a des invraisemblances dans cette séquence mais lesquelles ? lesquelles ? Je dis : supposons qu’un film du point de vue qui nous occupe c’est à dire du point de vue de l’image-mouvement, soit composé, soit vraiment constitué de ce mélange des trois sortes d’image et des passages d’une image à l’autre. Déjà comprenez que pratiquement, et aprés tout l’idéal c’est si nos concepts répondent bien à des problèmes pratiques que vous rencontrez dans tous les films il n’y a pas un ordre déterminé ; dans quel cas, est ce que par exemple, l’image-affection doit précéder l’image-perception ? dans quel cas au contraire c’est l’image-perception qui doit être première ? On sait pas. Cas où l’image-affection précède l’image-perception : visage horrifiés mais vous savez pas quelle est la chose qui fait horreur ; vous voyez d’abord le visage horrifié et puis c’est après que vous allez voir l’horreur, que vous allez percevoir l’horreur. Dans d’autres cas c’est pas bon, dans d’autres cas manifestement l’émotion du spectateur est beaucoup plus grande si on voit d’abord si il y a l’image-perception d’abord parce qu’on se dit dans ce cas c’est l’image perception avant, comprenez que - ce que je veux dire c’est une chose extrêmement simple - on est en train de tenir un second sens pour nous, dans la progression puisque encore une fois ce que je vous propose c’est une recherche trés trés progressive - on tient un second sens du mot montage.

Car certains d’entre vous avaient été étonnés au tout début de l’année quand on avait parlé du montage à quel point, le point de vue dont j’en parlais, était restreint - ils m’avaient dit : "il n’y a pas que ça dans le montage", c’est évident il n’y a pas que ça dans le montage ; C’est qu’au premier trimestre la manière dont nous avons considéré l’opération du montage consistait à le saisir sous un de ses aspects : rapport des images-mouvement à un Tout d’une autre nature qu’elles sont censées exprimer rapport des images-mouvement avec un Tout, ce Tout n’étant pas du mouvement mais étant de l’ordre de la durée et c’est uniquement de ce point de vue que j’avais essayé de distinguer des types de montage.

-  je dis au point où nous en sommes maintenant nous rencontrons une seconde détermination du montage : ce que l’on pourrait appeler montage du point de vue qui nous occupe là, c’est la détermination dans un film précis du rapport et des proportions entre les trois types d’images. Non plus rapport de l’image-mouvement avec un Tout d’un autre ordre mais rapport des trois types d’’images entre elles c’est à dire rapport et proportion des images-action, des images-perception et des images-affection dans un film, Bien.

Ceci n’empêche pas que - et c’est mon second point - beaucoup de films présentent une prédominance d’un certain type d’images sur les deux autres. Et après tout, une fois dit que Bergson la dernière fois nous a donné les définitions théoriques conceptuelles des trois types d’images, maintenant il faut juste exercer une espèce de pacte pour les reconnaître et c’est pas difficile de les reconnaître au passage même quand il y a des images composites même quand il y a des images qui mélangent les genres, des images composantes secondaires et c’est pour ça que dèjà bien longtemps avant les vacances, je vous avais proposé trois exemples d’images types : je vous les rappelle en vous demandant de réflêchir là dessus.

-  Image-perception : je disais, prenons l’exemple d’un film de Lubitch que j’ai pas vu qui est cité par Mitry et qui est décrit par Mitry exactement comme ceci et que me parait si belle que et puis j’en aurai besoin tout à l’heure : c’est le film :"l’homme que j’ai tué". Cela commençait comme ceci mouvement de caméra saississant une foule de dos à hauteur de la taille, la caméra continue, bouge et s’arrête à un endroit : cet endroit c’est le dos d’un unijambiste. elle glisse et elle s’insère dans une espèce d’intervalle, intervalle entre la jambe subsistante et la béquille, voyez ! Dans cet intervalle, à travers cet intervalle,"On, mais qui est "On" ? pour le moment c’est "on", on voit quoi ? on voit un défilé militaire et on apprend du coup que ce que cette foule regardait, vue de dos, cette foule regardait un défilé militaire. Et puis la caméra découvre quoi ? autre plan, plan suivant : la caméra découvre un cul de jatte. voyez le défilé militaire a lieu après la guerre : il y a donc un unijambiste qui a perdu sa jambe à la guerre et puis il y en un qui en a perdu les deux. Il y a un cul de jatte qui vend des petits articles de mercerie, des lacets et en même temps qu’il vend des lacets, il a cette espèce de fascination de ce qui se passe, du défilé militaire et il regarde ; or lui est en situation d’effectuer la perception que Lubitch avait laissée dans le vide sous la forme d’un"on". Qui était ce "On" extraordinaire qui saisissait le défilé militaire à travers, entre - de ce point de vue extraordinaire - entre la béquille de l’unijambiste et la jambe valide ? Voilà que l’image perception qui jusque là était dans l’air et apparaissait dès lors, comme un effet esthétique de cinéma, se trouve effectuée. effectuée par quoi ? l’unijambiste est dans une situation telle que, vendant ses petits lacets, il est exactement à hauteur voulue pour voir le défilé militaire à travers l’intervalle de l’unijambiste.

-  Je dis ces deux plans qui sont surement splendides, je dis ces deux plans définissent l’image-perception et même toute une aventure de l’image-perception, je dis : toute une aventure de l’image-perception puisqu’elle commence par être posée sans être effectuée et ensuite elle est effectuée par le cul de jatte qui nous est montré que dans le second plan. Je dirais c’est une image-perception, voilà.

-  Deuxième exemple que je vous proposais : une image-action ; voyez, cela correspond à ma séquence western de tout à l’heure mais cette fois ci : au lieu de saisir leur mélange je donne trois exemples comme purs. Exemples purs d’images-action : je disais cette fois et peut être que ce n’est pas par hasard peut être que Lubitch a été un très grand artiste des images-perception, mais peut être que celui dont je parle maintenant à savoir Fritz Lang a été un des plus grands artistes de l’image-action Et je vous donnais comme deuxième exemple cette fois-ci de l’image-action : le début du docteur Mabuse qu’est ce qu’il y a ? une action qui se décompose en un ensemble d’images, à savoir : attaque d’un courrier dans le train :
-  premier ensemble d’images : un courrier est attaqué dans le train et volé, dépossédé d’un document.
-  deuxième sorte d’images : le vol est porté dans une auto, est mis dans une auto, il y a une auto qui part, qui démarre : Voyez il y a déjà un système : train, vol dans le train, transport par auto.
-  troisième sorte d’image : un type de la bande monte à un poteau télégraphique - non téléphonique, je ne sais plus, vous corrigez vous mêmes les inexactitudes - il monte à un poteau là, et il téléphone à -
-  quatrième image - Mabuse qui attend le coup de téléphone.

Là vous avez des segments d’actions - des segments d’actions avec déjà quelque chose qui sera portée à un paroxysme par Wenders bien plus tard c’est à dire de nos jours - avec l’idée fondamentale qui n’est pas une idée théorique, qui est vraiment une pratique de cinéma à savoir que la caméra assure la conversion et prend sur soi la conversion des mouvements hétérogènes : elle homogénéise pas du tout les mouvements, elle prend sur soi et c’est l’appareil qui convertit les mouvements. Train, dans la séquence de Lang, train, auto, téléphone. Si vous pensez aux grandes séquences de Wenders avec mouvement de conversion à la lettre,"des changements" qui impliquent précisément des intervalles aussi. Tout à l’heure j’invoquais un intervalle perceptif, la jambe qui manque de l’unijambiste, là maintenant j’invoque des intervalles entre actions, entre segments d’actions dans une action composée.

je dirais que, que.. les premières images du premier Mabuse nous donnent comme "à l’état presque pur" - il y a jamais d’images pures - tout comme tout à l’heure j’avais un cas "presque pur" d’image-perception là j’ai un cas "presque pur" d’image-action. et je disais :

-  Troisième exemple : une image affection : je cherche les exemples les plus simples et qui surgissent dés le début du film puisque l’image de Lubitch elle est, d’aprés Mitry, dés le début de "L’homme que j’ai tué", Mabuse c’est dès le début du premier Mabuse et là, dès le début il suffit de voir "la Passion de Jeanne d’arc" pour voir un film où domine l’image-affection.

Et déjà on en sait juste assez si vous rappelez nos acquis bergsonniens pour ne pas être étonnés que l’image-affection ait comme lieu privilégié, "le gros plan", "le visage" tout comme l’image-action peut comporter des travellings : l’image-affection comportera forcement des gros plans.

Voila mes trois types d’images donc là c’est pour faire passer au concret tout ce que Bergson nous a dit pas du tout parce que ce que nous a dit Bergson l’autre fois était abstrait mais c’était du concret philosophique la on le fait passer au concret comment dire on essaye de le faire passer au concret cinématographique. Or je dis non plus je ne dis plus comme tout à l’heure tout film est un mélange des trois types d’images-mouvements de
-  l’image perception
-  l’image action
-  l’image affection on se dit autre chose évidement ça ne se contredit pas je met l’accent sur autre chose à savoir :on peut distinguer différents genres de film d’après la dominante de l’une des images sur les deux autres et si j’essaye de placer les genres, tout ca c’est objet de remaniment. On verra bien en avançant ce je dis evidemment c’est toujours provisoire il n’y a pas tellement de problème un film où domine l’image affection c’est quoi ? ça serait ce qu’on appellerait d’après Pariscope c’est ce qu’on appellerait "un drame psychologique", un film où domine l’image-action c’est ce qu’on appellerait un policier. Pourquoi j’insiste là dessus parce que c’est sans doute le film policier qui a apporté l’idée de segment d’action et d’un minutage dans les segments d’action. C’est la découverte de Lang qui ensuite aura toutes sortes de continuation, de renouvellement tout ça ; l’image-action c’est vraiment le film policier, c’est là que vous trouvez une dominante d’images-actions.

Est-ce qu’il y a un cas, alors est ce qu’il y a un genre aussi gros que ce que je suis en train de définir où ce qui domine c’est les images-perceptions ? là j’ai juste une idée là dessus : moi je pense qu’il y a bien un genre où domine l’image-perception et qui finalement a inventé le film à dominance d’image perception et que c’est : le western Et que dans le western précisément, il y a très peu d’images-affection et très peu d’images- actions c’est pour cela que mon exemple de tout à l’heure où j’invoquais une séquence tirée d’un faux western était pleine d’invraisemblances, l’action dans le western elle beaucoup trop stéréotypée, elle a pas du tout les inventions et.. vraiment les inventions des segments d’actions dans le film policier. Si je pense par exemple à....en effet tous les films fondés sur le minutage du hold-up, à chaque fois l’action se définit bien conformément au thème bergsonien par l’émergence d’un quelque chose de nouveau, par exemple dans un film célèbre de Jules Dassin, le moment où le parapluie est utilisé pour recevoir les gravats dans le minutage du hold-up, dans "Asphalte Jungle" où le minutage aussi à chaque fois qui introduit quelque chose de nouveau et en effet la nécessité de parer à de l’inattendu et c’est ça le lieu des images-actions, le policier. C’est une logique de l’action. Le western c’est pas du tout son problème. Le western c’est vraiment le genre qui à fondé et aussi développé à l’état le plus par l’image perception et l’enchainement des images perceptions les unes avec les autres. Pourquoi ? Il y a un texte de Bazin "sur pourquoi le western ?" et qu’est ce qui fait l’excellence du western comme genre cinématographique et la réponse immédiate de Bazin elle m’a parut curieuse. Elle consiste à dire c’est pas la forme, faut pas chercher dans la forme du western parce que tout ce qui est de la forme de la forme du western à la rigueur on pourrait le retrouver ailleurs dans un autre contexte que celui du western. Il dit en effet ce qui appartient au western c’est les vastes étendues c’est la confrontation des rochers etc. etc. c’est la ligne du ciel et de la terre ouais tous ça. Le paysage western le panoramique western mais il dit c’est pas ça ! et si l’on essaye de comprendre vraiment l’excellence du western, il faut invoquer quelque chose du contenu à savoir : le western a vraiment introduit et créer une mythologie propre au cinéma. J’ai pas l’impression que ce soit absolument vrai ça. Ca fait rien ça importe pas. Je préfère les remarques où Bazin dit dans le western vous trouverez très très rarement des gros plans bien plus le héros du western il est essentiellement impassible.

Et Bazin a de belles pages par exemple sur un western célèbre « cet homme à abattre » sur l’impassibilité et là du visage. Pas de gros plans, pas de gros plans pas d’images affection même quand le cow boy est amoureux c’est exactement de la même manière qu’il regarde l’être aimé qu’il regarde son troupeau toujours le regard à l’horizon c’est-à-dire c’est vraiment un regard perceptif. Et introduire des images affections c’est pas du tout bon peut-être on verra on verra quel problème ça pose mais alors pourquoi dire vous voyez je dirais pas comme Bazin il me semble que c’est secondaire que le western introduise une mythologie propre au cinéma. Je n’en suis même pas sûr parce qu’il me semble qu’on pourrait dire du policier qu’on pourrait le dire de milles choses. En revanche ce qu’on peut dire que du western c’est quelque chose qui tient à sa forme mais pas à sa forme objective. Bazin a évidemment raison de dire : à la rigueur les paysages de western, vous pouvez trouver l’équivalent ailleurs. Mais ce que vous ne trouverez pas l’équivalent ailleurs c’est la constitution de films fondés sur les images-perceptions.

-  Quel est le problème du western ? C’est essentiellement des personnages pour qui il est vital de percevoir, pas d’agir et s’il y a une mythologie du western c’est ça. S’il y a une mythologie du western je crois que ce soit le bien et le mal ; le bien et le mal c’est la métaphysique du cinéma vous le trouvez partout. Mais ce qui est propre au western c’est : si tu ne perçois pas tu ne survis pas. Ce qu’il s’agit de voir là, c’est vraiment l’image-perception dans tous ses sens. Depuis tout percevoir jusqu’à retenir ce qui m’intéresse au sens Bergsonien, la perception subjective c’est-à-dire percevoir tout sauf ce qui ne m’intéresse pas y compris percevoir ce qui se passe dans mon dos. Qu’est ce que c’est qu’un duel à la western ? les deux types qui s’avancent l’un vers l’autre tout ça ! Comprenez du point de vue action C’est zéro ; c’est pas des images-actions c’est des images-perceptions et toutes leurs beautés viennent de l’image-perception. C’est des images-perceptions ce qui veut dire quoi ? Ce qui veut dire quoi ?

Ce qui est en jeu dans ces images ce qui leur donne une charge dramatique intense : qui c’est qui va percevoir le premier des deux ? à savoir la règle du jeu étant : il faut que l’un ait tiré son revolver pour que l’autre déjà ait envoyé la balle. C’est une action de perception et avec les indiens il s’agit de les voir les indiens ha... c’est pas rien de voir un indien.

Là dans ces rochers dans ces montagnes tous ça c’est ça l’objet du western c’est un développement de l’image perception comme en effet aucun genre ne le rendait possible. Et pourquoi ? Il y a un livre que j’aime beaucoup d’un américain sur le roman américain. C’est un livre de Leslie Fidler je crois qu’il a enseigné ici Leslie Fidler enfin je sais pas je crois ouais.... qui s’appelle « le retour du peau rouge » et Leslie Fidler part d’une idée très très juste concernant la littérature américaine. Il dit bah oui en gros en gros je schématise, il dit les américains c’est des gens qui n’ont pas d’histoires biens connues mais en revanche ce qui à remplacé l’histoire chez eux c’est la géographie. Ils ont une géographie et il dit « on parle toujours du western mais en fait il y a quatre grandes directions et leurs littérature est traversé par ces quatre grandes directions et si vous pensez aux auteurs américains que vous aimez vous pouvez le distribuer dans cette direction. Il y a dit-il : un ce qu’il faudrait appeler un Northern et un soutier et puis ya un Eastern simplement ces directions sont qualitatives la direction Eastern est bien connue c’est la direction de l’américain qui va chercher non pas ces racines mais qui va renouer un contact très étrange avec la vieille Europe. C’est ça qu’ils font à l’Est.... Alors ça c’est Henry James toute une partie de Fitzgerald évidemment les grands auteurs américains ils participent à plusieurs directions chez Fitzgerald il y a une direction au Sud. Il y a une direction au Sud et une Est c’est-à-dire le retour en Europe à l’américaine d’Henry James à Fitzgérald vous trouvez

Le nord c’est plus compliqué c’est la montée vers l’industrialisation des grands romanciers, ils sont très très connus.... le Sud... bon vous avez Faulkner, bien d’autres, une partie de Fitzgerald et la grande confrontation, la confrontation avec le Noir. Il reste l’Ouest : là vous avez quoi ? Fidler le dit très bien et oui c’est la confrontation cette fois si, c’est d’une part la confrontation avec un sens tout à fait nouveau des limites ou des frontières, et en même temps les deux étant complètement liées, la confrontation avec l’indien.

Ah bon la confrontation avec l’indien et puis un sens nouveau des frontières,voila ce qui est découvert dans le western ! ça veut dire quoi ? ça veut dire que la frontière c’est plus quelque chose qui sépare ceci et cela, c’est quelque chose qu’on cesse pas de déplacer . La frontière elle est vécue comme perpétuellement déplaçable. Rappelez vous les belles pages de Marx sur le capitalisme et les deux aspects du capitalisme : il s’oppose toujours des limites d’une part et d’autre part il ne cesse pas de repousser ses limites pour s’en opposer d’autres.

Les deux aspects du capitalisme on pourrait aussi bien dire c’est : l’esclavage et l’évacuation. Il ne cesse pas de s’opposer des limites à l’interieur desquelles il va établir le système de la domination et de l’exploitation. Mais ces limites aussi d’un ordre ordre, d’une autre main il ne cesse pas de les repousser, il fait le vide pour une nouvelle organisation. Cette fois ci il ne s’agit plus de faire des esclaves, il s’agit de vider des terres, vider des terres de leurs habitants. Pourquoi aujourd’hui - parenthèse - y a-t-il des héritiers des peaux rouges ? et c’est les palestiniens. Très curieux. Les palestiniens cessent pas dire - ils ont très bien saisis ça - s’il y avait un nouveau western se serait Arafat - c’est très curieux il ne cesse pas de dire : oui, nous les peaux rouges, on est les peaux rouges modernes. Il dit c’est en effet il ne s’agit pas de dire que les palestiniens sont des esclaves il s’agit de les vider, il s’agit de les évacuer de leurs terres. alors ça c’est un mouvement très différent. Pourquoi ? En quoi c’est très lier au western tout ça ? Cette limite etc.

-  je dis que cette limite perpétuellement déplacée et ce rapport avec l’indien vont vraiment se confondre, vont être les constituants d’un monde perceptif à la limite pure, pourquoi ? Fidler analyse une figure du roman américain qui hélas n’a pas eu il me semble dans le cinéma assez il a eu quelques non par application mais quelques exemples déjà. C’est l’union que fait l’américain blanc, l’union que fait un héros américain blanc soit avec un noir soit avec un indien, une espèce d’amitié étrange qui va les emporter dans une aventure ; une espèce d’aventure qui sera à moitié une espèce d’expiation du coté de l’américain blanc, qui sera découverte du coté soit du noir soit de l’indien et en effet du coté du southern ou du coté du western vous avez cette espèce de confrontation avec le noir et avec l’indien.

Et sur quel base se fait la confrontation entre les deux. Dans les deux cas elle se fait de manière très différente et là je veux juste lire parce que ça me va trop, c’est pour vous persuader qu’il le dit bien - page 162. Voila ce que nous dit Findler, hélas il ne développe pas assez parce qu’il y aurait beaucoup à développer : "lorsque dans le mythe » dans le mythe américain - l’idée de Findler là l’idée n’est pas bonne c’est que cette espèce d’union, union homosexuel entre l’américain avec soit un noir au sud, soit un indien à l’ouest et voilà la différence entre les deux lignes, la ligne du Sud et la ligne de l’Est :"Lorsque dans le mythe le compagnon de couleur que recherche l’américain blanc est noir plutôt qu’indien, on a tendance à interpréter l’histoire comme une tentavive qu’il fait pour étendre le champ de sa sexualité recouvrer une libido perdue", en d’autres termes c’est l’affaire du désir. "Lorsque au contraire le compagnon est indien le mythe s’interprète plutôt comme un essai pour faire une brèche dans notre monde et étendre le champ de notre conscience. Le noir représente dans le mythe, une sexualité qui fascine, une passion étrangère mais l’indien traduit une perception étrangère". D’où par parenthèse le rapport de l’indien avec la drogue qui n’est pas du tout, qui ne se retrouve pas du tout dans le rapport du noir. Le noir représentant dans le mythe, un désir qui fascine, une libido qui fascine, une passion étrangère mais l’indien traduit une perception étrangère, la perception d’un monde étrange autre. Si bien que tout western comme confrontation du cow boy et de l’indien ne pourra se développer qu’en images au moins à tendance perceptive pure c’est-à-dire dans le sens. Aussi bien du point de vue du paysage, que du point de vue des personnes, des héros mis en cause, ce sera un monde de la perception. Donc tout ceci j’essayais de dire çà et ça me prenait du temps mais tant pis.

Pour dire vous voyez, il y a pas seulement : je ne peux pas dire seulement : tout film est un mélange des trois types d’images mais tout film a aussi une dominante. Si bien que je ne peux plus dire simplement : le montage défini comme de ce point de vue limité à nouveau, mais vous voyez c’est un autre point de vue que nous avions au premier trimestre, le montage défini comme détermination du rapport entre les trois types d’images, va donner lieu tout comme j’avais essayé de distinguer au premier trimestre trois sortes de montage ça pourrait êtres 3 comme 4 ,5 ça n’a pas d’importance. Trois types de montage par rapport au Tout.

j’avais distingué :
-  le montage d’opposition,
-  le montage dialectique,
-  le montage quantitatif
-  et le montage intensif.

et bah la, on trouverait en effet trois types de montages assez différents

-  il faudrait parler d’un montage perspectif lorsque domine dans le film les images perceptions ;

-  un montage actif qui est d’un tout autre type qui serait par exemple le montage Fritz Lang - et encore une fois je dis pas que ça épuise la question ni du montage en général ni du montage de Lang c’est un aspect - Le montage actif lorsqu’il s’agit au contraire de mettre en rapport des segments d’actions complexes et dans le cas de Lang en effet il assure son montage actif par l’insertion d’une pendule qui marque les heures entre chaque segment de l’action.

-  Et puis un montage affectif dont c’est évident la passion de Jeanne D’arc serait l’exemple classique, l’exemple immortel. Car en effet il ne suffit pas de dire l’image-affection c’est le gros plan, il s’agit de savoir, une fois dit que c’est un film à dominante de gros plans - ce qui est normal si c’est un film à dominante d’images-affection - il s’agit de savoir comment vous montez là, tous ces gros plans. Car il y a assez peu, comme tout le monde l’a remarqué, il y a assez peu d’images isolées du visage de Jeanne D’arc. Les gros plans de Dreyer dans "la passion de Jeanne D’arc" prennent par exemple le visage de Jeanne D’arc et puis un autre visage celui d’un juge coupé ou de biais, à partir de là vous avez tous les problèmes de montage mais d’un type particulier de montage. Dès que vous avez à faire intervenir un gros plan dans un montage, vous avez un certain problème du modèle du montage affectif, à plus forte raison quand il s’agit de faire un montage de gros plans les uns par rapport aux autres et sans doute est ce une prouesse fantastique le montage de gros plans, bon tout ça, voilà.

Alors c’est bien, parce que on a fini un nouveau pan de ce qu’on avait à faire, c’est ce groupe qu’on a fini maintenant où j’ai quand même rattrapé maintenant, j’ai été trop vite mais tant pis - on a rattrapé un peu du retard que l’on avait pris : à savoir ce nouveau pan que nous avons fait c’est : commentaire du chapitre 1 de "Matière et Mémoire" et conséquence pour les trois types d’images cinématographiques.

Donc les trois cas de l’image-mouvement sont
-  image-perception
-  image-action
-  image-affection. Dès lors notre plan, notre devoir hélas, est tracé pour assez longtemps mais au point que se sera si longtemps qu’il faudra faire des coupures. Mais dans l’absolu on serait forcé avant d’en finir avec l’image-mouvement car on est pressé d’en finir avec l’image-mouvement, ce qui m’intéresse vraiment maintenant c’est : qu’est ce que ça va être les autres images ? et pourtant il faut rester encore il faut patauger dans cette histoire d’image-mouvement alors on est d’un coté attiré, dans l’autre retenu, c’est une bonne situation, c’est une situation riche affectivement ou bien y en a marre de tout et puis voilà. Mais notre plan immédiat : c’est analyse détaillée de l’image-perception, analyse détaillée de l’image- action, analyse détaillée de l’image-affection. Je voudrais faire l’analyse détaillée de l’image-perception au cinéma Et puis si on voit que c’est trop long - et bah je donnerais juste je ne sais pas de très courtes indications sur les deux autres images enfin on pourra concevoir de passer - à moins qu’on travaille ça sur deux ans je ne sais pas oh écouter c’est trop difficile - moi je m’attendais à en avoir pour un semestre - et puis tout ça : fallait pas toucher au cinéma Non moi j’en suis désespéré de tout ça c’est trop difficile.

Bon alors voila image-perception. C’est donc un nouveau thème qu’on abordera. Qu’est ce que c’est que l’image-perception au cinéma ? Et je dis tout de suite parce que là, ça va être difficile parfois, je dis tout de suite que je voudrais envisager comme trois étages parce que c’est confus. C’est très difficile je dirais qu’à un premier étage nous allons voir un premier niveau, nous allons voir qu’il peut y avoir deux pôles - je cherchais des mots mais c’est juste pour diviser notre recherche - que nous allons d’abord distinguer deux pôles de l’image-perception et on va s’apercevoir que - c’est bien oh oui c’est bien mais c’est pas encore suffisant - et à chaque fois il y aura sans doute des cinéastes qui et je veux pas dire que les uns sont meilleurs que les autres je suis bien incapable c’est tellement beau tout ça donc Et puis on va distinguer un second niveau ou il n’y aura non plus deux pôles de l’image-perception mais deux systèmes de perception Et puis on va s’apercevoir que ça va pas encore, ou que ça pourrait être autre chose encore et là on distinguera non pas deux système ou deux pôles mais deux "états" de perception je dis ça uniquement comme points de repères.

Donc ce que je commence immédiatement : c’est les deux pôles de l’image-perception. En quel sens peut on dire qu’il y a deux pôles d’image perception ? Là Bergson nous a donné une indication au moins c’est quoi - c’est qu’en effet il y a deux pôles de perception puisque il y a des perceptions choses et des perceptions qui sont celles que j’ai des choses. Les choses elles même sont des perceptions, en quel sens ? Pas du tout au sens où je dirais que les choses sont mes perceptions mais parce que les choses en-soi du point de vue de l’image-mouvement, sont des perceptions totales et que les perceptions que moi j’ai d’une chose, ce sont les perceptions partielles. Bon, mais ça c’est déjà bien compliqué ; la chose est une œuvre disons alors beaucoup plus simplement on va partir d’une tentative là, où il faut que vous consentiez à m’accorder tout, quitte à ce qu’après, vous me le repreniez.

-  Il faut partir de quelque chose de beaucoup plus simple sur les deux pôles de l’image : qu’est ce que ce serait une image objective et qu’est ce que serait une image subjective ? Et là il ne faut pas être bien exigeant, faudrait se contenter d’une définition très étroitement nominale. Une définition nominale c’est à dire extrinsèque, par opposition à ce qu’on appelle en logique des définitions réelles qui sont des définitions intrinsèques, intérieures à la chose définie. La définition purement extrinsèque qu’est ce que je dirais ? une image subjective c’est quoi ? C’est l’image d’un ensemble tel qu’il est vu du point de vue de quelqu’un qui fait partie de cet ensemble. Voila je me donne ça comme définition de l’image-subjective, voyez ce que je veux dire pour m’épargner des discussions qui n’en finiraient plus, je vais pas dire : "l’image objective c’est une image sans point de vue". Est ce que ça existe une image sans point de vue ? on sait pas à quelles conditions ? C’est déjà trop pour nous.

Donc il faut qu’on parle de quelque chose de beaucoup plus modeste, je dis de toute manière : image objective ou subjective, elles renvoient à un point de vue supposons, mais je dirais que l’image est subjective lorsque c’est l’image d’un ensemble qui renvoie au point de vue de quelqu’un qui appartient à cet ensemble. Je dirais de ce quelqu’un qu’il appartient à cet ensemble qu’il perçoit. Là aussi comprenez bien à quel niveau du problème on en est. Je m’interdis de faire intervenir en tous cas directement, des facteurs subjectifs du type : le rêve, le souvenir, l’hallucination. Cela serait trop facile. Si je faisais c’est, que le mot "sujet" à beaucoup de sens si je fais intervenir directement des facteurs de rêves, d’hallucinations, de souvenirs, j’en suis plus dans les conditions de mon étude, je ne m’occupe plus des images-perceptions comme telles, je m’occupe de tout à fait autre chose, je m’occupe d’images-rêves, d’images-souvenirs dont je sais pas du tout quel est le rapport avec l’image- perception.

Donc là quand j’emploie "subjective" ça peut pas renvoyer à des images de rêves ni de souvenirs, du point de vue qui m’intéresse, il s’agit du cadre étroitement défini précédemment de l’image- perception, si je fais intervenir du rêve, de l’hallucination ou n’importe quoi ce sera simplement sous la forme de facteur agissant sur la perception. Mais je considère pas, j’en suis pas du tout là à un moment où je pourrais considérer le problème de l’image ou le problème de l’image souvenir au cinéma ; c’est pour ça que je dis bien j’appelle pour le moment de manière purement nominale, j’appelle image subjective, l’image d’un ensemble tel qu’il est vu par quelqu’un qui appartient ou qui fait partie de cet ensemble. Des images subjectives comme ça on en connaît au cinéma, bien plus elles sont marquées d’une espèce de splendeur et elles ont commencées très vite dans le cinéma.

Là aussi je cite des exemples.
-  Premier exemple : perception subjective avec cette fois ci, compte tenu de ce que je viens de dire : un facteur actif, puisque tout réagit là, il y a un facteur actif qui agit indirectement sur la perception. Je cite deux cas :
-  la danse ou la fête vu par quelqu’un qui y participe. Voyez que le facteur actif est fort : par exemple la fête foraine vu quelqu’un qui est sur le manège, ça peut donner des perceptions subjectives c’est-à-dire des images-perceptions splendides
-  ou bien la danse, la salle de danse avec tous les danseurs vu par un danseur. Merveille ! l’un c’est un exemple célèbre de Epstein, l’autre c’est un exemple célèbre de L’Herbier.

voilà premier exemple : je dirais perception subjective avec facteur actif. J’en donne un troisième parce qu’il est aussi tellement beau et c’est un grand classique : un film lié à l’expressionisme allemand, à savoir un film de Dupont "Variétés" célèbre image où toute la salle du cirque est vue par l’acrobate au trapèze en plein mouvement. Prodigieuse image où là , la perception subjective est inséparable d’un très fort facteur dynamique actif puisque le sujet qui appartient à l’ensemble cirque est lui même en mouvement tout comme le danseur était lui même en mouvement et l’image de Dupont, les images de "Variétés" sont splendides...

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