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Genre et alimentation

Avant le 1er février 2014 - Journal des Anthropologues


Date de mise en ligne : [18-12-2013]



Mots-clés : anthropologie


Pour un numéro thématique du Journal des Anthropologues, coordonné par Priscille Touraille (CNRS, MNHN), Tristan Fournier (CNRS, CERTOP), Julie Jarty (CNRS, CERTOP) et Nathalie Lapeyre (CNRS, CERTOP)

Argumentaire :

L’idée selon laquelle « les hommes » doivent manger plus que « les femmes », notamment de la viande (des protéines animales), est une idée défendue par le sens commun, particulièrement dans les sociétés occidentales, et actée par les institutions médicales. Elle a longtemps été un paradigme scientifique mais a été récemment remise en question par les sciences de la nutrition. Cette perspective critique ouvre un champ considérable au croisement des sciences sociales et de l’anthropologie biologique. Elle permet de sortir du paradigme qui voit les pratiques alimentaires comme reflétant les besoins physiologiques des individus. Elle désigne « l’obstacle épistémologique » qui a longtemps été à l’œuvre dans les sciences sociales et engage à construire un questionnement véritablement sociologique sur le rapport entre pratiques alimentaires et rapports de pouvoir. Si les recherches à l’interface des gender studies et des food studies ont fait l’objet d’une attention particulière aux Etats-Unis dans les années 1990, un examen approfondi des travaux francophones croisant les thèmes du genre et de l’alimentation laisse apparaître un angle mort dans la littérature relevant de ces deux champs. Partant du constat que cette articulation reste un parent pauvre de la recherche, l’ambition de ce numéro est de faire émerger les savoirs existants sur l’articulation de ces problématiques.
Ce numéro appelle ainsi des contributions qui s’inscrivent à la croisée des gender studies et des food studies, et s’adresse à des chercheuses et chercheurs spécialisé-e-s dans l’un des deux domaines et intéressé-e-s par le croisement de ces thématiques, mais aussi à des personnes qui n’appartiendraient à aucun de ces champs mais qui ont, de par leurs recherches, des données ou des réflexions capables d’illustrer les problématiques en jeu. Nous favoriserons particulièrement les contributions interdisciplinaires, notamment celles qui se proposent d’articuler données biologiques et données sociologiques.

Thème 1 : Inégalités alimentaires genrées

Carole Counihan a écrit que « la nourriture est l’arme de coercition la plus forte qui soit ». Elle est, en d’autres termes, un instrument privilégié de l’inégalité sociale. Cette proposition appelle à une théorisation d’envergure dans les sciences sociales : montrer que les régimes d’inégalité sociale produisent, de manière structurelle, des inégalités alimentaires. Trois axes seront privilégiés :
1) Inégalités alimentaires : nous appelons ici les ethnologues à rendre compte des inégalités alimentaires observées sur leurs terrains respectifs (particulièrement en termes de protéines animales), observations bien souvent non publiées parce que n’entrant pas dans leur thématique principale de recherche. L’effort demandé est d’éclairer ces inégalités à l’aune des discours de justification des informateurs et du contexte structurel d’inégalité de la société, en termes de catégories de genre, mais aussi d’âge, de classe, etc. Nous demandons aux auteur-e- s d’éviter les interprétations « symbolisantes », peu pertinentes ici.
2) Développement et malnutrition : ce thème appelle également des contributions issues de travaux sur le développement centrés sur les problématiques de malnutrition et de ses effets sur la santé des femmes. Par exemple, serait avantageusement proposé un rapport sur les inégalités alimentaires genrées dans un contexte global de pénurie alimentaire.
3) Epistémologie critique : last but not least, nous invitons, avec particulièrement d’enthousiasme, les contributions théoriques ou les contributions qui se saisissent de ce thème sous un angle d’épistémologie critique en anthropologie sociale. Pourquoi existe-t-il si peu de travaux à avoir théorisé le lien entre genre et inégalités alimentaires ? Comment identifier les pôles de résistance à une problématisation qui ouvre pourtant sur des programmes interdisciplinaires à forte portée heuristique et qui promet d’être si puissante du point de vue de la connaissance produite par les sciences sociales ?

Thème 2 : Regards croisés entre genre et alimentation

Nous sollicitons également des travaux qui explorent les questionnements suivants : En quoi les cadres théoriques développés dans le champ des études sur le genre peuvent-ils être pertinents pour l’analyse des pratiques alimentaires ? Et réciproquement, comment l’entrée alimentation peut-elle contribuer à illustrer et à étendre l’analyse des rapports de genrecomme rapports de pouvoir ? Les propositions d’articles pourront par exemple s’inscrire dans l’un des trois axes suivants :
1) Le genre des pratiques alimentaires : il s’agit ici d’aborder les consommations et pratiques spécifiques ou « engagées » (végétarisme, véganisme, bio, diététiques alternatives, etc.) ; d’analyser l’incidence des trajectoires de vie et des ruptures biographiques ; d’étudier le rapport à l’alimentation des groupes à l’articulation des catégories de genre, de génération, de classe, ou d’autres modes de catégorisation sociale.
2) Corps et santé : cet axe s’intéresse aux modalités de réception des recommandations nutritionnelles (observance, orthorexie, etc.) ; à la prévalence et au vécu des troubles du comportement alimentaire (anorexie, boulimie, obésité) ; à la gestion individuelle, conjugale et/ou familiale des risques et pathologies chroniques liés à l’alimentation ; aux effets du modèle d’esthétique corporelle de minceur (régime hyperprotéiné, etc.).
3 Marchés, médias, métiers : il s’agira enfin de poser un regard sur le marketing agro- alimentaire et le « gender merchandising » ; sur la mise en scène des rôles genrés dans la publicité ; sur les impacts de la « téléréalité culinaire » (engouement des hommes pour la cuisine quotidienne, féminisation des « métiers de bouche », etc.) en termes de pratiques et représentations genrées de l’alimentation.

Calendrier et consignes pour les auteur-e-s :

Les projets d’articles (1/2 à 1 page) sont à adresser par mail en format Word à la rédaction du Journal des Anthropologues (afa@msh-paris.fr) avant le 1er février 2013. Les articles complets, d’une longueur maximum de 40 000 signes (espaces compris), seront à remettre avant le 1er juin 2014.

Publication :

1er semestre 2015.

Contacts :

tristan.fournier@univ-tlse2.fr ; jarty@univ-tlse2.fr ; nathalie.lapeyre@univ-tlse2.fr ; touraille@mnhn.fr

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